Des chars israéliens ont ouvert le feu mardi sur une foule tentant de récupérer de l'aide auprès de camions à Gaza, faisant au moins 59 morts, selon des sources médicales. Cet épisode figure parmi les plus meurtriers d'une violence croissante, alors que les habitants, désespérés, luttent pour se nourrir.

Des images diffusées sur les réseaux sociaux montrent une douzaine de corps mutilés gisant dans une rue de Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza. L'armée israélienne, engagée dans un conflit contre les militants palestiniens dirigés par le Hamas depuis octobre 2023, a reconnu avoir tiré dans la zone et a déclaré qu'elle enquêtait sur l'incident.

Des témoins interrogés par Reuters affirment que les chars israéliens ont tiré au moins deux obus sur une foule de milliers de personnes rassemblées sur la principale route est de Khan Younès, dans l'espoir d'obtenir de la nourriture auprès des camions d'aide qui empruntent cet axe.

« Tout à coup, ils nous ont laissé avancer et ont fait rassembler tout le monde, puis les obus ont commencé à tomber, des obus de char », témoigne Alaa, un témoin interrogé par Reuters à l'hôpital Nasser, où les blessés étaient étendus au sol et dans les couloirs faute de place.

« Personne ne regarde ces gens avec compassion. Les gens meurent, ils sont déchirés, juste pour obtenir de la nourriture pour leurs enfants. Regardez ces gens, ils se déchirent tous pour obtenir de la farine afin de nourrir leurs enfants. »

Les secouristes palestiniens rapportent qu'au moins 59 personnes ont été tuées et 221 blessées lors de l'incident, dont au moins 20 dans un état critique. Les victimes étaient acheminées à l'hôpital à bord de voitures particulières, de pousse-pousse ou de charrettes à âne. Il s'agit du bilan le plus lourd en une seule journée depuis la reprise de l'aide à Gaza en mai.

Dans un communiqué, les Forces de défense israéliennes (IDF) ont déclaré : « Plus tôt dans la journée, un rassemblement a été identifié à proximité d'un camion d'aide bloqué dans la zone de Khan Younès, non loin des troupes de l'IDF opérant dans la région.

« L'IDF est au courant des signalements faisant état de blessés à la suite de tirs de l'IDF après l'approche de la foule. Les détails de l'incident sont en cours d'examen. L'IDF regrette tout dommage causé à des personnes non impliquées et agit pour minimiser autant que possible ces dommages tout en assurant la sécurité de nos troupes. »

Les secouristes indiquent qu'au moins 14 autres personnes ont également été tuées par des tirs israéliens et des frappes aériennes ailleurs dans l'enclave densément peuplée, portant le bilan total de la journée de mardi à au moins 73 morts.

Le ministère de la Santé a déclaré que 397 Palestiniens, parmi ceux cherchant de l'aide alimentaire, ont été tués et plus de 3 000 blessés depuis la fin mai.

L'incident de mardi s'inscrit dans une série quasi quotidienne de tueries de masse visant des Palestiniens en quête d'aide, survenues au cours des trois semaines écoulées depuis la levée partielle du blocus total imposé sur le territoire pendant près de trois mois.

Israël canalise désormais une grande partie de l'aide autorisée à entrer à Gaza via un nouveau groupe soutenu par les États-Unis et Israël, la Gaza Humanitarian Foundation (GHF), qui gère quelques points de distribution dans des zones sécurisées par l'armée israélienne.

« L'incident en question ne s'est pas produit sur un site de la GHF, mais à proximité d'un point de distribution du Programme alimentaire mondial (PAM) des Nations unies », a précisé mardi la fondation à propos de l'incident.

Les Nations unies rejettent le système de distribution de la GHF, le jugeant insuffisant, dangereux et contraire aux règles d'impartialité humanitaire. Israël affirme que ce dispositif est nécessaire pour empêcher le détournement de l'aide par le Hamas, ce que le mouvement palestinien dément.

Les autorités de Gaza affirment que des centaines de Palestiniens ont été tués en tentant de rejoindre les sites de la GHF.

La GHF a indiqué dans un communiqué publié lundi soir avoir distribué plus de trois millions de repas sur ses quatre sites de distribution sans incident.

La guerre à Gaza a été déclenchée en octobre 2023, lorsque des militants du Hamas palestinien ont attaqué Israël, tuant 1 200 personnes et prenant 251 otages, selon les alliés d'Israël. L'offensive militaire israélienne qui a suivi a fait près de 55 000 morts palestiniens, selon le ministère de la Santé de Gaza, tout en déplaçant quasi totalement les 2,3 millions d'habitants et en provoquant une crise alimentaire.

Depuis la semaine dernière, les Palestiniens de Gaza suivent avec attention la nouvelle guerre aérienne entre Israël et l'Iran, ce dernier étant un soutien de longue date du Hamas.

Des habitants de Gaza ont partagé des images de bâtiments israéliens détruits par des missiles iraniens, certains se disant satisfaits de voir les Israéliens éprouver une part de la peur des frappes aériennes qu'ils endurent depuis 20 mois.