PARIS/WASHINGTON (Reuters) - Les Etats-Unis renonceront bientôt à leurs efforts pour parvenir à une paix entre la Russie et l'Ukraine s'ils ne constatent pas sous peu de signes évidents de progrès, ont déclaré vendredi le président américain Donald Trump et son secrétaire d'Etat Marco Rubio.
"Rapidement, nous voulons que cela soit réglé", a dit Donald Trump aux journalistes à la Maison blanche. "Maintenant, si pour une raison ou une autre, l'une des deux parties rend les choses très difficiles, nous allons tout simplement dire 'vous êtes stupides, vous êtes des idiots, vous êtes des gens horribles et nous allons tout simplement passer à autre chose. Mais espérons que nous n'aurons pas à le faire."
Marco Rubio a tenu un discours similaire auparavant.
"Nous n'allons pas poursuivre cette démarche pendant des semaines et des mois. Nous devons donc déterminer très rapidement, et je parle de quelques jours, si cet accord est réalisable dans les prochaines semaines", a dit le secrétaire d'Etat américain à Paris, où il a rencontré jeudi plusieurs dirigeants européens et ukrainiens.
"Si ce n'est pas possible, si nos positions sont si éloignées que cela ne se produira pas, alors je pense que le président sera probablement arrivé au point où il dira 'bon, c'est fini'."
Interrogé sur un éventuel calendrier, Donald Trump a refusé de fournir une date butoir pour un arrêt de l'implication américaine dans les efforts de paix entre l'Ukraine et la Russie.
"Marco a raison de dire (...) que nous voulons voir tout cela s'arrêter", a dit le président américain. Prié de dire si son homologue russe Vladimir Poutine essayait de gagner du temps, il a répondu: "Je n'espère pas."
Donald Trump a "consacré beaucoup de temps et d'énergie" au conflit en Ukraine, a quant à lui déclaré Marco Rubio. "C'est important, mais beaucoup d'autres dossiers importants méritent tout autant, voire plus, d'attention."
Le président américain, qui avait promis de mettre fin à la guerre russo-ukrainienne en 24 heures s'il était réélu à la Maison blanche, n'est pour l'heure pas parvenu à conclure un accord de cessez-le-feu avec les deux camps.
FRUSTRATION CROISSANTE À WASHINGTON
Le président américain a exprimé dernièrement son agacement à l'égard à la fois de Kyiv et de Moscou, alors que Washington a organisé en mars en Arabie saoudite des réunions distinctes avec les deux camps pour leur présenter un plan de trêve. L'Ukraine l'a accepté, la Russie a dit qu'il fallait le remanier.
Par la suite, l'administration Trump a annoncé une trêve partielle, en mer Noire et pour les sites énergétiques, mais Kyiv et Moscou se sont mutuellement accusés de l'enfreindre.
Selon trois sources diplomatiques européennes, les déclarations de Marco Rubio reflètent la frustration croissante de la Maison blanche face à l'intransigeance russe dans une résolution du conflit en Ukraine.
Vendredi, le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov a déclaré que des progrès avaient déjà été réalisés pour un accord de paix mais que les contacts avec Washington étaient difficiles.
"Nous pensons que des progrès sont déjà à noter", a-t-il dit à des journalistes, évoquant la trêve partielle en mer Noire et pour les sites énergétiques.
"Mais, bien sûr, de nombreuses discussions complexes restent à mener", a-t-il ajouté. "Les contacts sont assez difficiles, car, naturellement, le sujet n'est pas simple".
"La Russie est déterminée à résoudre ce conflit, à défendre ses propres intérêts et est ouverte au dialogue. Nous poursuivons nos efforts dans ce sens", a assuré Dmitri Peskov.
Washington et Kyiv ont conclu jeudi soir un protocole d'accord sur l'exploitation des minerais en Ukraine. Des discussions doivent se poursuivre jusqu'à 26 avril pour aboutir à un arrangement final.
Parallèlement, des discussions sur l'Ukraine ont été organisées jeudi à Paris en présence de hauts représentants des Etats-Unis, de l'Ukraine et de puissances européennes.
Marco Rubio a déclaré vendredi qu'un accord-cadre de paix proposé par les Etats-Unis avait reçu un "accueil encourageant" lors de ces discussions.
Le secrétaire d'Etat a ajouté s'être entretenu dans la foulée des pourparlers avec le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, et l'avoir informé de "certains éléments" de l'accord-cadre de paix américain.
La question des garanties de sécurité américaines dans le cadre d'un accord de paix a été abordée lors des discussions, a fait savoir Marco Rubio, sans donner plus de détails.
La conclusion d'un accord de paix sera difficile à obtenir, a reconnu le secrétaire d'Etat américain, mais des signes que cela puisse advenir prochainement sont nécessaires, a-t-il dit.
"Personne ne dit que cela peut être fait en 12 heures. Mais nous voulons voir à quelle distance cela se situe", a-t-il dit. "Nous devons déterminer dès maintenant, en quelques jours, si c'est faisable à court terme, car si ce n'est pas le cas, je pense que nous allons simplement passer à autre chose."
(Rédigé par Gabriel Stargardter et Jeff Mason, avec la contribution de Michel Rose à Paris, Andreas Rinke à Berlin et Christian Lowe à Kyiv, Lili Bayer à Bruxelles, version française Blandine Hénault, édité par Augustin Turpin)