Coca-Cola a fait savoir qu'il renonçait par conséquent à son offre. "Nous sommes déçus mais nous respecterons la décision du MCO" (ministère chinois du Commerce), a déclaré Muhtar Kent, président et directeur général de Coca-Cola.

Aux yeux de nombreux observateurs, le dossier avait valeur de test car il était le premier à être examiné à l'aune d'un nouveau de droit de la concurrence.

Jusqu'à la semaine dernière pourtant, dirigeants et avocats avaient bon espoir que l'OPA reçoive le feu vert de Pékin tout en s'attendant à ce qu'il soit assorti de conditions, confortés par la décision de Coca-Cola d'investir deux milliards supplémentaires en Chine.

L'arbitrage de mercredi fait craindre à certains que Pékin ne tienne pas seulement compte dans ses décisions des règles de concurrence mais utilise également des dispositions lui permettant de mettre en avant le développement économique du pays et la protection de marques connues.

"Cela montre tout simplement que la Chine n'est toujours pas disposée à permettre le rachat d'une marque nationale", commente Jeffery Lau, analyste à Polaris Capital.

"Mais ce n'est pas vraiment une grosse surprise pour le marché, le protectionnisme a progressé partout cette année. Cela explique aussi pourquoi le titre cotait à un prix environ 20% inférieur au prix de rachat", ajoute-t-il.

Pour Lester Ross, du cabinet juridique WilmerHale à Pékin, "cela montre que le ministère du Commerce va examiner de manière très sourcilleuse les acquisitions étrangères de marques chinoises de premier plan, même si l'acquéreur étranger est peu ou pas présent sur ce segment du marché".

MAUVAIS EXEMPLE

Le ministère chinois du Commerce a expliqué que l'opération aurait nui à la concurrence et affirmé que les changements apportés par Coca-Cola aux conditions de l'offre n'avaient pas permis de dissiper les inquiétudes.

La cotation de Huiyuan a été suspendue après avoir chuté de 23% à la suite de la parution d'un article du Financial Times rapportant que Coca-Cola pourrait renoncer. Selon le FT, les autorités de régulation de la concurrence de Pékin auraient prévenu le groupe américain qu'il devrait abandonner la marque chinoise si l'OPA devait aboutir.

L'année dernière, après trois ans de discussions, le fonds américain de capital-risque Carlyle Group avait renoncé à son projet de racheter Xugong, le plus gros fabricant chinois de matériel de construction, après avoir buté sur des obstacles administratifs.

Le nouveau veto de Pékin pourrait faire hésiter des étrangers à se lancer dans une offre de rachat, même lorsqu'elle est amicale et à bon prix comme celle de Coca-Cola.

"C'est vraiment un mauvais exemple", commente Michael Gu, conseiller juridique à Allen & Overy à Pékin, selon lequel le rachat de Huiyuan Juice par Coca-Cola aurait eu peu d'impact sur la concurrence. "Cela va avoir un impact négatif sur les investissements étrangers", ajoute-t-il.

Michael Wei, Donny Kwok, Fion Li et Helen Chernikoff, version française Grégory Blachier et Gwénaëlle Barzic