par Yann Le Guernigou et Jean-Michel Bélot

Le n°4 mondial de la pharmacie, qui détenait déjà 24,88% de Zentiva, propose 1.050 couronnes tchèques par action pour le solde du capital du fabricant de génériques.

Cette offre, mieux disante de 10,5% par rapport à celle de PPF, valorise cette société à 1.655 millions d'euros. Pour acquérir les près de 75% de capital qui lui manque, Sanofi est prêt à mettre sur la table 1.240 millions d'euros.

Le laboratoire espère finaliser l'opération d'ici la fin 2008 et pense qu'elle sera "légèrement relutive la première année de l'intégration". Il compte la financer sur son cash flow libre, a encore déclaré un porte-parole.

Le prix représente une prime de 14,6% par rapport au cours de clôture de Zentiva le 30 avril (916 couronnes) à la Bourse de Prague, à l'avant-veille du jour où le fonds tchèque PPF avait dévoilé son projet d'offre en exprimant l'ambition de prendre une participation majoritaire dans le groupe pharmaceutique.

Contrôlé par l'homme d'affaires le plus riche de la République tchèque, Petr Kellner, PPF s'est associé pour son offre à PPF Generali Holding, sa coentreprise d'assurance avec l'italien Generali qui détenait déjà 19,1% de Zentiva.

Les analystes pensent que l'opération est stratégiquement intéressante pour le groupe français puisqu'elle va lui permettre de se développer dans les pays de l'Est.

"Le but du jeu pour Sanofi est de se développer dans les pays de l'Est", commente ainsi Philippe Lanone, analyste chez Natixis Securities, qui juge le prix proposé "cohérent".

Mais certains estiment que cet objectif aurait pu être atteint avec une participation moins importante et que l'offre de PPF a poussé Sanofi à sortir du bois.

SANOFI BOUSCULE

"Pourquoi Sanofi fait-il son offre maintenant alors qu'il aurait pu l'engager tranquillement lorsque le cours de Zentiva était plus bas ?", s'interroge Jean-Jacques Le Fur (Oddo).

Chez WestLB, Olivier Kämmerer affirme que l'offre a toute les chances d'être un succès mais il note qu'à ce stade il n'est pas évident de savoir si Sanofi veut s'impliquer davantage sur le marché des génériques ou simplement utiliser Zentiva comme une plateforme de distribution en Europe de l'Est.

En Bourse, le titre de Sanofi a réagi en hausse. Vers 17h00, il inscrivait un gain de 1,02% à 42,48 euros en ligne avec l'indice sectoriel européen de la pharmacie (+1,05%).

De son côté, l'action Zentiva a clôturé à 1.117 couronnes, en progression de près de 7%, les investisseurs semblant ainsi parier sur la poursuite de la bataille pour le contrôle du groupe.

Dans son communiqué, Sanofi-Aventis souligne qu'il est déjà présent sur les différents marchés où Zentiva opère et que l'acquisition du contrôle du groupe qu'il envisage "s'inscrit dans une logique stratégique forte".

Elle lui permettrait d'accroître son poids dans les génériques, aujourd'hui considérés par les grands groupes pharmaceutiques comme un vecteur de développement dans les pays émergents mais aussi comme un moyen pour relever le défi global de la maîtrise des dépenses de santé imposée par les pouvoirs publics.

Zentiva, qui dispose de positions fortes en République tchèque et en Slovaquie, est également présente en Roumanie et, depuis 2007, en Turquie. L'an dernier, l'entreprise a réalisé un chiffre d'affaires de 700 millions d'euros.

De son côté, Sanofi-Aventis a engrangé des ventes de 1,7 milliard d'euros dans la zone regroupant la République tchèque, la Slovaquie, la Roumanie, la Russie, la Pologne et la Turquie.

ZENTIVA PLAIDE L'ATTENTISME

Zentiva avait demandé à ses actionnaires de conserver leurs titres en attendant l'examen en détail de l'offre de PPF. Il a recommandé mercredi à ses actionnaires de ne prendre aucune décision après l'annonce de Sanofi, indiquant que son conseil d'administration se réunira prochainement pour l'étudier.

PPF s'est refusé pour sa part à tout commentaire dans l'immédiat, indiquant seulement qu'il entendait poursuivre le déroulement de son offre, qui vient juste de s'ouvrir après avoir reçu au début du mois le feu vert de la banque centrale tchèque.

Le cours de Bourse de Zentiva a culminé à 1.571 couronnes en avril 2007 mais est retombé à 784 couronnes en janvier, le groupe ayant entre-temps lancé deux avertissements sur résultats en raison de dépréciations en Roumanie et d'un ralentissement de sa croissance sur son marché domestique du fait des efforts du gouvernement de Prague pour réduire les dépenses de santé.

L'offre de Sanofi-Aventis intervient au moment où le groupe français est sous la pression des marchés en raison des risques de concurrence générique sur certaines de ses molécules vedettes et de l'échec de l'Acomplia, son traitement de l'obésité, qu'il a renoncé à commercialiser aux Etats-Unis.

Son cours de Bourse a touché mardi un plus bas depuis février 2003 et accuse un recul de 33% depuis le début de l'année, sous-performant largement l'indice DJ Stoxx des valeurs pharmaceutiques européennes qui régresse de près de 16%.

Avec les contributions de Jan Korselt à Prague, de Sudip Kar-Gupta et de Noëlle Mennella à Paris, édité par Yann Le Guernigou