Tout diminue chez Total Gabon — la production, les réserves prouvées et le chiffre d’affaires, tous divisés par quatre en dix ans — sauf les profits et la qualité des équipes de direction. 

L’exercice 2022 fut exceptionnel à tous les égards grâce à un cours du Brent à trois chiffres et un faible différentiel du Mandji. Le profit cash, qui ressort à $125 millions, sera quasi intégralement distribué en dividendes.

Autre bonne nouvelle, quoique purement conjoncturelle : Total Gabon facture en dollars américains mais distribue ses dividendes en euros ; le taux de change du moment, proche de la parité, est ainsi très favorable aux actionnaires européens. 

Cette politique du dividende s’inscrit elle aussi dans la tendance longue. Ayant eu maille à partir avec la rapacité de l’Etat gabonais et son incessant chantage fiscal, le groupe a procédé à de spectaculaires distributions de dividendes spéciaux ces deux dernières années.

Méfiance, à ce titre, avec une position financière sans doute plus précaire qu’il n’y paraît. Il n’y a certes aucune dette au bilan, mais la pléthorique trésorerie en excédent reste à risque. 

Ceci rend la valorisation particulièrement ardue. Faut-il oui ou non considérer la trésorerie en excédent comme appartenant bel et bien aux actionnaires ? Si l’on estime que non, la capitalisation boursière du moment représente un multiple de six fois le profit cash réalisé en 2022.

Alléchant sur le papier, mais on trouve au Canada quantité de producteurs valorisés de la même manière, pour leur part situés dans la jurisdiction la plus sûre du monde, avec des réserves prouvées en expansion continue. Difficile, à ce titre, de justifier d’aventureux placements au Gabon.

Malgré la mise en production du site de Baudroie-Mérou, et la licence de vingt-cinq ans qui l’accompagne, il est aussi permis de s’interroger sur le futur du groupe dans un contexte géopolitique marqué par une dramatique perte d’influence de la France en Afrique en général, et autour du Golfe de Guinée en particulier.