Paris (awp/afp) - Le géant français des médias Vivendi, contrôlé par la famille Bolloré, a défendu lundi devant ses actionnaires sa stratégie visant à devenir un groupe plus international, alors qu'il a été récemment contraint de changer de pied dans plusieurs projets.

Vivendi est notamment aux prises depuis plus d'un an avec la Commission européenne qui examine jusqu'au 14 juin sa prise de contrôle du groupe Lagardère, propriétaire du troisième éditeur mondial Hachette Livre.

Pour le président du conseil de surveillance, Yannick Bolloré, le rapprochement avec le groupe Lagardère illustre la stratégie d'internationalisation de Vivendi qui souhaite créer un "champion mondial de l'édition" et développer de nouveaux métiers comme le "travel retail", la distribution dans les gares et aéroports.

Mais le groupe a été contraint à "de douloureuses contreparties" afin d'obtenir l'accord de Bruxelles: la cession à 100% d'Editis et la vente du magazine Gala.

Agissant sous la contrainte, Vivendi a dû revoir à la baisse le prix demandé pour son groupe d'édition, a convenu le président du directoire Arnaud de Puyfontaine.

Acheté 829 millions d'euros en 2019, Editis sera revendu à un prix "voisin" d'une estimation comprise entre 500 et 600 millions d'euros, a confirmé Yannick Bolloré, lundi au micro de BFM Business, sans toutefois donner le prix exact.

Le milliardaire tchèque Daniel Kretinsky, qui a signé dimanche une promesse d'achat d'Editis, aura les moyens d'en faire un concurrent réel pour Hachette au moins sur le marché français, d'autant qu'il est également actionnaire du distributeur Fnac Darty.

"Sortir par le haut"

"Nous croyons dans la croissance à venir de l'activité d'édition (...), un pilier qui interagit avec l'ensemble de nos métiers", a déclaré M. de Puyfontaine sur la scène de l'Olympia, à Paris, où avait lieu l'assemblée générale.

Vivendi tente ainsi de convaincre le marché que ses différentes activités fonctionnent mieux ensemble que séparément, alors que sa valorisation souffre, comme de nombreux conglomérats, d'une importante "décote de holding" (43% selon la banque OddoBHF).

Autre revers, Vivendi a "tiré les conséquences" des nombreuses difficultés auxquelles il est confronté en Italie depuis qu'il est devenu en 2015 actionnaire de Telecom Italia.

L'effondrement de la valorisation de l'opérateur transalpin a pesé pour environ 1,7 milliard d'euros dans ses comptes l'année dernière, et Vivendi mène désormais la fronde contre la direction de Tim en espérant "sortir par le haut", a lâché Arnaud de Puyfontaine.

Selon un communiqué, Vivendi a vu au premier trimestre son chiffre d'affaires progresser 3,3% à 2,29 milliards d'euros, un niveau conforme aux attentes des analystes.

L'activité a notamment profité de la hausse des abonnements en France du groupe Canal+, qui a généré 1,5 milliard d'euros de recettes (+2,2%) et de la performance de StudioCanal qui bondit de plus de 13%.

Canal+ étudie d'éventuelles acquisitions pour grandir encore à l'international et a annoncé récemment un partenariat pour intégrer l'offre Apple TV+ à sa plateforme myCanal.

Le groupe de communication Havas a également poursuivi son rebond post-crise sanitaire avec des recettes en hausse de 3,5%, à 611 millions d'euros.

Enfin, le chiffre d'affaires de Gameloft (jeux vidéo) a progressé de 14,8%, à 71 millions d'euros, porté par sa nouvelle stratégie vers les jeux PC et consoles.

Editis, qui avait largement profité de l'élan pour la littérature au moment de la crise sanitaire, est désormais confronté à une conjoncture économique plus difficile et son chiffre d'affaires a reculé sur le trimestre de 6,3%, à 150 millions d'euros.

L'assemblée générale s'est conclue avec l'adoption de toutes les résolutions, bien que les actionnaires aient fait part de leur mécontentement concernant les rémunérations de certains dirigeants.

Celle de Yannick Bolloré, également PDG de Havas, a ainsi été approuvée avec moins de 65% des voix.

Dans un communiqué, Vivendi s'est engagé à examiner "à nouveau la situation du président du conseil de surveillance et des membres du directoire exerçant des fonctions opérationnelles".

L'aîné de la famille, Sébastien Bolloré, a rejoint ses deux frères Yannick et Cyrille au conseil de surveillance de groupe, tandis que leur père Vincent, 71 ans, a laissé la place de censeur qu'il occupait depuis 2019.

Salué à distance par son fils et applaudi par ses actionnaires, ce dernier "continuera à apporter au groupe en tant que PDG de la Compagnie de l'Odet", actionnaire de contrôle de Vivendi via le groupe qui porte son nom.

afp/rp