(Actualisation: calendrier du plan de restructuration, perquisitions dans certains établissements, réaction en Bourse)

PARIS (Agefi-Dow Jones)--Aux grands maux les grands remèdes. Lesté d'une dette nette de 9,55 milliards d'euros et exposé à un risque de liquidité dès le premier trimestre 2023, Orpea a présenté mardi un plan de restructuration drastique basé sur deux augmentations de capital d'un montant total qui pourrait atteindre 5,4 milliards d'euros, soit environ dix fois la capitalisation boursière actuelle de l'exploitant de maisons de retraite.

Le groupe, dont la capitalisation boursière a fondu de 90% depuis les révélations du livre-enquête "Les Fossoyeurs" en janvier dernier, prévoit d'abord une augmentation de capital de 3,8 milliards d'euros offerte aux actionnaires existants du groupe. Les fonds levés serviraient à rembourser une partie de la dette. Dans l'hypothèse où l'augmentation de capital n'était pas entièrement souscrite, le reliquat serait proposé aux créanciers sous la forme d'une conversion de dette en capital.

Dans un deuxième temps, Orpea se lancerait en quête d'argent frais pour un montant compris entre 1,9 milliard et 2,1 milliards d'euros. Le groupe prévoit d'émettre 600 millions d'euros de nouvelles dettes garanties sur ses actifs. Ces fonds permettraient de couvrir ses besoins de financement jusqu'au début de l'été. Puis, Orpea lancerait une deuxième augmentation de capital d'un montant compris entre 1,2 milliard et 1,6 milliard d'euros. Elle serait d'abord proposée aux créanciers et aux actionnaires ayant participé à la première augmentation de capital, puis à des investisseurs tiers. Les caractéristiques de cette opération ne sont pas encore déterminées.

La réalisation des augmentations de capital est "envisagée pour le mois de juin 2023, à la fin du processus de restructuration, sous réserve des conditions suspensives habituelles", a indiqué Orpea dans un communiqué. Avant cela, le groupe prévoit de rencontrer ses créanciers non garantis dans le cadre du processus de conciliation le, ou aux alentours du, 1er décembre.

Orpea "s'attend à recevoir des offres fermes pour la nouvelle dette garantie sur des actifs d'ici mi-janvier 2023, avec un objectif de financement au cours du mois de février 2023", a-t-il précisé, en ajoutant que des offres fermes pour le processus de levée de capitaux propres seraient également demandées pour la mi-janvier.

Avec ce plan, Orpea espère s'assurer les liquidités nécessaires pour poursuivre son activité à court terme et se doter d'actionnaires de long terme, prêts à soutenir le redressement de l'entreprise. A cet égard, Orpea s'attend à ce que à l'issue de ces opérations, au moins 20% de son capital social soient détenus par des investisseurs institutionnels français à long terme.

Importante dilution en perspective

Revers de la médaille, ce plan va coûter cher aux actionnaires existants s'ils ne remettent pas au pot.

Le groupe a ainsi reconnu que la mise en œuvre de ces opérations entraînerait "une dilution massive pour les actionnaires existants qui décideraient de ne pas y participer".

Un scénario qui a incité l'un de ses principaux actionnaires, Mirova, la filiale ESG (environnement, social, gouvernance) de Natixis IM, à céder un peu moins de 4% du capital à la fin du mois d'octobre.

Surtout, le groupe se trouve dans le collimateur des actionnaires activistes Mat Immo Beaune et Nextstone, qui détiennent à eux deux plus de 5% du capital. Ce concert, baptisé "Concert'o", a estimé la semaine dernière que le seul objectif d'Orpea était de faire supporter aux actionnaires et aux créanciers non sécurisés de la société "une dépréciation massive de leurs actifs".

Un milliard d'euros de cessions d'actifs immobiliers

D'un point de vue opérationnel, le groupe veut tourner la page "d'un développement immobilier non maitrisé et excessif qui explique en grande partie la situation actuelle du groupe", selon le directeur général, Laurent Guillot, arrivé en juillet dernier.

Concrètement, Orpea a identifié un portefeuille d'actifs immobiliers estimé à plus d'un milliard d'euros, "prêt à être cédé dès que les conditions de marché le permettront".

A moyen terme, Orpea prévoit la création d'une foncière dédiée dont le groupe resterait l'actionnaire principal et l'opérateur. Cette structure permettrait d'ouvrir le capital à des investisseurs de long terme.

Retour de la croissance des résultats

Preuve qu'Orpea croit en son avenir, le groupe a également dévoilé ses objectifs pour les trois prochaines années. Il table sur une croissance moyenne de son chiffre d'affaires de 9% par an entre 2022 et 2025, à 6,1 milliards d'euros en fin de période. Le groupe vise également une progression de sa marge d'Ebitdar (Ebitda avant loyers) de 340 points de base au total sur la période, à 20,4%. L'Ebitdar devrait progresser de 16% par an en moyenne, pour atteindre 1,25 milliard d'euros en 2025.

La marge d'Ebitda (excédent brut d'exploitation), hors norme comptable IFRS 16, est attendue à 12,2%, correspondant à un Ebitda hors IFRS 16 de 745 millions d'euros en 2025, en progression de 28% par an sur la période 2022-2025.

Le groupe vise enfin une progression moyenne du nombre de ses établissements de 4% par an, pour atteindre 1.173 sites, et du nombre de lits de 3,3% par an, à 96.806 lits en 2025. Si cet objectif peut sembler paradoxal en pleine restructuration, il s'explique en grande partie par la conclusion de projets en cours de réalisation.

En Bourse, le titre Orpea cédait 3,1% à 7,95 euros vers 13h40, après avoir beaucoup fluctué dans la matinée au fil des annonces de la direction, qui effectue une présentation destinée à convaincre les investisseurs que le groupe est capable de restaurer ses équilibres financiers. Justifiant la baisse du titre en début d'après-midi, Orpea a indiqué que des perquisitions étaient menées dans certains de ses établissements et qu'il collaborait entièrement avec la justice.

-Pierre-Jean Lepagnot, Agefi-Dow Jones +33 (0)1 41 27 48 19; pjlepagnot@agefi.fr ed: VLV-DID

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November 15, 2022 07:39 ET (12:39 GMT)