LONDRES, 12 août (Reuters) - Les marchés financiers dans le monde traversent actuellement une passe difficile dans un contexte de craintes d'une récession aux Etats-Unis et d'envolée soudaine du yen.

Les chiffres de l'inflation américaine, les dernières données économiques japonaises et une série d'indicateurs sur la Grande-Bretagne pourraient dans les prochains jours changer la donne ou amplifier la volatilité.

Tour d'horizon des perspectives des marchés des jours à venir:

1/ UN ÉTÉ LOIN D'ÊTRE CALME

Le climat de nervosité qui a saisi récemment les marchés est la preuve pour les investisseurs qui en doutaient encore qu'il n'y a pas d'été "calme".

Il y a un an, les rendements des bons du Trésor ont fortement augmenté en raison des inquiétudes sur les perspectives budgétaires des Etats-Unis. L'été précédent, les craintes d'inflation et de hausse des taux d'intérêt avaient secoué les marchés.

Le lundi 5 août, pour sa part, a été marqué par un effondrement des Bourses mondiales, surtout au Japon où le Nikkei a enregistré sa plus forte baisse en pourcentage depuis le krach du "lundi noir" de 1987.

Parallèlement, l'indice VIX de la volatilité à Wall Street, l'indicateur le plus surveillé de l'anxiété des investisseurs, a connu sa plus forte hausse intrajournalière.

De tels bouleversements donnent à penser que les jours à venir seront encore teintés de nervosité, malgré des signes d'apaisement sur les marchés.

Le principal élément à surveiller est le débouclage des opérations de portage sur le yen, considéré comme l'une des causes de la déroute récente des marchés.

Il faudra également vérifier si les données macroéconomiques qui seront publiées prochainement justifient les anticipations de baisse importante des taux d'intérêt aux Etats-Unis.

Les inquiétudes sur une aggravation du conflit au Moyen-Orient et l'approche de l'élection présidentielle américaine pourraient également favoriser la volatilité sur les marchés durant cette période estivale.

2/ L'INFLATION US ATTENDUE AU TOURNANT

Les investisseurs attendent désormais avec impatience les données sur les prix à la consommation aux Etats-Unis qui seront publiées mercredi, afin de déterminer l'impact de l'inflation sur la première économie mondiale alors que l'ISM manufacturier et le rapport mensuel officiel sur l'emploi ont fait craindre un déraillement de la croissance.

La thèse d'un atterrissage en douceur de l'économie a été ébranlée par les dernières données peu encourageantes, ouvrant la voie à une possible récession.

Certains analystes estiment toutefois que cette crainte est exagérée.

Les économistes interrogés par Reuters s'attendent à ce que l'indice global des prix à la consommation et celui dit de base aux Etats-Unis augmentent de 0,2% en juillet par rapport au mois précédent.

Un chiffre n'indiquant qu'un léger ralentissement de l'inflation pourrait tempérer les craintes selon lesquelles la politique trop restrictive de la Réserve fédérale américaine (Fed) a précipité l'économie dans une spirale infernale. Des données plus faibles pourraient en revanche renforcer les craintes d'une récession et provoquer une nouvelle volatilité sur les marchés.

3/ LE DÉSENCHANTEMENT JAPONAIS

Le Japon publiera jeudi les chiffres préliminaires de la croissance économique du deuxième trimestre alors que certains analystes ont critiqué la récente hausse des taux de la Banque du Japon (BoJ), perçue comme un faux pas politique à l'origine de la chute brutale des marchés actions.

Même si un lien de cause à effet n'est pas simple à démontrer, la hausse des taux de la BoJ a entraîné un affermissement brutal du yen, renchérissant les coûts de financement alors que les investisseurs profitaient jusqu'ici de la faiblesse de la devise japonaise pour acheter des actifs en dollars aux rendements plus élevés.

Si les données de jeudi indiquent des perspectives plus favorables, les responsables japonais de la politique monétaire pourront enfin pousser un soupir de soulagement. Si elles ne sont pas en revanche à la hauteur, ils devront trouver d'autres explications pour justifier la hausse des taux décidée en juillet.

En Asie-Pacifique, la semaine sera aussi marquée par une décision politique monétaire en Nouvelle-Zélande, attendue mercredi, ainsi qu'une série de données en provenance de Chine.

4/ UN ÉQUILIBRE DÉLICAT POUR LA BOE

La Banque d'Angleterre (BoE), qui a lancé le mois dernier son cycle d'assouplissement monétaire en abaissant son principal taux directeur de 25 points de base à 5%, dans une décision jugée équilibrée, prendra connaissance d'une nouvelle série de données susceptibles de déterminer son orientation dans les prochains mois.

L'inflation des prix à la consommation, en particulier dans le secteur des services, où l'activité a accéléré en juillet, ainsi que les chiffres du produit intérieur brut (PIB) du deuxième trimestre et les ventes mensuelles au détail, figurent parmi ces données.

Les marchés tablent actuellement sur une baisse des taux de la BoE d'un point de pourcentage au cours des neuf prochains mois.

Mais compte tenu de la proximité de la décision de juillet, les actifs britanniques sont susceptibles d'être très sensibles à tout signe indiquant que la BoE pourrait s'écarter de la trajectoire prévue sur les taux. La livre sterling semble fragile et les actions britanniques n'ont connu que des sorties hebdomadaires depuis quatre mois d'affilée, selon les données de LSEG/Lipper.

5/ LUEUR D'ESPOIR POUR LES ACTIONS EUROPÉENNES

Les actions européennes, en baisse d'environ 5% depuis le début du mois, pourraient bénéficier d'une lueur d'espoir avec la suite de la publication des résultats des entreprises.

Selon les données LSEG I/B/E/S, les bénéfices du deuxième trimestre des entreprises devraient avoir augmenté de 3,8% par rapport à la même période de l'an dernier, soit la première hausse trimestrielle depuis le premier trimestre 2021. Près de 56% des entreprises ont publié des résultats supérieurs aux estimations des analystes.

UBS, la plus grande banque suisse, publiera ses résultats mercredi, tandis que la semaine sera importante pour le secteur de l'assurance, avec Hannover Re, Aviva, NN Group et Admiral qui fourniront leurs comptes financiers.

Dans l'ensemble, la saison des résultats du deuxième trimestre montre des signes de ralentissement en matière de consommation, mais la forte croissance des secteurs de la finance, de l'énergie et des services aux collectivités a permis de compenser la faiblesse des autres secteurs.

(Rédigé par Ira Iosebashvili à New York, Rae Wee à Singapour et Dhara Ranasinghe, Samuel Indyk et Amanda Cooper à Londres, infographies de Prinz Magtulis, Pasit Kongkunakornul, Kripa Jayaram et Sumanta Sen; compilé par Dhara Ranasinghe; version française Claude Chendjou, édité par Blandine Hénault)