Paris (awp/afp) - Les banques européennes, espagnoles et italiennes en tête affichent des résultats en progression au troisième trimestre. Mais des caisses remplies suffiront-elles pour permettre à certaines d'avaler leurs concurrentes?

Les discussions en cours sur les fusions entre établissements en Europe peinent en effet à se concrétiser.

Le troisième trimestre est "positif" pour les banques européennes, a souligné auprès de l'AFP Matthieu Prieuret, consultant chez Eurogroup Consulting.

La santé des géants bancaires d'Europe du Sud est toujours éclatante, au-delà des attentes des analystes. Ces banques sont avantagées par une meilleure maîtrise des coûts et un marché domestique qui permet une revalorisation plus rapide de leurs stocks de prêts immobiliers, souvent accordés à taux variables.

L'espagnol Banco Santander se paye par exemple le luxe de passer devant BNP Paribas en termes de bénéfice net entre juillet et septembre: 3,25 milliards d'euros (+12%) contre 2,8 milliards d'euros (+5,9%) pour le Français.

Son compatriote BBVA a dégagé 2,63 milliards d'euros de bénéfice net sur la période, une progression de 26% sur un an.

En Italie, le bénéfice net d'Intesa Sanpaolo a augmenté de 26% à 2,4 milliards d'euros quand celui d'Unicredit a grimpé de 8,2%, à 2,5 milliards d'euros.

Appétits

Si cette bonne santé des banques du sud de l'Europe, en dépit de la baisse des taux amorcée par la Banque centrale européenne (BCE), remplit leurs coffres, elle aiguise aussi leurs appétits.

UniCredit a ainsi fait une entrée significative au capital de l'allemande Commerzbank en septembre, possédant jusqu'à 21% des titres sous réserve des autorisations requises, et son patron Andrea Orcel a, encore mercredi, redit son intérêt pour la banque de Francfort, en laissant toutes les options ouvertes mais en s'accordant toutefois un an pour prendre sa décision.

Commerzbank, qui a publié mercredi un bénéfice net en recul de 6%, à 642 millions d'euros, néanmoins supérieur aux prévisions des analystes, ne fait pas mystère pour sa part de sa volonté de rester indépendante.

Au sein de la BCE, les avis semblent diverger sur la question des fusions bancaires. La présidente de l'institution Christine Lagarde juge "souhaitables" les fusions transfrontalières en Europe, mais la cheffe du conseil de surveillance Claudia Buch est plus mesurée.

"L'histoire montre" que les "avantages ou synergies" espérés dans une fusion "ne se matérialisent pas toujours et qu'il existe des risques, liés par exemple à des systèmes informatiques ou à une complexité de gestion supplémentaires", explique-t-elle dans un entretien donné lundi à quatre quotidiens européens.

Outre le dossier Unicredit-Commerzbank, en Espagne, l'issue de l'offre publique d'achat (OPA) hostile de BBVA sur sa concurrente Sabadell, initiée en mai, reste aussi incertaine.

La banque originaire du Pays Basque attend toujours l'autorisation du gendarme boursier espagnol ainsi que celles des autorités de la concurrence des pays où les deux banques ont des activités, dont l'Espagne.

La fusion de deux acteurs du même pays peut pourtant se voir positivement dans les comptes: UBS, qui a absorbé Credit Suisse, a ainsi publié un bénéfice de 1,4 milliard de dollars au troisième trimestre, très largement supérieur aux attentes.

A la même période un an plus tôt, UBS avait essuyé une perte de 715 millions de dollars en raison des frais de cette intégration en catastrophe quelques mois plus tôt.

Débat fiscal

Les profits records des banques européennes ces dernières années ont poussé plusieurs gouvernements européens à les faire contribuer davantage aux finances publiques.

En Espagne, le débat fait rage sur l'avenir d'un impôt exceptionnel sur les grands groupes énergétiques et bancaires, initialement instauré pour deux ans, mais que le gouvernement souhaite pérenniser au-delà de 2024.

En Italie, le gouvernement de Giorgia Meloni a fait appel aux banques pour financer le projet de budget 2025: elles contribueront pour environ 2,5 milliards d'euros, en acceptant de reporter des crédits d'impôt prévus en 2025, afin de fournir des liquidités à l'Etat italien - qui devrait les rembourser ultérieurement.

La France va-t-elle suivre?

"C'est quand même une priorité collective pour nous (...) de contribuer un peu plus pour participer (au) redressement" des finances publiques, a estimé mercredi le directeur général du Crédit Agricole Philippe Brassac, en écho aux discussions sur le sujet dans le budget de l'Etat l'an prochain.

afp/al