Francfort (awp/afp) - Les salariés du gendarme allemand de la finance, la Bafin, s'opposent à l'interdiction de détenir des actions à titre privé voulue par le gouvernement pour prévenir d'autres scandales après la faillite retentissante de la société Wirecard, a appris vendredi l'AFP.

"Le comité du personnel de la Bafin se prononce contre les interdictions de négocier" tous types de placements comme des actions, selon une lettre de cette instance envoyée le 5 novembre au secrétaire d'Etat aux Finances, Jörg Kukies, dont l'AFP s'est procuré une copie.

Ces salariés critiquent le fait qu'on leur enlève "la possibilité de se construire une partie de leur patrimoine privé via un investissement financier", selon l'instance représentative de cette autorité comptant 2.700 employés.

Cet avis consultatif ne devrait cependant pas faire reculer le gouvernement allemand, qui a présenté début octobre un paquet de mesures visant à renforcer ses règles de surveillance comptable des entreprises suite à la faillite retentissante du prestataire de paiements Wirecard, en juin.

Cette affaire a ébranlé la place financière de la première économie européenne et terni l'image de son superviseur, dont près d'une centaine de salariés ont largement spéculé sur le titre Wirecard, comme l'attestent des documents publiés vendredi.

Pas moins de 495 transactions privées avec l'action de Wirecard ont été effectuées entre janvier 2018 et août 2020 par 85 agents de la Bafin, indique une lettre du ministère des Finances rédigée début novembre, dont l'AFP a eu connaissance.

Plus de la moitié des transactions, soit 265, ont été réalisées entre janvier et juin 2020, juste avant que n'éclate le scandale.

La fraude comptable de Wirecard a éclaté quand cette société vedette du Dax, prestigieux indice boursier des plus grandes entreprises allemandes, a avoué que 1,9 milliard d'euros inscrits dans ses comptes n'existaient pas - entraînant une chute de plus de 98% de son cours de Bourse.

Le superviseur bancaire Bafin s'est vite vu reprocher son manque de vigilance malgré plusieurs alertes sur des fraudes alléguées au sein de la firme bavaroise.

L'autorité européenne des marchés financiers (Esma) a mis en lumière le risque de possibles "conflits d'intérêt" notamment pour les salariés chargés de surveiller les marchés et pour lesquels la Bafin a "manqué d'information sur les actions détenues", selon un rapport publié fin octobre.

La Bafin enquête désormais pour savoir si certains salariés ont pu utiliser des informations sur Wirecard à des fins privées.

Le fondateur et ancien patron de Wirecard, l'Autrichien Markus Braun, en détention provisoire, sera lui auditionné jeudi par une commission d'enquête de la chambre des députés allemands.

afp/al