Tokyo (awp/afp) - SoftBank Group a annoncé mardi un accord avec l'américain Nvidia mettant fin à la vente à ce dernier du fabricant britannique de microprocesseurs Arm, à cause "d'obstacles réglementaires significatifs" à cette transaction qui valait plusieurs dizaines de milliards de dollars.

Le géant japonais des investissements dans les nouvelles technologies compte à la place réintroduire Arm en Bourse d'ici fin mars 2023, selon un communiqué.

Le projet de céder Arm à Nvidia, annoncé en septembre 2020 et qui devait initialement se concrétiser en ce début d'année, avait du plomb dans l'aile depuis des mois face aux vives réticences exprimées par diverses autorités réglementaires dans le monde entier, inquiètes de la position centrale dans l'industrie mondiale des semi-conducteurs que cette acquisition pouvait offrir à Nvidia.

Arm, qui appartient à SoftBank depuis 2016, est la référence mondiale en termes d'architectures de microprocesseurs, fabriqués sous licence et contenus dans presque tous les smartphones, la majorité des tablettes et des écrans TV numériques, et dans une part significative des puces avec processeurs intégrés.

En décembre dernier, l'Autorité américaine de la concurrence (FTC) avait ainsi saisi la justice administrative pour bloquer sa vente à Nvidia. La Commission européenne et le régulateur britannique menaient par ailleurs des enquêtes approfondies sur l'opération, Londres y voyant un risque pour la sécurité nationale.

Le DG emblématique d'Arm s'en va

Arm a annoncé séparément mardi le départ de son directeur général emblématique Simon Segars, qui occupait ce poste depuis 2013 et qui avait rejoint la société très peu de temps après sa création au début des années 1990.

Le président de la puissante unité de propriété intellectuelle d'Arm, Rene Haas, a été nommé pour remplacer M. Segars, lequel doit temporairement avoir un rôle de "conseiller" pour permettre une bonne transition.

SoftBank Group a précisé garder un montant de 1,25 milliard de dollars que Nvidia lui avait versé au moment de la signature du contrat de vente d'Arm et qui était non-remboursable. Cette somme va être enregistrée comme bénéfice dans les résultats du groupe nippon sur son quatrième trimestre 2021/22 (janvier-mars).

Mais le manque à gagner pour SoftBank Group est énorme : le prix de vente d'Arm était de 40 milliards de dollars au départ, et sa valeur avait considérablement augmenté depuis car une partie devait être payée en actions Nvidia, spécialiste des cartes graphiques dont le titre a décollé l'an dernier.

Un "blizzard" risquant de durer

En parallèle, SoftBank Group a publié mardi un maigre bénéfice net de 29 milliards de yens (220 millions d'euros) sur son troisième trimestre 2021/22.

Cela représente certes un effondrement de 97,5% sur un an, mais c'est en même temps une amélioration par rapport au deuxième trimestre, quand le groupe avait subi une perte nette équivalente à 3 milliards d'euros, victime de la chute en Bourse de plusieurs de ses gros actifs (Alibaba, Didi Chuxing, Coupang...), aux États-Unis comme en Chine.

Le groupe souffre à la fois de l'affaiblissement des valeurs technologiques à cause de la perspective d'un resserrement monétaire plus agressif qu'initialement prévu aux États-Unis, et de la mise au pas du secteur chinois de la tech par le régime de Pékin.

"Nous sommes dans le blizzard", avait reconnu en novembre dernier son PDG Masayoshi Son.

Pour tenter d'apaiser les actionnaires, il avait alors annoncé un nouveau programme XXL de rachat d'actions SoftBank Group pour un montant maximum de 1.000 milliards de yens (7,6 milliards d'euros), étalé sur un an au moins. Sans que cela n'enraye la chute du titre SoftBank Group ces derniers mois.

"Ce +blizzard+ a probablement encore de la marge pour perdurer, car le principe classique d'acheter à la baisse qui a dopé la tech ces deux dernières années est moins visible", a commenté mardi Kirk Boodry, analyste de Redex Research publiant sur la plateforme Smartkarma.

Avec l'échec de la vente d'Arm, le groupe nippon risque d'avoir du mal à financer son énorme programme de rachat d'actions, avait déjà souligné auparavant M. Boodry.

Pour ne rien arranger, Marcelo Claure, le directeur opérationnel de SoftBank Group et l'un des principaux lieutenants de Masayoshi Son, a claqué la porte fin janvier, après des désaccords sur la stratégie ainsi que sur la hauteur de ses rémunérations.

afp/lk