Paris (awp/afp) - La méga-commande de 737 MAX par United Airlines constitue une marque de confiance dans l'avion à l'origine d'une crise historique pour Boeing mais le constructeur américain reste confronté à de nombreux problèmes, à commencer par le maintien de l'interdiction de l'appareil en Chine.

La compagnie américaine a annoncé mardi la plus grande commande de son histoire comprenant 200 737 MAX et 70 Airbus A321.

L'avion, de nouveau autorisé à voler depuis mi-novembre après avoir été cloué au sol 20 mois à la suite de deux accidents successifs qui ont fait 346 morts, confirme son retour en grâce: sur les cinq premiers mois de l'année, Boeing peut se targuer de 305 commandes pour son MAX, dont 100 par Southwest Airlines et 50 déjà passées par United. De son côté, Airbus n'affiche sur cette période que 68 commandes pour sa famille A320.

"Cette commande massive est un signe de confiance important pour Boeing, cela permet de rassurer le marché sur la pérennité du programme qui a pu être questionnée", explique à l'AFP Rémy Bonnery, expert aéronautique au cabinet Archery.

D'autant que 150 des avions commandés sont des MAX-10, le plus gros des avions de la famille des 737 MAX. Celui-ci a effectué son premier vol vendredi et doit encore passer le cap de la certification pour pouvoir être livré en 2023.

"C'est le type de grosse commande qui va permettre de drainer plus de petites commandes", analyse M. Bonnery.

Entre crise sanitaire et doutes sur l'appareil, Boeing avait enregistré 641 annulations de commandes en 2020 pour le MAX et disposait fin mars d'encore 400 appareils sur ses parkings. L'avionneur estime qu'il n'en terminera pas la livraison avant la fin 2022.

Face à Airbus qui domine le marché des monocouloirs, le patron de Boeing Dave Calhoun s'estime confiant dans la capacité du MAX à retrouver ses parts de marché d'avant-crise.

L'hypothèque chinoise

Mais il ne masque pas son inquiétude face à la décision chinoise de ne toujours pas autoriser le retour en vol de l'appareil. Pékin avait été le premier à le clouer au sol en mars 2019.

"Si nous ne pouvons pas faire entrer nos avions en Chine, qui représente 25 % de la croissance mondiale dans les 10 prochaines années, alors nous allons souffrir", a-t-il jugé ans un entretien à Aviation Week.

Il devient selon lui urgent que l'avion y soit à nouveau certifié. Sinon, Airbus verrait s'ouvrir un boulevard.

Boeing, qui ne produit plus que quelques MAX par mois, compte revenir à une production mensuelle de 31 appareils début 2022. Mais les prévisions de remontée en cadence sont tributaires du gargantuesque marché chinois.

Et "la Chine impacte l'Asie de façon plus large", explique Rémy Bonnery: l'interdiction du MAX dans le ciel de Chine affecte les compagnies qui utilisent l'espace aérien du pays.

Si la crise du MAX, qui a coûté jusqu'ici environ 20 milliards de dollars à Boeing, s'estompe peu à peu, le géant de Seattle reste confronté à une myriade de problèmes sur différents programmes.

Les livraisons de long-courriers 787, suspendues pendant quatre mois, sont à nouveau interrompues depuis fin mai pour des problèmes de fabrication, l'avion-ravitailleur KC46 multiplie problèmes et retards et l'agence américaine de l'aviation a prévenu qu'elle pourrait exiger davantage de vols d'essais avant de certifier le futur gros porteur 777X, qui ne pourra avoir lieu au mieux que mi-2023.

Et l'avionneur américain cherche toujours la réponse à Airbus et son A321 XLR, qui permettra d'assurer des liaisons qui jusqu'ici ne pouvaient l'être que par des gros porteurs long-courrier.

Boeing est face à un "dilemme" sur ce marché du successeur des 757 et 767 et sur lequel Airbus réussit, estime Rémy Bonnery.

Faut-il laisser ce marché à la concurrence et "attendre la prochaine génération d'avions vers 2035, ou bien lancer un programme qui permet d'exister sur ce marché mais sans réel gain par rapport à Airbus", résume-t-il.

Il faut selon lui que Boeing tranche d'ici à l'année prochaine, "après il sera trop tard, on rentrera dans le cycle du futur moyen-courrier qui devrait être annoncé vers 2025-2027".

afp/rp