Détenu à hauteur de 28% du capital par le brésilien BWSA (Brasil Warrant Administração de Bens e Empresas S.A), le groupe ne compte pas d'autres actionnaires de référence, sinon Bpifrance avec 7.5% du capital et les salariés du groupe avec 3.5%. Saint-Gobain s'est complètement désengagé du capital, alors qu'initialement les premiers plans de séparation prévoyaient que le groupe conserve une participation majoritaire.
Le conditionnement des boissons alcoolisées représente près des trois quarts de son chiffre d'affaires, le quart restant étant ventilé entre les boissons non-alcoolisées et l'alimentaire. La demande de verre est en hausse constante en Europe (2% sur le marché général et 7% sur le marché premium) mais il n'y a pas de nouvelles capacités de production. Le secteur est un quasi oligopole car les trois premiers producteurs contrôlent plus de la moitié des parts de marché : ceci confère à Verallia une certaine latitude pour ajuster ses prix. Cependant le secteur est extrêmement énergivore et l'on peut bien sûr craindre un impact défavorable de la hausse des coûts de l’énergie cette année.
Situation financière
Au niveau financier, à un cours de 32 euros par action, la capitalisation boursière de Verallia oscille autour de 3.8 milliards d’euros et sa valeur d'entreprise (capitalisation boursière + endettement net) autour de 5 milliards.
Sur les cinq derniers exercices fiscaux (de 2017 à 2021), le producteur délivre une croissance modeste de son chiffre d'affaires (de 2.39 à 2.67 milliards d’euros) avec des marges d'exploitation à deux chiffres (en moyenne de 11% sur cette période). Attention : nous retraitons de l'EBIT les coûts de restructuration, récurrents chaque année chez Verallia et donc pas "exceptionnels" comme la présentation des comptes du groupe pourrait le laisser croire.
La position financière est typique d'un groupe industriel de cette nature, avec une dette à long-terme d'un montant équivalent à la valeur amortie des immobilisations et un brin supérieure à la valeur des capitaux propres. Verallia a refinancé sa dette à des conditions avantageuses et la charge d'intérêt est couverte plus de 5 fois par l'EBIT.
Au niveau des cash-flows, l'activité est certes capitalistique (les capex sont équivalentes à 10% du CA) mais, c'est une particularité du secteur, la production à flux tendus permet de ne pas s'encombrer de stocks, d'où un besoin en fonds de roulement qui ne consomme pas de trésorerie.
Sur les cinq derniers exercices, et sur ce qui reste un périmètre plus ou moins égal, Verallia génère un montant cumulé de 1.4 milliards d’euros en profits cash (free cash-flow), soit une moyenne de 275 millions d'euros par an. Son activité est donc beaucoup plus rentable que ce qu'on pourrait intuitivement supposer, quand bien même le levier financier reste important.
Le groupe a entamé l'an passé un programme de retour de capital aux actionnaires : 114 millions d’euros ont été distribués en dividendes et 221 millions ont été consacrés à des rachats d'actions. Cette opération a été réalisée à une valorisation de grosso modo x8 l'EBITDA. C'est en-dessous d'un comparable direct comme l'espagnol Vidrala, valorisé autour de x10 l'EBITDA car sa position financière est bien meilleure (mais son CA est moitié moindre que celui de Verallia).
Actualité et perspectives
L'actualité récente de Verallia est le rachat du groupe britannique Allied Glass, très présent dans le domaine du conditionnement des spiritueux comme le gin ou le whisky (deux débouchés porteurs et en croissance). Le marché premium, nous le disions plus haut, croît trois fois plus vite que le marché général : il s'agit donc d'une acquisition très stratégique pour Verallia, réalisée pour environ 350 millions de dollars, soit grosso modo deux fois le chiffre d'affaires de Allied Glass (un multiple comparable à celui de Verallia en ce moment) .
Avec ce périmètre élargi et les nouveaux débouchés correspondants, le management pense pouvoir dégager un profit cash annuel de 300 millions d'euros en moyenne sur les trois prochains exercices. Si l'on est prêt à composer avec le levier financier et l'épée de Damoclès liée au coût de l'énergie, cela signifie que la capitalisation boursière du moment représente un multiple de 13 fois ce profit attendu.
En dépit d’un profil de croissance organique très limité, il n'y aucun doute sur le fait que Verallia est un groupe très bien géré avec une position compétitive tout à fait excellente. Cependant il est difficile de justifier un investissement à ce cours, faute de marge de sécurité.
Pour l'anecdote, en France, un comparable dans le domaine de l'emballage est Groupe Guillin : ce dernier est aussi bien géré, avec un endettement réduit, une croissance soutenue, et un multiple de valorisation inférieur (grosso modo x5 les profits).