Cela fait bien longtemps que les valeurs d’actifs décotés ou cachés n’ont plus la cote. Avec la baisse des taux qui n’en finit pas, halte à la "value", place à la croissance ! NRJ Group et son métier historique déclinant, la radio, est depuis de nombreuses années ce que les anglo-saxons appellent un "value-trap". En gros, ce n’est pas cher mais cela le restera et le temps qui passe joue même contre vous. En effet, ce n’est pas cher car cela a peu d’avenir et donc, à la différence des sociétés dont les résultats augmentent année après année, comme les résultats s’affaissent année après année, à multiples constants, la valorisation baisse tous les ans !

Chez NRJ Group, on a plutôt affaire à une stagnation des résultats, le pôle diffusion, qui détient les précieux pylônes de diffusion radio et TNT towerCast parvenant à compenser l’érosion de la Radio et les pertes des chaînes TNT (NRJ 12, NRJ Hits, Chérie 25). Illustration avec cet extrait de la présentation des résultats de l’exercice 2019 du groupe.

Dans un univers des médias en profonde transformation, en France notamment à l’image des récentes cessions d’actifs chez Lagardère, le devenir de NRJ Group, dont le capitaine détient encore à 74 ans 80% du capital dont seulement 10% de la nue-propriété aurait été cédée à ses enfants, fait naturellement l’objet de rumeurs récurrentes. Les prétendants au rachat du groupe dans sa totalité ou en partie sont nombreux : TF1, M6 Metropole Television, Vivendi, NextradioTV (Altice) et le "nouveau" venu dans le PAF ces dernières années : Mediawan. Ce dernier aurait même, selon La Lettre de l'Expansion, proposé début 2018 la somme de 1 milliard d'euros pour en prendre le contrôle. Pas assez pour le capitaine du groupe de médias, qui en aurait demandé 1,2 milliard d'euros. "NRJ Group est courtisé par tout le monde" déclarait déjà JPB à nos confrères du Figaro dans un entretien paru en septembre 2015.

1 milliard, vraiment ? C’est effectivement la zone autour de laquelle tournent les évaluations du groupe selon la méthode de la somme des partie ou actif net réévalué (ANR). Pour résumer, le groupe est composé de cinq actifs de plus ou moins 200 M€ chacun : la radio en France, towerCast, la TV, l’immobilier (deux immeubles parisiens totalisent environ 12 500 m2), l’international et divers et enfin la trésorerie nette de dettes financières. Le calcul effectué par exemple en 2018 par le blog des minoritaires de NRJ Group tient encore la route.

Alors que les résultats 2020 de NRJ Group étaient attendus dans le rouge par les analystes, l’annonce de la cession pour 50 M€ des 5% détenus dans le 5e opérateur mobile français devrait largement compenser, la valeur de la participation au bilan avoisinant les 8 M€ à fin 2019, soit une plus-value qui pourrait dépasser les 40 M€.

Quant à la valeur intrinsèque du Groupe, c’est plutôt une bonne nouvelle puisque cette participation était marginale et même ignorée par la grande majorité des analystes dans leur calcul de valeur à la découpe du conglomérat.

Maintenant, ne rêvons pas, la quarantaine de millions d’euros nets dégagés par cette cession ne viendra très probablement que grossir le trésor de guerre accumulé, soit 200 M€. Les dividendes exceptionnels et les rachats d’actions ne sont pas dans les habitudes d’un groupe qui peine à optimiser l’allocation du capital et préfère rester près de ses sous. Même le petit dividende que verse habituellement le groupe sera supprimé cette année, la Covid-19 étant passé par là.

Alors non, NRJ Group n’est surement pas près d’être vendu pour plus d’un milliard, surtout que Mediawan vient de faire ses emplettes. Mais oui, cette cession a de quoi redonner un peu d’espoir aux investisseurs dans la valeur qui jusque là se sont retrouvés bien piégés dans ce "value trap". Le titre gagne d’ailleurs, péniblement, 5% sur l’annonce ce mercredi, à 5,44 €. Et sa capitalisation boursière d’avoisiner les 400 M€, loin des 900 M€ touchés fin 2017 quand les rumeurs de cessions se faisaient un peu plus précises…

Cours de NRJ Group sur 5 ans : la spéculation de la fin 2017 a laissé place à l’indifférence

L'Auteur est actionnaire à titre personnel de la société.