Milan (awp/afp) - Telecom Italia est au centre de grandes manoeuvres sur le marché très disputé des télécoms en Italie: Iliad cherche à marier l'opérateur historique avec sa filiale locale et le fonds d'investissement CVC Capital Partners lorgne la part de son principal actionnaire, Vivendi.

Un autre groupe, Poste Italiane, contrôlé à 64% par l'Etat italien, pourrait toutefois contrecarrer les plans d'Iliad, en s'invitant au capital de Telecom Italia avec la bénédiction du gouvernement Meloni.

Un éventuel investissement de Poste Italiane "est une hypothèse sur la table, mais pour l'instant il n'y a rien de concret", a indiqué à l'AFP une source proche du dossier, confirmant des informations de presse. Interrogé, le groupe, qui réunissait lundi son conseil d'administration, n'a pas souhaité commenter.

L'opérateur français Iliad, propriété du milliardaire Xavier Niel et maison mère de Free, étudie pour sa part une possible fusion de sa filiale italienne avec Telecom Italia et a informé ces derniers jours le gouvernement Meloni de son intérêt pour l'opérateur, selon une source financière.

Le gouvernement, qui dispose de pouvoirs spéciaux ("golden power") dans des secteurs jugés stratégiques comme les télécommunications, a son mot à dire sur des transactions concernant Telecom Italia.

L'Etat italien est son deuxième actionnaire, à travers la part de 9,8% détenue par la Caisse des dépôts italienne (CDP), derrière Vivendi qui en contrôle 23,75%.

Guerre des prix

Après avoir échoué à racheter la filiale italienne du groupe britannique Vodafone, Iliad a jeté ainsi son dévolu sur Telecom Italia, numéro un de la téléphonie mobile en Italie avec une part de marché de 27,1%.

Vodafone avait repoussé à deux reprises, en 2022 et 2023, les avances du groupe français, préférant vendre sa filiale locale à Swisscom, présent en Italie depuis 2007 avec Fastweb.

Le PDG de Telecom Italia, Pietro Labriola, a appelé maintes fois de ses voeux une consolidation du secteur des télécoms italien, où son groupe est attaqué par des concurrents à la tarification agressive, à commencer par Iliad.

Ensemble, Telecom Italia et Iliad auraient une part de marché de 37,6% dans le mobile, se plaçant devant la nouvelle entité formée par Vodafone et Fastweb (30,1%) et Wind Tre (23,7%), selon des chiffres publiés par Agcom, l'autorité de régulation des médias.

Iliad était entré sur le marché de la téléphonie mobile en Italie en 2018.

En 2015, Xavier Niel avait déjà acquis une participation potentielle de 15% dans Telecom Italia, via des instruments financiers dérivés, avant de la céder en 2016.

Poste italiane, qui est présent sur le marché du mobile avec une part de 4%, pourrait être tenté de fusionner sa filiale PosteMobile avec Telecom Italia ou alors de racheter la part de 9,8% détenue par la CDP.

"L'italianité"

"Les Français font pression pour obtenir le feu vert" afin de fusionner Iliad Italie avec Telecom Italia, "mais le gouvernement préfère la Poste, qui garantirait l'italianité" de l'opérateur, a commenté dimanche le journal la Repubblica.

Vivendi, qui a claqué la porte du conseil d'administration du groupe italien en janvier 2023, cherche de son côté à se défaire de sa participation.

Sur les rangs, le fonds d'investissement britannique CVC Capital Partners qui est "intéressé par un éventuel rachat de la part de Vivendi", selon une source financière, mais les négociations semblent dans l'impasse.

Vivendi a perdu en janvier la première manche de sa bataille judiciaire contre la vente du réseau fixe de Telecom Italia, qui avait défié son premier actionnaire en le cédant sans son aval au fonds d'investissement américain KKR.

Le géant français des médias a aussitôt annoncé sa décision de faire appel. La cession du réseau fixe pour un montant pouvant atteindre 22 milliards d'euros, finalisée en juillet 2024, visait à réduire la lourde dette de l'opérateur.

Les spéculations sur un rapprochement avec Iliad ont donné des ailes au titre de Telecom Italia, qui s'est envolé de 6,28% à la Bourse de Milan vendredi avant de clôturer en hausse de 1,50% à 0,3042 euro lundi, au plus haut depuis un an et demi.

afp/ck