* L'Otan se dit disposée à discuter de mesures de confiance
* "Il y a un risque réel de nouveau conflit armé en
Europe"-Stoltenberg
* La Russie dit ne pas pouvoir considérer l'Otan comme
pacifique
(Actualisé tout du long avec déclarations, précisions)
par Robin Emmott, Sabine Siebold et Gabriela Baczynska
BRUXELLES, 12 janvier (Reuters) - L'Otan a indiqué mercredi
être disposée à mener avec la Russie des discussions sur le
contrôle des armements et le déploiement des missiles afin de
prévenir tout nouveau conflit en Europe, alors que Moscou a
averti que le contexte était "très dangereux" et la marche à
suivre incertaine.
Les divergences entre Moscou et les Occidentaux semblent
plus grandes que jamais à l'issue de quatre heures de
discussions à Bruxelles entre une délégation russe et l'Otan, la
deuxième des réunions organisées cette semaine dans l'espoir
d'apaiser les tensions provoquées par le déploiement massif de
soldats russes à la frontière avec l'Ukraine.
Jens Stoltenberg, le secrétaire général de l'Otan, a fait
savoir que celle-ci était disposée à négocier sur les systèmes
d'armement mais qu'elle ne permettrait pas à la Russie d'opposer
son veto à la volonté de l'Ukraine d'intégrer un jour l'Alliance
atlantique - une hypothèse que le Kremlin considère comme une
"ligne rouge" et sur laquelle il réclame des garanties.
"Il y a un risque réel de nouveau conflit armé en Europe", a
déclaré Jens Stoltenberg lors d'une conférence de presse. "Il y
a des divergences significatives entre les alliés de l'Otan et
la Russie", a-t-il ajouté. "Ces divergences ne seront pas
faciles à aplanir."
Le vice-ministre russe des Affaires étrangères Alexandre
Grouchko a déclaré que son pays était disposé à mener des
discussions sur le déploiement d'armes et des mesures de
vérification attenantes, mais qu'il ne permettrait pas que les
propositions russes soient choisies à la carte par les
Occidentaux.
S'exprimant longuement devant les journalistes, Alexandre
Grouchko a expliqué que la Russie ne pouvait prendre au sérieux
la position de l'Otan selon laquelle l'Alliance a uniquement un
rôle défensif et ne représente aucune menace pour le pays.
"FAILLES"
La Russie, a-t-il ajouté, répondra de manière symétrique à
toute tentative de la contenir ou de l'intimider.
"Si des failles dans le système de défense russe sont
cherchées, alors il y aura aussi une recherche des failles de
l'Otan", a prévenu le diplomate.
"Ce n'est pas notre choix, mais il n'y aura pas d'autre voie
si nous ne parvenons pas à inverser le très dangereux cours
actuel des événements."
Par la suite, Alexandre Grouchko a averti que Moscou aurait
recours à des moyens militaires pour neutraliser les menaces
sécuritaires si la diplomatie venait à s'avérer insuffisante.
D'après l'agence de presse Interfax, le vice-ministre russe
de la Défense Alexandre Fomine a déclaré que le fait que l'Otan
"ignore" les propositions sécuritaires de la Russie créait un
risque d'"incidents et conflits".
Les discussions menées à Bruxelles, dans la foulée de celles
entre représentants américains et russes à Genève, interviennent
dans un contexte de tensions sans précédent depuis la Guerre
froide.
La Russie a contraint les Occidentaux à négocier sur la
sécurité en Europe en massant ces derniers mois quelque 100.000
soldats près de ses frontières avec l'Ukraine, selon les
estimations données par Kiev et Washington.
Moscou nie toute volonté d'envahir l'ancienne république
soviétique mais réclame des engagements contraignants de la part
des Occidentaux pour garantir sa propre sécurité, notamment que
l'Otan ne s'élargira pas à l'Est.
"S'AGIT-IL D'INTIMIDATION ?"
Pour les membres de l'Alliance atlantique, les
revendications russes, exprimées en décembre dans deux projets
de traités, sont inacceptables, notamment lorsqu'il lui est
demandé de revenir au niveau d'activité qui était le sien en
1990, lors de la dislocation de l'Union soviétique, et de ne
plus accepter de nouveaux membres.
La secrétaire d'Etat adjointe américaine Wendy Sherman a
déclaré qu'il était difficile de comprendre pourquoi un pays
disposant de l'arme nucléaire se sentait menacé par un voisin
nettement moins imposant et menait des exercices militaires près
de la frontière ukrainienne.
"S'agit-il d'une invasion ? S'agit-il d'une intimidation ?",
a interrogé Wendy Sherman devant les journalistes. "Cela n'est
pas propice à obtenir des solutions diplomatiques."
La Russie n'a pas indiqué qu'elle oeuvrerait à une
désescalade, mais n'a pas dit le contraire non plus, a ajouté la
diplomate.
En dépit des divergences, Jens Stoltenberg a noté qu'il
était positif que les 30 pays de l'Otan et la Russie "s'assoient
autour de la même table et discutent de questions importantes".
Alexandre Grouchko a déclaré ne pas avoir souvenir de
discussions aussi franches et directes avec l'Otan. Des progrès
sont possibles mais il y a des questions sur lesquelles la
Russie ne peut pas faire marche arrière, a dit le haut
diplomate.
Il a averti que toute nouvelle aggravation des relations
entre Moscou et les Occidentaux pourrait avoir des conséquences
imprévisibles pour la sécurité européenne.
De nouvelles discussions sont prévues jeudi dans le cadre de
l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe
(OSCE).
(avec Tom Balmforth, Darya Korsunskaya, Andrey Ostroukh et
Andrew Osborn à Moscou; version française Nicolas Delame,
Jean-Stéphane Brosse et Jean Terzian, édité par Blandine Hénault
et Bertrand Boucey)