Zaporijjia à l'arrêt

ajoute mise en garde de Poutine sur Zaporijjia, déclarations de Macron, cartes russes montrant l'ampleur du retrait, communiqué de l'état-major de l'armée ukrainienne, conseiller de Zelensky sur d'éventuelles négociations, gouverneur de la région de Kharkiv

KHARKIV (awp/afp) - L'Ukraine a revendiqué dimanche de nouveaux succès militaires contre les Russes dans l'est et le sud de son territoire, Moscou reconnaissant avoir perdu du terrain, tandis que la situation à la centrale nucléaire de Zaporijjia, où tous les réacteurs sont désormais à l'arrêt, demeure préoccupante.

Le président russe Vladimir Poutine a mis en garde contre les "conséquences catastrophiques" que pourraient avoir les "attaques régulières ukrainiennes" sur ce complexe de six réacteurs, "y compris le dépôt des déchets radioactifs", dans un entretien téléphonique avec son homologue français.

Emmanuel Macron lui a rétorqué que "l'occupation russe" était "la cause des risques" pesant sur cette centrale du sud de l'Ukraine, la plus grande d'Europe, et lui a demandé d'en retirer toutes les armes.

L'opérateur ukrainien Energoatom a de son côté annoncé avoir mis à l'arrêt avant l'aube le dernier réacteur qui y restait en activité, produisant l'électricité nécessaire au refroidissement du combustible nucléaire et à la sécurité du site.

Cette décision a été prise après le rétablissement, samedi soir, de l'approvisionnementélectrique extérieur de la centrale.

Concernant la contre-offensive en cours dans le nord-est de l'Ukraine, "depuis début septembre, plus de 3.000 km2 sont revenus sous contrôle ukrainien", a déclaré dans un communiqué le général Valeri Zaloujny, le commandant en chef de l'armée ukrainienne, au 200e jour du conflit.

"Nous sommes à 50 kilomètres de la frontière" russe, a-t-il ajouté.

Le 2 juin, le président ukrainien Volodymyr Zelensky avait reconnu que 20% de la superficie totale de son pays, soit environ 125.000 km2, était aux mains des Russes, dont plus de 43.000 km2 (la Crimée et une partie du bassin du Donbass) conquis avant le déclenchement de l'invasion, le 24 février.

Retrait russe d'ampleur

Au début du mois, l'armée ukrainienne a d'abord annoncé une contre-offensive dans le sud, avant de réaliser au cours de la semaine écoulée une percée surprise et éclair dans les lignes russes dans la région de Kharkiv.

La carte de cette zone du nord-est, présentée par le ministère russe de la Défense au cours de son briefing quotidien, a montré un retrait d'ampleur des soldats russes, qui n'en contrôlaient plus dimanche qu'une petite partie, derrière la rivière Oskol.

Samedi, l'armée russe a annoncé avoir "retiré" ses forces présentes dans les zones de Balakliïa et d'Izioum afin de les "regrouper" près de Donetsk, l'une des capitales des séparatistes prorusses, plus au sud.

Viatcheslav Gladkov, le gouverneur de la province russe de Belgorod, frontalière de l'Ukraine, a pour sa part assuré que "des milliers de personnes" avaient fui la région de Kharkiv pour la Russie.

Un peu plus tôt, l'état-major des forces ukrainiennes avait annoncé que "la libération de portions de territoires dans les districts de Koupiansk et d'Izioum", dans cette même région, était "en cours".

"Résultat du succès de la contre-offensive de nos troupes dans la région de Kharkiv, les troupes russes abandonnent rapidement leurs positions et s'enfuient", notamment "vers la Russie", a-t-il ensuite assuré dans la soirée.

"Une grande partie des districts de Tchougouïv, Koupiansk et de Balakliïa a été libérée. Aujourd'hui, nous pouvons affirmer qu'une quarantaine de localités ont déjà été libérées, mais il y en a bien plus (...)", a renchéri le gouverneur de Kharkiv, Oleg Sinegoubov.

La veille, Kiev avait annoncé que ses forces étaient entrées dans Koupiansk, qui se trouve sur des itinéraires d'approvisionnement des troupes russes.

Dans le sud, dans la région de Kherson, "les occupants se sont également retirés de leurs positions dans plusieurs localités", a également assuré dimanche l'armée ukrainienne.

Selon l'Institut pour l'étude de la guerre (ISW), qui a son siège à Washington, les unités ukrainiennes ont avancé par endroits sur une profondeur "de 70 km" et ont repris en cinq jours "plus de territoires que les Russes n'en ont conquis dans toutes leurs opérations depuis avril".

"C'était terrifiant"

Dans un message vidéo, M. Zelensky s'est réjoui que "le magnifique drapeau ukrainien (flotte de nouveau) sur Tchkalovske", dans la région de Kharkiv.

"Il en sera de même partout. Nous chasserons les occupants de chaque ville et de chaque village d'Ukraine", a-t-il promis.

Dans des zones reconquises, des journalistes de l'AFP ont vu samedi des camions et des blindés russes carbonisés, dont certains encore frappés de la lettre Z, le symbole de l'invasion de l'Ukraine.

Des soldats ukrainiens patrouillaient dans Balakliïa, où flottait le drapeau ukrainien, hissé en présence du commandant des forces terrestres ukrainiennes, Oleksandre Syrski.

Dans le village de Grakové, tout juste repris par les forces ukrainiennes, les journalistes de l'AFP ont constaté des destructions témoignant de la violence de combats, pylônes électriques abattus et câbles étalés sur le sol.

Iryna Stepanenko, 52 ans, a profité de pouvoir sortir à bicyclette pour la première fois après s'être terrée dans sa cave pendant trois mois.

"C'était terrifiant", a-t-elle raconté à propos de cette vie souterraine dans le bruit des explosions. Soulagée du retour des militaires ukrainiens, elle a néanmoins dit avoir des craintes pour la suite

Le chef de la diplomatie ukrainienne, Dmitro Kouleba, a quant à lui appelé à la poursuite des livraisons d'armes, principalement occidentales.

"Seule l'Ukraine détermine l'ordre du jour des négociations" de paix", a parallèlement martelé un conseiller de la présidence ukrainienne, Mikhaïlo Podoliak : celui-ci "est connu : 1. Libération de tous les territoires 2. Paiement de réparations par les Russes 3. Punition des criminels de guerre", a-t-il expliqué, concluant qu'"il n'y a pas d'autres arrangements ou pressions".

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