(Répétition sans changement d'une dépêche diffusée dimanche)

par Andreas Cremer

WOLFSBURG, 28 septembre (Reuters) - Volkswagen sait déjà qu'une nouvelle équipe dirigeante et la refonte de ses structures ne suffiront pas à le remettre sur le droit chemin après le scandale mondial de la tricherie aux tests anti-pollution.

Au-delà des décisions adoptées vendredi par le conseil de surveillance, les dirigeants, les salariés, les clients et les actionnaires du groupe s'efforcent de deviner quelles seront les prochaines étapes de son calvaire.

Matthias Müller, le nouveau président du directoire doit tenter de résoudre simultanément plusieurs problèmes, dont certains étaient déjà clairement posés avant l'affaire des moteurs diesel et risquent désormais de s'aggraver.

La dégradation de la rentabilité de la marque VW n'est pas le moindre d'entre eux mais dans l'immédiat, la priorité sera d'apaiser le scandale du truquage des tests d'émissions polluantes aux Etats-Unis, dont l'impact potentiel a été comparé à celui de la marée noire de 2010 pour le géant pétrolier BP.

De ce point de vue, Volkswagen pourrait commencer par opter pour la contrition publique en lançant une vaste campagne publicitaire sur le marché américain, estime un dirigeant du groupe, qui a requis l'anonymat.

"L'humilité doit être le maître mot", a-t-il dit.

VW a mandaté un cabinet juridique américaine pour mener une enquête indépendante, une tactique de gestion de crise déjà adoptée dans le passé par de grandes multinationales comme General Motors ou News Corp.

Le temps presse: les procédures judiciaires, les enquêtes officielles, les demandes d'indemnisation et de rappels de véhicules se multiplient déjà et leur coût global pourrait vite excéder les 6,5 milliards d'euros prévus par le groupe.

ABANDONNER LE DIESEL AUX ETATS-UNIS ?

En Bourse, la capitalisation de Volkswagen a fondu de 30%, soit 23 milliards d'euros, sur la semaine écoulée, l'équivalent de plus de deux fois la valeur de PSA Peugeot Citroën.

Limiter les retombées de l'affaire aux Etats-Unis doit passer avant toute autre considération, estime un gérant d'un fonds européen qui figure parmi les 20 premiers actionnaires de Volkswagen.

"C'est ensuite qu'il faudra discuter des orientations stratégiques", ajoute-t-il, précisant que Volkswagen pourrait devoir remettre en cause la place accordée au diesel dans ses activités.

"Ce scandale leur fournit une occasion de se demander dans quelle direction ils doivent aller en terme de portefeuille de modèles", dit-il.

Pour Max Warburton, analyste financier de Bernstein, Matthias Müller doit aller encore plus loin et renoncer totalement à vendre des véhicules diesel aux Etats-Unis, afin de libérer des capitaux pour investir dans les voitures à moteur hybride et d'autres technologies peu polluantes.

"VW est obligé de penser grand et d'être audacieux", résume-t-il.

Plus largement, de nombreuses voix plaident au sein du groupe en faveur d'un changement de culture incluant une décentralisation des processus de décision.

La centralisation excessive sous la direction de Martin Winterkorn, qui a démissionné mercredi de la présidence du directoire, et de Ferdinand Piëch, qui présidait le conseil de surveillance jusqu'en avril, est jugée depuis longtemps inadaptée à un groupe rassemblant 12 marques et 119 usines dans 31 pays.

EN FINIR AVEC LE "CLIMAT DE PEUR"

Un "climat de peur" interne pourrait être l'une des explications du scandale des tests, estime un cadre du groupe, tout comme il avait joué un rôle il y a deux ans dans le fait que des plaintes de clients chinois sur les défauts de boîtes de vitesses aient été passées sous silence pendant plusieurs mois.

"Nous devons créer une atmosphère dans laquelle les problèmes peuvent être abordés ouvertement avec les supérieurs et non dissimulés", a dit jeudi Berndt Osterloh, le principal responsable syndical de VW.

Deux autres défis de taille attendent Matthias Müller: enrayer la baisse des ventes en Chine et redresser la marque VW elle-même.

Avant que n'éclate l'affaire, VW peinait déjà à trouver cinq milliards d'euros à économiser pour améliorer sa rentabilité, aujourd'hui inférieure à celle de Renault et PSA.

Elle avait promis de réduire ses coûts d'un premier milliard dès cette année, un objectif réaffirmé trois jours avant que n'éclate le scandale du diesel, lors d'une présentation aux investisseurs intitulée "Stabilité en période de volatilité".

Désormais l'humiliation infligée à Volkswagen par le truquage des tests pourrait l'obliger à baisser ses prix, donc à réduire encore ses marges, ce qui ne ferait qu'augmenter les économies nécessaires.

"Les révélations (américaines) pourrait avoir un impact négatif sur la capacité de VW à maintenir des tarifs de marque haut de gamme", a estimé Harald Hendrikse, analyste de Morgan Stanley dans une note cette semaine.

(avec Laurence Frost, Jurik Iser, Sinead Cruise et Paul Ingrassia; Marc Angrand pour le service français)