Les décideurs politiques hors des États-Unis semblent désormais plus enclins à baisser leurs taux d'intérêt qu'ils ne l'auraient fait autrement, ou, dans le cas du Japon, à les relever moins fortement.
La Réserve fédérale américaine se trouve dans une position délicate.
Voici un aperçu de la situation des dix banques centrales des marchés développés.
1/ SUISSE
La Banque nationale suisse ne se réunira pas avant juin, mais cette réunion sera intéressante, car les marchés s'attendent à ce qu'elle ramène ses taux à zéro, contre 0,25 % actuellement.
La BNS affirme qu'elle préfère ne pas aller plus loin et revenir à des taux négatifs, mais la flambée du franc suisse nuit à une économie fortement exportatrice et pourrait pousser la Suisse vers la déflation.
Le franc est la devise des marchés développés qui affiche la meilleure performance depuis l'annonce des droits de douane par Donald Trump le 2 avril. L'autre outil politique souvent utilisé par la BNS, à savoir intervenir pour affaiblir le franc, pourrait provoquer la colère de l'administration Trump, qui affirme que la manipulation monétaire était l'une des motivations de ses droits de douane.
2/ CANADA
La Banque du Canada a maintenu mercredi ses taux à 2,75 %, marquant ainsi une pause après sept baisses consécutives, et a déclaré vouloir obtenir davantage d'informations sur l'impact des droits de douane.
Le gouverneur Tiff Macklem a déclaré que l'incertitude rendait difficile toute prévision économique, soulignant que « les prévisions de croissance économique sont peu utiles pour orienter les décisions ».
Les traders parient néanmoins sur deux nouvelles baisses d'ici la fin de l'année.
3/ NOUVELLE-ZÉLANDE
La Banque de réserve de Nouvelle-Zélande a réduit son taux directeur de 25 points de base à 3,5 % la semaine dernière, ce qui porte à 200 points de base le total des assouplissements depuis août.
La Nouvelle-Zélande est exposée à la Chine, ce qui la rend vulnérable aux répercussions d'une guerre commerciale prolongée entre les États-Unis et la Chine. Les marchés s'attendent à environ trois nouvelles baisses cette année, même si les données publiées jeudi ont révélé une inflation plus élevée que prévu.
4/ SUÈDE
La Suède a maintenu ses taux à 2,25 % en mars et prévoit de les maintenir à ce niveau pour l'instant.
La Riksbank, qui avait adopté une position accommodante en abaissant ses taux de 4 % afin de soutenir une économie morose, mais les marchés s'accordent avec les décideurs politiques sur le fait que de nouvelles baisses sont peu probables.
5/ ZONE EURO
La Banque centrale européenne a abaissé ses taux d'intérêt pour la septième fois en un an jeudi et a laissé entendre que d'autres assouplissements pourraient suivre.
Elle a déclaré que les perspectives de croissance s'étaient détériorées en raison de la montée des tensions commerciales et que la volatilité des marchés risquait d'entraîner un resserrement des conditions financières.
Le taux directeur de la BCE s'établit désormais à 2,25 % et les marchés anticipent actuellement deux ou trois nouvelles baisses de 25 points de base cette année.
6/ ÉTATS-UNIS
La Fed se trouve face à un dilemme, car elle s'attend à ce que les droits de douane ralentissent la croissance économique et poussent l'inflation à la hausse.
Cela l'a conduite à adopter une attitude attentiste, a déclaré mercredi son président Jerome Powell. Les marchés s'attendent à ce que la Fed maintienne ses taux inchangés en mai avant de reprendre ses baisses ultérieurement.
Elle est restée inchangée toute l'année, après avoir baissé ses taux de 100 points de base en 2024. Mais jusqu'à ce que M. Trump suspende certains droits de douane « réciproques » la semaine dernière, les traders anticipaient une baisse le mois prochain afin de soutenir la croissance. Pour compliquer encore la situation, M. Trump a déclaré jeudi que le limogeage de M. Powell « ne pouvait pas arriver assez tôt » et a appelé la banque centrale américaine à baisser ses taux.
7/ ROYAUME-UNI
Les marchés estiment à plus de 80 % la probabilité d'une baisse d'un quart de point des taux d'intérêt par la Banque d'Angleterre en mai, et s'attendent à ce qu'elle poursuive à ce rythme d'environ une baisse par trimestre jusqu'à la fin de 2025.
La BoE a réduit ses taux plus lentement que beaucoup de ses homologues, car elle s'attend à une reprise de l'inflation. Les chiffres de mars, plus modérés que prévu, devraient toutefois lui donner la confiance nécessaire pour procéder à une nouvelle baisse le mois prochain.
8/ AUSTRALIE
L'Australie n'a commencé à assouplir sa politique monétaire qu'en février, mais les marchés s'attendent désormais à une action plus urgente, avec une possibilité de baisse plus importante de 50 points de base en mai et de près de 125 points de base cette année.
Son économie est exposée aux tensions commerciales entre la Chine et les États-Unis. La Chine est le premier partenaire commercial de l'Australie, de sorte que les marchés ont renforcé leurs anticipations de baisse des taux à mesure que les tensions s'intensifiaient.
9/ NORVÈGE
La banque centrale norvégienne a maintenu ses taux inchangés à 4,50 %, leur plus haut niveau depuis 17 ans, le mois dernier, car une résurgence inattendue de l'inflation a conduit les décideurs politiques à reporter leurs plans de baisse.
Les marchés s'attendent néanmoins à une baisse en juin, suivie d'autres mesures.
10/ JAPON
La Banque du Japon reste l'exception parmi les marchés développés. Elle est en mode hausse, même si les droits de douane ont compliqué la situation.
Le gouverneur Kazuo Ueda a déclaré que la Banque du Japon pourrait devoir agir si les droits de douane nuisaient à l'économie, laissant entendre qu'elle pourrait suspendre son cycle prudent de hausse des taux, qui a porté ceux-ci à 0,5 %.
Toutefois, cela pourrait mettre un terme à la récente appréciation du yen, voire inverser la tendance, ce qui risquerait de mécontenter le président Trump. Les responsables japonais craignent déjà que la lenteur des hausses de taux à partir de niveaux extrêmement bas ne soit critiquée lors des négociations commerciales, même si cette question n'a pas été abordée lors du premier cycle de discussions.