Née du mariage entre Fiat Chrysler et PSA en 2021, la structure de la société, destinée à rivaliser avec ses pairs européens (Volkswagen), asiatiques (Toyota) et américains (Ford Motors), avait dans un premier temps affiché de belles promesses. Les exercices 2022 et 2023 furent lucratifs, avec des synergies immédiatement visibles. La marge nette a même côtoyé les 10 % et les programmes de hausses de prix ont permis de gonfler le chiffre d’affaires. En bourse, le titre a suivi cette belle trajectoire de croissance avec des plus-hauts atteints en mars 2024, il y a seulement un an, lorsque les promesses d’avenir du beau navire mené par le charismatique Carlos Tavares semblaient inébranlables.
Mais la mariée était trop belle. Les actionnaires du groupe franco-italien sont retombés sur terre avec une accumulation de mauvaises nouvelles. Pêle-mêle, le groupe a subi l’arrivée des constructeurs chinois et la colère des concessionnaires nord-américains qui accusaient l’entreprise de pratiques désastreuses après que Tavares a fait gonfler les stocks des distributeurs bien au-delà du nécessaire pour artificiellement augmenter les ventes et les profits. Cette méthode, appelée "channel stuffing", a servi à justifier une rémunération sans commune mesure dans le secteur qui n’a pas manqué de faire réagir. Il y a aussi eu des problèmes de fiabilité sur des véhicules sortis d’usine, des tensions sur les prix de certaines marques, notamment Jeep, sans oublier un enchaînement de publications de résultats décevants. Le retournement de la conjoncture a aussi fait mal avec la remontée des taux et les effets de l’inflation. Poussé vers la sortie, Carlos Tavares a été remplacé par John Elkann, membre de la famille Agnelli, qui contrôle 16 % du groupe via la holding Exor.
Telle est donc la situation du groupe, qui doit désormais faire face – comme toute l’industrie automobile du reste – aux incertitudes liées aux droits de douane. Donald Trump a fait du secteur automobile l’une de ses premières cibles. Des tarifs douaniers de 25 % sont entrés en vigueur le 3 avril pour toutes les importations venant d’autres continents. En Bourse, le titre évolue désormais à des niveaux inférieurs à son IPO, à 7,8 €. La capitalisation est maintenant inférieure à 23 milliards d’euros.
Stellantis tente de trouver des solutions. John Elkann a demandé à McKinsey d’évaluer les options envisageables pour Maserati et Alfa Romeo. Bloomberg rapporte que les pistes envisagées incluent des partenariats avec d’autres constructeurs pour accéder aux nouvelles technologies, voire, à plus long terme, la scission de Maserati. Le dirigeant refuse toutefois toute vente à un concurrent chinois. Maserati – la marque du compartiment “luxe” de l’entreprise – a vendu 14 700 unités l’an dernier, dont un tiers aux États-Unis et au Mexique. L’ensemble a généré un peu plus de 1 milliard d’euros de revenus pour le groupe.
Le problème est d’autant plus complexe que les véhicules des deux marques – Maserati et Alfa Romeo – sont produits en Europe et doivent donc être importés, ce qui les soumet aux droits de douane.
On l’aura compris, Stellantis n’est pas en position de force. Pas du tout même. L’entreprise tente plusieurs initiatives, notamment une baisse des prix aux États-Unis pour regagner les parts de marché perdues ces derniers mois, même si cela ne suffira pas à compenser l’impact des tarifs douaniers massifs. Le groupe cherche également à combler les lacunes de ses gammes de véhicules commercialisés.
