New York (awp/afp) - Wall Street adore le cannabis et s'arrache les entreprises spécialisées, les investisseurs pariant massivement sur l'engouement croissant pour les effets thérapeutiques ou planants de la plante.

L'action de Tilray --une entreprise canadienne cotée à New York-- bondissait vers 15H20 GMT de 47,12% à 228 dollars. Elle avait fait mi-juillet ses débuts à Wall Street au prix de 17 dollars. Elle vaut désormais plus de 20 milliards de dollars en Bourse.

Cronos et Canopy Growth, deux sociétés canadiennes également cotées sur la place new-yorkaise, gagnaient respectivement 23,10% et 5,70%.

Tilray s'était déjà apprécié de 29% mardi après avoir reçu le feu vert des autorités américaines pour expédier aux Etats-Unis du cannabis à usage thérapeutique dans le cadre d'un essai clinique.

Son PDG, Brendan Kennedy, a suscité encore plus l'intérêt des investisseurs en affirmant mardi soir sur la chaîne d'informations financières CNBC que les vendeurs de boissons alcooliques et les laboratoires pharmaceutiques avaient tout intérêt à se protéger de l'emballement pour le cannabis.

"Si vous êtes un investisseur dans une compagnie pharmaceutique ou que vous êtes une compagnie pharmaceutique, il faut se protéger contre le risque d'une substitution par le cannabis" des médicaments anti-douleur, a-t-il affirmé.

Parallèlement, "je pense que toutes les entreprises distribuant de l'alcool doivent entrer dans le secteur", a-t-il ajouté. "C'est une opportunité au niveau mondial".

Constellation Brands, vendeur des bières Modelo et Corona, a d'ailleurs investi récemment 4 milliards de dollars dans Canopy Growth. Le brasseur Molson Coors a aussi noué un partenariat avec Hydropothecary pour des boissons infusées au cannabis.

Et le géant des sodas Coca-Cola a confirmé lundi qu'il étudait "de près" l'utilisation croissante dans le monde du CBD, un principe non-psychoactif du cannabis, comme ingrédient dans certaines boissons.

Dans cet environnement, l'objectif de Tilray, dont le chiffre d'affaires au deuxième trimestre n'était que de 9,7 millions de dollars, "est de construire une entreprise qui domine certains secteurs de cette industrie à 150 milliards de dollars", a assuré M. Kennedy.

Valorisation "ridicule"

L'industrie du cannabis "est bien évidemment un secteur que nous surveillons, la question étant de savoir à quel point il va se normaliser", a souligné Quincy Krosby, directrice de la stratégie d'investissement pour Prudential.

Les investisseurs professionnels ont notamment été refroidis selon elle par un article de Politico diffusé la semaine dernière évoquant la possibilité que les personnes misant de l'argent sur l'industrie de la marijuana puissent avoir des difficultés à entrer aux Etats-Unis.

Dans ce pays, la loi fédérale interdit la culture, la vente et l'utilisation de la marijuana. Mais 29 Etats autorisent son usage médical et quelques-uns autorisent la consommation récréative.

Et le Canada deviendra le 17 octobre le deuxième pays au monde à légaliser le cannabis récréatif, cinq ans après l'Uruguay.

Sans forcément investir directement dans les entreprises produisant la plante, la légalisation progressive du cannabis va avoir des effets sur les performances d'autre secteurs plus traditionnels comme les cigarettes ou certaines entreprises de l'agro-alimentaire, a remarqué Mme Krosby.

Certains acteurs du marché restent cependant sceptiques face à l'envolée du secteur à Wall Street.

La société Citron Research, connue pour parier régulièrement sur la déroute de certaines entreprises, en a fait sa dernière cible.

Tout en reconnaissant le potentiel du marché, notamment aux Etats-Unis, Citron estime que l'envol des sociétés liées au cannabis à la Bourse de New York, alimenté par les investisseurs particuliers, a créé une bulle à l'origine d'une valorisation "ridicule" pour Tilray.

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