La capitalisation boursière de Tesla est plus élevée que celle de l’ensemble des autres constructeurs réunis. Si vous suivez les marchés, vous l’avez lu des dizaines de fois et avez vu passer quantité de graphiques sur le sujet. Mais on en a désormais une nouvelle version. Car Tesla est en baisse d’environ 50% depuis son point haut mi-décembre, ce qui nous fait une destruction de capitalisation boursière d’environ 650 milliards de dollars. Ce qui est à peu près la capitalisation cumulée de l’ensemble des autres constructeurs automobiles cotés.
Mais il faut relativiser ce repli. En effet, le cours a doublé dans les semaines qui ont suivi l’élection de Donald Trump, avant d’être divisé par deux. Ce qui nous fait donc… un retour à la case départ. Quand on voit cela, on se dit en première lecture que c’est n’importe quoi. Mais si on prend l’historique boursier de Tesla, c’est la vie classique du titre. Depuis 2018, c’est la 8ème phase de baisse de 40% ou plus pour Tesla. La volatilité est la règle et non l’exception.
La volatilité est dans l’essence même de Tesla. Parce que c’est une entreprise très fortement valorisée, qui nous vend toujours le futur. Avec un patron charismatique, Elon Musk, qui sait très bien faire cela, mais qui a aussi des méthodes et une communication à la fois brutale et disruptive. Le tout dans une logique assez classique de la Silicon Valley : on avance vite, quitte à casser des trucs. Tout ceci fait que le marché place toujours énormément d’espoirs en Tesla, et est sensible à la moindre communication autour du titre. En témoigne la hausse de 7.5% mercredi, après la séquence téléshopping en direct de la Maison-Blanche.
La confiance du marché
Ce qu’il faut reconnaitre, c’est la réussite industrielle de Tesla. Il faut se souvenir qu’au départ, tout le monde disait qu’il était impossible de créer un nouveau constructeur, et de réussir dans une industrie aussi “capital intensive” que l’automobile. Sans compter les dizaines d’années d’expérience accumulées des constructeurs, les réseaux de distribution… Malgré tout cela, Tesla a réussi à passer à l’échelle et à développer un vrai outil industriel, avec aujourd’hui quatre usines (Fremont, Austin, Berlin et Shangaï).
Ce qui est fascinant, c’est que cette réussite repose en partie sur la force du narratif. Tout cela a fonctionné parce que les investisseurs ont acheté l’histoire vendue par Elon Musk, créant ainsi une sorte de cercle vertueux. Une séquence illustre parfaitement cela : fin 2020, le cours de l’action explose, et l’entreprise en profite pour réaliser, en l’espace de quelques semaines, deux augmentations de capital de 5 milliards de dollars. Et sans affecter la marche en avant du titre. Quand le marché croit en vous, il vous donne les moyens de réussir.
Miser sur le futur ?
Elon Musk a donc beaucoup capitalisé sur le soutien des investisseurs et du marché. Un soutien qu'il prend le risque de perdre en s'impliquant comme il le fait dans la vie politique. D'ores et déjà, ses prises de position poussent de nombreux clients à se détourner de Tesla. Les derniers chiffres sont parlants : les ventes de Tesla ont reculé de 45% en février en Europe.
Ce, alors même que les derniers résultats, publiés fin janvier, n’étaient déjà pas très bons. Le chiffre d’affaires stagne depuis huit trimestres. Pourtant, les ventes de voitures sont passées de 1.3 million au 4ème trimestre 2022, à 1.8 million au 4ème trimestre 2024. Pourquoi ? Parce que Tesla a dû consentir des baisses de prix pour faire face à la concurrence et à la fin de certaines aides gouvernementales. Sans oublier une gamme qui a un sérieux besoin de renouvellement.
Mais pour Tesla, ce n’est peut-être pas si important. Car les voitures électriques c’était le futur, il y a dix ans. Le futur, aujourd’hui, c’est la conduite autonome et les robots taxis, d’une part. Et d’autre part, les robots humanoïdes (Optimus), censés remplacer les humains dans les tâches répétitives ou dangereuses. Tout cela grâce à l’intelligence artificielle sur laquelle Elon Musk estime que l’avance de Tesla est considérable. La prochaine grande étape, c’est donc le lancement du Cybercab, dévoilé en octobre dernier, qui devrait être disponible d’ici 2027. Mais comme Elon Musk l’a reconnu lui-même le soir de cette présentation : "I tend to be a little optimistic with time frames". D’ici là, il faut donc s’attendre à un parcours boursier toujours erratique. Entre espoirs et déceptions.