Milan (awp/afp) - Le troisième groupe bancaire italien Banco BPM, dont le principal actionnaire est Crédit Agricole, a opposé jeudi formellement une fin de non-recevoir à l'offre publique d'échange (OPE) lancée à son encontre par sa rivale UniCredit, la jugeant "totalement insuffisante".

Le prix offert "est totalement insatisfaisant pour les actionnaires de BPM, ne reconnaît pas la valeur réelle" de ses actions et "pénalise les actionnaires de BPM" par rapport à ceux d'UniCredit, a estimé la banque à l'issue d'une réunion de son conseil d'administration.

UniCredit avait proposé fin novembre 0,175 de son action ordinaire pour chaque action Banco BPM, valorisant à l'époque sa concurrente à 10,1 milliards d'euros, et n'a pas relevé le montant de son offre depuis.

Aux cours de Bourse actuels, l'offre s'élève à environ 13,6 milliards d'euros, un montant inférieur à la capitalisation boursière de BPM qui s'élève à 14,4 milliards d'euros, selon une source financière.

Banco BPM, issue en 2017 de la fusion entre Banco Popolare et Banca popolare di Milano, avait d'emblée jugé hostile l'offre d'UniCredit, dans un premier avis informel publié au lendemain de l'offre.

"Nous sommes arrivés à la conclusion unanime que l'offre n'est pas dans l'intérêt de nos actionnaires", a tranché jeudi le président de Banco BPM, Massimo Tononi, lors d'une conférence avec des analystes.

Selon les administrateurs de Banco BPM, un regroupement avec UniCredit "serait soumis à des risques et des éléments d'incertitude" en raison des "différents modèles d'affaires" adoptés par les deux banques.

Après avoir reçu le feu vert de l'autorité boursière italienne (Consob) et de la Banque centrale européenne (BCE), UniCredit avait fixé au 28 avril le début de l'offre qui devrait courir jusqu'au 23 juin.

Recours au "golden power" ___

Depuis, UniCredit a cependant subi un sérieux revers avec la décision du gouvernement dirigé par Giorgia Meloni d'avoir recours au "golden power", qui lui confère des pouvoirs spéciaux dans des secteurs considérés comme stratégiques pour le pays.

A l'issue d'un conseil des ministres, Rome a posé vendredi plusieurs conditions à l'offre d'UniCredit, dont le retrait total de la Russie d'ici neuf mois et l'obligation de ne pas réduire pendant cinq ans le nombre de prêts accordés à des entreprises et ménages en Italie.

En outre, le groupe de gestion d'actifs Anima, désormais contrôlé à près de 90% par Banco BPM et qui passerait le cas échéant dans le giron d'UniCredit, est tenu de maintenir ses investissements dans les obligations de l'Etat italiennes pendant cinq ans.

"Les prescriptions imposées à UniCredit pourraient nuire à sa pleine liberté et capacité de prendre des décisions saines et prudentes à l'avenir", avait protesté la deuxième banque italienne mardi.

En outre, ces conditions "pourraient ne pas être totalement alignées sur la législation italienne et européenne et les décisions des autorités de régulation", a-t-elle prévenu.

Le gouvernement Meloni avait fraîchement accueilli l'offre d'UniCredit en novembre car elle était venue contrecarrer son projet de créer un troisième pôle bancaire en Italie formé par Banco BPM et Monte dei Paschi di Siena (MPS).

Crédit Agricole, qui détient désormais une part de 19,8% de Banco BPM, avait assuré début avril être "investisseur de long terme" de la banque, sans avoir l'intention de lancer une offre publique sur son capital.

afp/rp