IZIOUM, Ukraine, 17 septembre (Reuters) - Vêtus de combinaisons de protection blanches, mains gantées de caoutchouc, les secouristes ukrainiens ont exhumé samedi de nouveaux corps sur le site funéraire proche de la ville d'Izioum (nord-est) récemment reconquise par les forces ukrainiennes.

L'Ukraine affirme que des centaines de personnes sont enterrées sur ce site boisé découvert cette semaine, dont au moins 17 militaires ukrainiens jetés dans une fosse commune. D'autres corps pourraient être ceux de civils enterrés dans des tombes individuelles marquées d'une croix de bois.

Les causes des décès n'ont pas encore été établies, mais des habitants affirment qu'une partie des victimes a été tuée lors d'une frappe aérienne.

Selon les autorités ukrainiennes, au moins un corps avait les mains liées et des marques de corde sur le cou.

Moscou n'a pas commenté la découverte des tombes que les Ukrainiens considèrent comme la preuve de nouveaux crimes de guerre commis par la Russie, laquelle nie régulièrement avoir commis des atrocités ou pris des civils pour cible.

Reuters a vu des travailleurs creuser à la pelle au moins cinq tombes, tandis que la police scientifique et les enquêteurs photographaient les découvertes et inspectaient les corps.

Les enquêteurs ont déclaré que l'état des dents montrait que certains défunts étaient âgés.

"Des exhumations sont en cours. Leurs identités ne sont pas connues pour le moment", a déclaré Roman Kasianenko, un procureur régional qui a aussi fait part de l'identification de trois corps exhumés vendredi.

Des habitants de la région se sont également rendus sur place comme Volodimir Kolesnik, sur la trace de parents tués selon lui lors d'une frappe aérienne sur un immeuble, peu avant la chute de la ville en avril.

TOMBE NUMÉRO 199

La semaine dernière, l'Ukraine a repris des dizaines de villes et de villages de la région lors d'une contre-attaque surprise.

Le gouverneur régional de Kharkiv, Oleh Sinehubov, a évoqué vendredi des frappes aériennes très meurtrières sur un immeuble de cinq étages survenues peu avant le début de l'occupation russe. Un responsable militaire ukrainien a déclaré en mai qu'une quarantaine de personnes avaient été tuées lors d'une attaque dans la ville.

Reuters n'a pas pu vérifier dans l'immédiat les détails de l'attaque ni qui a enterré les corps.

Volodimir Kolesnik a déclaré qu'il savait que ses proches avaient été emmenés sur ce site pour y être enterrés et qu'il n'avait pas osé y venir plus tôt en raison de l'occupation russe.

Après avoir vérifié une liste en sa possession, il a déposé sur la tombe numéro 199 une petite pancarte portant le nom de son cousin, Youri Yakovenko.

La croix numéro 164 correspond selon lui à l'épouse de ce dernier. Et le numéro 174 désigne sa tante, la mère de son cousin défunt.

Il a expliqué avoir récupéré la liste auprès d'une entreprise locale de pompes funèbres, qui a creusé les tombes.

Le président ukrainien Volodimir Zelensky a déclaré samedi que des preuves de torture avaient été trouvées sur des corps exhumés, ajoutant qu'une dizaine de sites de torture avaient été découverts sur le territoire libéré depuis le début du mois.

Le chef de l'administration installée par la Russie a pour sa part accusé les Ukrainiens d'avoir commis des atrocités. "Je n'ai rien entendu au sujet des enterrements", a déclaré Vitali Ganchev à la télévision d'État Rossiya-24. (Reportage Ivan Lyubysh-Kirde; version française Elizabeth Pineau)