PARIS (Reuters) - La prudence des objectifs 2022 de Valeo est sanctionnée en Bourse vendredi, éclipsant l'annonce par l'équipementier automobile d'une amélioration de sa performance au cours des trois années suivantes en surfant sur la vague de l'électrification des voitures.

Vers 14h00, l'action du spécialiste des systèmes d'hybridation et d'aide à la conduite, dégringole de 11%.

"Les investisseurs restent concentrés sur la performance actuelle sans relief de Valeo et sur les risques macroéconomiques", commente Evercore ISI dans une note. "Ils resteront sur le bas-côté tant que Valeo et son nouveau directeur général n'auront pas renoué avec des résultats supérieurs aux attentes et des relèvements de prévisions."

Le groupe français, qui dit s'attendre à une année 2022 "difficile", vise une marge d'Ebitda comprise entre 11,8% et 12,3%, en baisse par rapport aux 13,4% de 2021, reflet du contexte inflationniste et du coût de l'intégration des moteurs électriques issus de l'ex-JV avec Siemens.

Il table aussi sur un free cash flow d'environ 320 millions d'euros, supérieur au niveau moyen de 290 millions affiché en 2020 et 2021, mais très inférieur aux 519 millions de 2019.

"Ces objectifs ne prennent pas en compte les conséquences potentiellement défavorables sur l'environnement économique et financier des récents développement de la crise russo-ukrainienne, par exemple une baisse des volumes de production ou une hausse des prix de l'énergie ou des matières premières au-delà des prix connus début 2022", a souligné Valeo dans un communiqué.

Sous la houlette de Christophe Périllat, qui vient de succéder à la direction générale à Jacques Aschenbroich, incarnation du visage de Valeo pendant 13 ans, le groupe a également présenté son nouveau plan stratégique moyen terme "Move up".

Il en attend plus de dix milliards d'euros de chiffre d'affaires annuel additionnel à l'horizon 2025, pour atteindre 27,5 milliards d'euros, et estime que ses ventes pourraient même dépasser 40 milliards d'euros en 2030.

L'équipementier vise aussi pour 2025 une marge d'Ebitda d'environ 14,5% et une forte remontée de son free cash flow à un niveau compris entre 800 millions et un milliard d'euros.

"Nous sommes au début d'une période de transformation de la mobilité qui se traduira par une hyper-croissance des marchés de l'électrification et de l'Adas pendant 15 à 20 ans", a déclaré Christophe Périllat au cours d'une conférence de presse.

FAIBLE EXPOSITION A LA RUSSIE

Dans le cadre de sa mutation vers les métiers de l'électrique, qui verront l'exposition du groupe à des produits équipant les véhicules thermiques chuter à 4% de ses ventes en 2030 contre 11% aujourd'hui, Valeo prévoit également 500 millions d'euros de cessions d'actifs non stratégiques sur la durée du plan.

Pour contrer le risque inflationniste, il envisage aussi 100 millions d'euros d'économies annuelles supplémentaires d'ici 2023.

Le groupe, qui a renoué avec un bénéfice net, part du groupe, de 175 millions d'euros l'an dernier, a confirmé par ailleurs ses résultats préliminaires publiés fin janvier, notamment une marge d'Ebitda dans le haut de sa fourchette de prévisions mais aussi un free cash flow inférieur aux attentes en raison d'un fort gonflement des stocks - affiné à 460 millions d'euros - pour faire face aux pénuries de puces.

Valeo a présenté sa feuille de route aux analystes financiers et aux journalistes lors d'un évènement sur lequel a plané l'ombre de la guerre en Ukraine.

Valeo réalise moins de 1% de ses ventes en Russie, mais Christophe Périllat, qui a adressé un message de sympathie au peuple ukrainien, a confié avoir hésité à maintenir l'évènement dans le contexte actuel.

"J'ai décidé que nous devrions avoir cette réunion, pas seulement parce que le business continue, mais parce que la vision long terme de Valeo ne change pas et ne changera pas à cause de cette crise", a-t-il ajouté.

(Gilles Guillaume, édité par Matthieu Protard et Jean-Michel Bélot)