Paris (awp/afp) - La filière automobile française doit présenter mardi sa feuille de route pour 2030, avec l'ambition de sortir gagnante de la révolution électrique, tandis que les usines restent en partie paralysées par une pénurie de pièces.

"Comment la France, qui a inventé l'automobile, pourrait se faire une place dans le futur de l'automobile?" a lancé Luc Chatel, le président de la Plateforme automobile (PFA), à l'ouverture de cette journée qu'il organise. "Le rebond est possible si des choix forts sont faits aujourd'hui".

Le patron de Renault, Luca de Meo, a dressé le portrait d'un secteur où l'Europe est dépassée par la Chine dans l'électrique, et par les Etats-Unis dans la "digitalisation" de l'industrie. Il faut que l'UE prenne "le leadership sur un modèle économique vert", a-t-il souligné.

Si la France souffre par ailleurs d'un "problème de compétitivité", selon M. De Meo, l'industrie peut se battre "sur l'innovation et les compétences", sur "la valeur ajoutée qu'il faut aller capturer au-delà de la production des véhicules électriques, en amont avec les composants et en aval avec le business de la donnée et des services de mobilité", et enfin sur l'adoption de l'électrique par les Français, avec le développement d'un réseau suffisant de bornes de recharges.

Un millier de professionnels, entre constructeurs, équipementiers et start-up, participent à cette journée à la Cité des sciences, dans le nord de Paris. Le ministre de l'Economie Bruno Le Maire y est attendu en fin d'après-midi.

Depuis le début de l'année, l'industrie est freinée par une pénurie de pièces électroniques, principalement fabriquées en Asie, par des problèmes de logistique, mais aussi par la hausse du coût des matières premières.

"Personne n'est à l'abri d'une défaillance. On a le sentiment que les constructeurs ont attrapé le Covid et que c'est toute la filière qui est en soins intensifs", a lancé Luc Chatel.

Après la mise en oeuvre, en mai 2020, d'un plan de relance automobile doté de huit milliards d'euros, la filière estime à 17 milliards d'euros les investissements à localiser en France dans les cinq ans, "sur les technologies clés de l'automobile du XXIe siècle". La PFA évalue le besoin de soutien public à 30%.

"On ne demande pas une nouvelle baisse des impôts de production. On ne va pas rogner sur le modèle social. Mais si on ne fait pas ça, il faut faire autre chose", a souligné Luc Chatel, qui propose notamment la création de zones franches.

Conserver des emplois

La filière devrait connaître mardi la ventilation des deux milliards d'euros de soutien public à l'automobile annoncés par Emmanuel Macron dans son plan "France 2030".

Le président de la République vise notamment à "produire en France à l'horizon 2030 près de deux millions de véhicules électriques et hybrides", alors que les usines de Renault, Stellantis et Toyota ont produit 2,2 millions de véhicules en 2019, toutes motorisations comprises.

L'industrie automobile française a largement délocalisé sa production au cours des dernières décennies, et des sous-traitants traditionnels, comme certaines fonderies qui fabriquent des pièces de moteurs traditionnels, sont menacés de fermeture.

Les syndicats mais aussi l'Etat demandent aux constructeurs de prendre leurs responsabilités, notamment en garantissant des commandes.

Renault "a pu faire dans le passé des choix compliqués qui ont pu mettre des entreprises en difficulté", a reconnu Luca de Meo. Mais il faut trouver "un équilibre": "se mettre dans la démarche où ce n'est qu'aux constructeurs de trouver la solution, ça risque de nous plomber".

La fabrication des véhicules électriques nécessitant moins de main-d'oeuvre que les thermiques, la transition énergétique pourrait faire perdre 65.000 emplois à la filière en France, selon la PFA.

Mais "si le scénario du déclin l'emportait, on serait à 100'000 emplois de moins", a souligné Luc Chatel.

afp/ck