Zurich (awp) - Le chimiste de la construction Sika a démarré l'année sur une poussée de croissance, portée par presque toutes ses activités. Toutefois, au vu des incertitudes entourant la crise du coronavirus, la direction du groupe zougois a suspendu ses ambitions annuelles et s'attend à une nette détérioration au deuxième trimestre.

Malgré un ralentissement généralisé, le chiffre d'affaires réalisé entre janvier et mars s'est étoffé de 10,3% sur un an pour s'établir à 1,81 milliard de francs suisses. Exprimée en monnaies locales (ML), la croissance a atteint 15,4%, mais ajustée des effets d'acquisition - essentiellement du français Parex - l'évolution organique est négative (-1,3%).

La région Europe/Moyen-Orient/Afrique a enregistré une progression de 8,6% à 723,8 millions de francs suisses, les Amériques de 16,6% à 480,8 millions et l'Asie/Pacifique de 25,0% à 332,7 millions, égraine le compte-rendu intermédiaire publié mardi.

Dans un contexte d'effondrement de l'industrie automobile, le groupe est parvenu à gagner des parts de marché. Alors que la production mondiale a été amputée de près d'un quart et que les constructeurs ont été contraints à l'arrêt dès mi-mars, la division en charge des débouchés mondiaux (Global Business) n'a connu un recul que de 11,8% (-7,1% ML) à 213,7 millions de francs suisses.

Contrats raflés

Sika estime que les grandes tendances de la branche automobile sont intactes et voit dans les segments de l'électromobilité et des matériaux légers des relais de croissance à long terme. "Nous avons décroché plusieurs jolis nouveaux contrats et en avons ravi quelques uns à la concurrence", a indiqué en téléconférence le directeur financier (CFO) Adrian Widmer.

La performance s'inscrit dans le haut des projections des analystes consultés par AWP, qui anticipaient en moyenne un chiffre d'affaires de 1,80 milliard. Seule la région Amériques a manqué le coche, et ce de manière marginale.

Le groupe a suspendu les objectifs formulés pour l'année en cours, invoquant les incertitudes liées à la pandémie de Covid-19, tout en réaffirmant ses ambitions stratégiques, notamment une croissance annuelle en monnaies locales de 6-8% à l'horizon 2023, ainsi qu'une amélioration de la marge opérationnelle (Ebit) à 15-18%, et ce dès le prochain exercice.

"Sika également sera touché par la crise, mais grâce à la proximité avec nos clients dans tous les pays, nous pouvons rapidement saisir des opportunités et ainsi continuer d'acquérir des parts de marché", a déclaré le patron de la multinationale zougoise, Paul Schuler, cité dans un communiqué.

Effritement des ventes en vue

Pour le seul mois d'avril, la direction du groupe s'attend à un recul des ventes à deux chiffres en pourcent, sans plus de précisions. "Tout dépendra de combien durera encore le gel des activités dans plusieurs pays", a indiqué M. Schuler.

Au vu de la situation, la direction entend mettre l'accent sur la préservation des liquidités. Les dépenses non stratégiques ont été reportées et les structures de coûts ajustées, "sans menacer la croissance à long terme", assure l'entreprise, qui se targue d'avoir un bilan solide.

Sika a entamé l'exercice 2020 avec près d'un milliard de francs suisses dans ses caisses. Le groupe indique par ailleurs disposer de lignes de crédit à hauteur de 1,25 milliard.

L'entreprise dispose de réserves de trésorerie "significatives", a assuré M. Schuler. Sika est toujours à l'affût d'opportunités d'acquisitions complémentaires. "J'espère bien que certaines entreprises auront des problèmes encore plus importants que les nôtres" a-t-il ajouté, précisant que cette année, il ne faut pas s'attendre à des transactions de plus de 500 millions de francs suisses.

Les chiffres publiés par Sika ont été accueillis plutôt favorablement par la communauté financière, qui salue le maintien des objectifs stratégiques et l'optimisme affiché par la direction. Dans une note, la Banque cantonale de Zurich (ZKB) relève toutefois que la surperformance par rapport au consensus est essentiellement due à un pronostic particulièrement pessimiste.

Vontobel prévient que la suite de l'exercice promet d'être plus difficile, étant données les restrictions gouvernementales mises en place dans un nombre croissant de marchés où le groupe est présent. La banque de gestion estime néanmoins que Sika devrait sortir gagnant de la crise actuelle grâce à ses opportunités de croissance structurelles et son modèle d'affaires éprouvé.

A la Bourse, l'action Sika a terminé en hausse de 2,5% à 164,60 francs suisses, dans un SMI en baisse de 2,43%.

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