Paris (awp/afp) -Le groupe français Safran a promis jeudi d'accroître l'année prochaine les livraisons de son moteur Leap plébiscité par Airbus et Boeing sans pour autant convaincre les investisseurs, qui ont jugé décevantes ses prévisions financières à horizon de 2028.

Confiant dans le fait que "certains goulets d'étranglement" chez les fournisseurs seront "déverrouillés" en 2025, Safran envisage une hausse de 15% à 20% des livraisons de Leap, qui équipe les avions les mieux vendus d'Airbus et de Boeing par rapport à 2024, après avoir revu plusieurs fois à la baisse cet indicateur cette année.

La situation sera meilleure pour les aubes de turbine haute pression, pièce essentielle de Leap, mais en 2025 "on aura toujours une chaîne de fournisseurs fragilisée, cela restera un combat", a admis le directeur général de Safran Olivier Andriès au cours d'une conférence de presse à l'occasion de sa journée investisseurs.

Affecté par les difficultés touchant ses fournisseurs, le motoriste et équipementier aéronautique prévoit cette année une baisse de 10% des livraisons de Leap, qui équipe la totalité des Boeing 737 MAX et environ 60% des Airbus A320neo, alors qu'il tablait auparavant sur une hausse de 0% à 5%.

"La résilience" de la chaîne de fournisseurs est une priorité pour Safran qui a investi "dans des secteurs stratégiques de forge et fonderie", selon le directeur général.

2.500 Leap en 2028 ___

"Le Leap est devenu le moteur préféré des compagnies aériennes parce qu'il délivre la meilleure performance en termes de consommation de carburant", même "au-delà des 15% sur lesquels on s'était engagé" par rapport aux moteurs de la génération précédente, a souligné Olivier Andriès.

"Nous prévoyons d'atteindre le niveau de 2.000 moteurs en 2026 et on se voit autour de 2.500 moteurs produits et livrés en 2028", a-t-il précisé.

Malgré les difficultés pour livrer des Leap à ses clients, Safran se vante d'avoir "dépassé" ses prévisions dévoilées au cours de la précédente journée investisseurs en 2021, ont précisé les responsables du groupes.

En 2025, Safran prévoit d'atteindre une croissance du chiffre d'affaires d'environ 10%.

"On a des positions de premier plan sur des marchés qui croissent plus vite que le PIB mondial. C'est le cas de l'aviation civile et de la défense où effectivement les dépenses mondiales ont atteint un niveau record en 2023 et compte tenu des tensions géopolitiques, cela continuera très probablement à augmenter", a expliqué M. Andriès.

Le groupe vise par ailleurs à horizon 2028 une croissance annuelle moyenne de son chiffre d'affaires comprise entre 7% et 9% à périmètre constant - hors éventuelle acquisition ou cession - et compte générer 15 à 17 milliards de trésorerie disponible cumulée sur la période 2024-2028.

Surtaxe intégrée aux prévisions ___

D'ici 2028, "le résultat opérationnel courant devrait atteindre entre 6 et 6,5 milliards d'euros", une perspective jugée "extrêmement prudente" par les analystes de Barclays, qui attendaient plutôt 6,5 à 6,8 milliards d'euros à cette échéance.

Le titre de Safran chutait de 6,52% à la Bourse de Paris à 15H GMT, dans un marché en très légère hausse.

"La direction de Safran est connue pour ses orientations prudentes, mais les objectifs financiers pour 2028 divulgués ce matin dépassent les niveaux historiques de prudence", ont-ils jugé.

La crise politique en France pèse plus sur les prévisions que la politique protectionniste à venir de Donald Trump, selon les dirigeants de Safran.

La motion de censure votée mercredi contre le gouvernement de Michel Barnier "crée une incertitude politique et économique, c'est une situation que les investisseurs n'aiment pas", résume Olivier Andriès.

Selon Pascal Bantegnie, directeur financier de Safran, les prévisions présentées aux investisseurs prenaient en compte "des dispositifs qui étaient évidemment contre l'intérêt des entreprises, notamment l'impôt sur les sociétés".

"D'après nos estimations, cela nous aurait coûté à peu près 500 millions d'euros en cash, un peu plus de 300 millions l'année prochaine et près de 200 millions en 2026. C'est comme cela que nous avons bâti notre plan pour 2028", a-t-il ajouté.

Même si le budget "n'est plus valable à l'heure où l'on se parle", "il est quand même probable que ces mêmes dispositions reviennent dans la future loi de finances", a-t-il conclu.

afp/rp