Zurich (awp) - Après deux ans et demi à la tête du groupe Stadler Rail à titre intérimaire, Peter Spuhler a finalement déniché son successeur au sein-même de l'entreprise. Le bouillonnant Thurgovien a jeté son dévolu sur son actuel numéro deux Markus Bernsteiner, qui reprendra au 1er janvier prochain la fonction de directeur général (CEO).

"En la personne de Markus Bernsteiner, j'ai trouvé un collaborateur extrêmement compétent, un compagnon de route de longue date et une personnalité expérimentée à l'esprit d'entreprise pour diriger le groupe", s'est félicité mercredi dans un communiqué celui qui avait remplacé au pied levé Thomas Ahlburg, dont l'entreprise s'était séparée au début de la crise pandémique sur fond de différends stratégiques.

Âgé de 55 ans, le futur patron de Stadler a rejoint la multinationale de Suisse orientale en 1999 après avoir fait ses armes chez Bühler, puis Benninger. Actuel CEO adjoint du groupe, il dirige également la division Suisse ainsi que les sites de Bussnang et de Sankt Margrethen. Peter Spuhler pourra quant à lui à nouveau se concentrer sur son mandat de président du conseil d'administration.

L'annonce intervient au sortir d'un premier semestre mitigé qui a vu les commandes s'envoler en comparaison annuelle, alors que le bénéfice net a été réduit à peau de chagrin, essentiellement en raison du franc fort, et les objectifs de rentabilité rabotés.

Explosion des commandes

Les prises de commandes ont presque doublé à 5,97 milliards de francs suisses, alors que le carnet d'ordres affichait fin juin 21,73 milliards, indique Stadler dans son rapport à mi-parcours. Le chiffre d'affaires net a quant à lui progressé de 3,8% à 1,47 milliard de francs suisses.

Les mesures mises en place pour contrer les difficultés d'approvisionnement - production en flux continu, optimisation des commandes de matériel, ancrage local des fournisseurs - ont permis d'éviter tout report significatif de livraison, mais se sont traduites par une hausse des coûts.

Cela n'a pas empêché Stadler de voir son excédent opérationnel (Ebit) bondir de plus d'un tiers (+36,9%) à 66,8 millions de francs suisses, pour une marge afférente de 4,5%, en progression de 100 points de base (pb) sur un an.

Les effets de change de 30 millions en raison de la forte appréciation du franc, en particulier face à l'euro, ont pesé sur les résultats financiers, réduisant presque à néant le bénéfice net, à 2,4 millions, contre 26,3 millions un an plus tôt. A l'exception du résultat net, la copie rendue par Stadler est supérieure aux projections du consensus AWP.

Objectifs partiellement remaniés

Au vu de sa performance semestrielle, la direction de Stadler vise désormais pour l'ensemble de l'exercice des entrées de commandes pour 7,0 milliards de francs suisses, contre 4,0-6,0 milliards jusqu'ici. La barre pour la marge Ebit - ressortie à 6,2% en 2021 - a en revanche été ramenée à "au moins 5%", après "stable". Les ambitions en matière de revenus et d'investissement ont quant à elles été confirmées.

En téléconférence, Peter Spuhler a assuré ne pas vouloir "punir les actionnaires en raison des bouleversements monétaires", évoquant la distribution d'un dividende spécial, même si "cela reste de la musique d'avenir", en attendant de voir ce que réservera le second semestre.

Revenant sur le relèvement du taux directeur de 0,5 point décidé mi-juin par la Banque nationale suisse (BNS) pour contrer l'inflation, le dirigeant estime que s'il était intervenu début juillet, l'entreprise aurait eu la possibilité d'effectuer des achats en euros à des taux de change plus avantageux.

"Mais avec une hausse de taux si peu de temps avant la fin du semestre, nous avons hélas été fortement touchés", a déclaré l'industriel alémanique, promettant de "tout mettre en oeuvre pour corriger cela au cours du second semestre".

La Banque cantonale de Zurich (ZKB) évoque un résultat semestriel mitigé, en raison de l'impact inattendu des devises sur le bénéfice net. "Au vu de l'énorme carnet de commandes, des questions se posent quant au risque et au profil de rendement implicite", estime l'établissement dans une note.

Les investisseurs ont été conquis par les propos du CEO. Après un démarrage poussif, la nominative Stadler a pris l'ascendant. Le titre a terminé la séance de la Bourse suisse sur un bond de 2,96% à 29,94 francs suisses, dans un marché SPI en repli de 0,18%.

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