Valeur fétiche des actionnaires individuels qui en détiennent 34% du capital, Thermador est une de ces PME cotées à fort rendement que l’on garde en fond de portefeuille ou que l’on acquiert sans trembler au son du canon. Un son que le Covid-19 pourrait faire entendre sachant que 37% des achats du Groupe sont réalisés en Chine et 34% en Italie.

Guillaume Robin, commençons par un petit mot sur Guy Vincent, fondateur de l’entreprise il y a 50 ans, qui vient de quitter le Conseil d’Administration. Quelle culture d’entreprise a-t-il entretenu chez Thermador ?

"Dès la création, Guy Vincent a positionné Thermador entre les industriels et les grossistes en tant que distributeur d’accessoires pour le monde du chauffage en adoptant une politique commerciale simple et en faisant preuve de transparence avec toutes les parties prenantes de l’entreprise. Transparence, mais aussi respect et exemplarité sont des valeurs fondatrices que nous cultivons au quotidien à travers les nombreuses filiales du Groupe. Quelques chiffres illustrent cette culture d’entreprise : une ancienneté moyenne de 9 ans, un maximum de 4% de taux d’absentéisme sur les 3 dernières années, et 86% de nos salariés formés en 2019. De plus, afin de renforcer l’engagement de nos collaborateurs sur le long terme, nous allons courant mars réaliser une augmentation de 1% du capital qui leur sera réservée. Ils profiteront ainsi d’une décote de 40% sur le cours moyen des vingt derniers jours avant l’opération et seront tenus de conserver les actions pendant 10 ans. Ainsi, les salariés et anciens-salariés du Groupe approcheront l’objectif de détention de 10% du Groupe que nous nous sommes fixés."

source : Thermador

Quel regard portez-vous sur l’exercice 2019 qui vient de s’écouler ?

"Nous sommes très satisfaits de cet exercice qui a vu notre activité progresser de 18,5% à 368,8 M€ et notre résultat net part du groupe de 11,1% à 32,4 M€ malgré quelques éléments non récurrents liés à l’acquisition des Ets Edouard Rousseau le 31/12/18 et à un taux de change euro/dollar moins favorable. Notre croissance organique, normative au premier semestre autour de 5%, s’est fortement accélérée en fin d’année pour finir à 13,1% au quatrième trimestre, portée par le boom des installations de pompes à chaleur en France."

 La refonte des aides à la transition énergétique en France, entrée en vigueur au 1er janvier, et la baisse des mises en chantiers de logement vont-elles pénaliser 2020 ?

"Il est clair que le CITE de 30% sans conditions de revenus en 2019 a donné un coup de fouet aux travaux de remplacement de chaudières en France où nous réalisons 81% de notre activité. L’orientation des aides vers les ménages plus modestes sera forcément moins favorable à nos filiales exposées à cette activité (Thermador et Isocel : 14,6% du CA 2019 n.d.l.r.) mais il est encore trop tôt pour mesurer l’impact de cette évolution fiscale. Quant à la baisse des mises en chantier, rappelons que 44 % de notre CA est réalisé avec des matériels destinés au secteur du bâtiment parmi lesquels seuls 20 % sont installés dans des logements neufs, les 80 % restants correspondent au marché de l’entretien et de la rénovation."

 La société a enchaîné les croissances externes depuis 2015. Allez-vous faire une pause dans les prochaines années et privilégier le retour à l’actionnaire ?

"Nous allons consacrer les deux prochaines années à l’intégration des dernières acquisitions. De nombreux chantiers sont à mener en termes d’organisation, de logistique, de système d’information. Nous pourrons alors saisir de nouvelles opportunités de croissance externe, notamment à l’international. Notre objectif pour la décennie qui commence est de poursuivre notre croissance à un rythme similaire à celui qui fut le nôtre durant les dix dernières années. Cela passera par une forte autonomie accordée aux filiales pour fixer leur propre stratégie et leurs propres objectifs, y compris pour les filiales qui viennent de rejoindre le groupe. L’international a vocation à progresser à partir de nos implantations physiques françaises et étrangères en utilisant les leviers classiques de la croissance organique. Enfin, la création de filiale restera possible dans une activité proche de notre univers, pour autant que nous trouvions les femmes ou les hommes pour mener le projet et les partenaires industriels pour constituer l’offre de base. Le retour à l’actionnaire passe autant par le dividende que par l’évolution du cours de Bourse. La société n’a pas réduit son dividende depuis 1987, année de son introduction en Bourse, et compte pérenniser sa politique de dividende."

 Les marges commerciales et opérationnelles de Thermador, de respectivement 36,4% et 12,8%, sont très élevées pour un distributeur. Ne sont-elles pas menacées par les géants du web ?

"Les concurrents de chacune de nos filiales commerciales sont des importateurs ou des filiales commerciales de fabricants.  Certains de ces  concurrents sont  communs  à  plusieurs  de  nos  filiales, mais aucun n’intervient sur l’intégralité de nos plans de vente. Parmi les plus  connus  figurent  Watts  Industry  ou  Aalberts  qui  font  à  la  fois  le  métier  d’industriel  et  celui  de  s’adresser  aux  grossistes  français  et  Eriks  Econosto à l’international. La grande diversité et le nombre très important de concurrents qui n’interviennent que sur une part infime de nos produits réduit notre risque. Les pure-players du web sont potentiellement des concurrents de nos clients. Certains de nos produits sont présents  sur leurs  plateformes  (Leroy  Merlin,  Amazon,  Cdiscount,  ManoMano...).  À nous d’agir et de monter en compétence pour maîtriser et utiliser le canal digital avec discernement et intelligence. Notamment en surveillant de près les prix de vente pratiqués. Par ailleurs, beaucoup de nos produits représentent des niches qui se vendent grâce à l’expertise technique de nos commerciaux et à notre service après-vente. Les géants du web n’ont pas ce type de compétences et de savoir-faire."

Plus de 70% des achats en provenance de Chine et d’Italie - Source : Thermador

 

Comment préparez-vous Thermador à une perturbation durable liée au Covid-19 ?

"A ce jour, nos ruptures de stocks sont rares et plutôt liées aux grèves dans les ports français qu’au virus en Chine. Nous avons sur les gammes les plus sensibles, à savoir la robinetterie industrielle pour laquelle certains produits sont quasi exclusivement fabriqués en Chine, plus de six mois de stocks. En cas de crise sanitaire qui perturberait la production chinoise pendant encore plusieurs mois, nous pensons être mieux positionnés que nos concurrents dans la mesure où nos stocks sont plus importants et où nous entretenons avec nos partenaires chinois des relations privilégiées. Il est encore trop tôt pour faire quelconque chiffrage d’impact de cette crise ; nous ferons un point à la fin du premier semestre."

source : Thermador