Quelle que soit la décision du cinquième circuit, l'affaire se poursuivra probablement pendant des mois, voire des années. Voici ce que vous devez savoir sur cette affaire :

QU'EST-CE QUE L'AVORTEMENT MÉDICAMENTEUX ?

L'interruption de grossesse par médicaments est un traitement composé de deux médicaments, la mifépristone et le misoprostol, utilisé pour interrompre une grossesse au cours des dix premières semaines. Elle représente plus de la moitié des avortements pratiqués aux États-Unis.

Deux sociétés vendent la mifépristone pour l'avortement médicamenteux aux États-Unis : Danco Laboratories, qui vend la version de marque Mifeprex, et GenBioPro Inc, qui vend une version générique.

QUEL EST L'OBJET DU LITIGE ?

Des associations médicales anti-avortement, menées par l'Alliance for Hippocratic Medicine, basée au Texas, ont intenté l'année dernière un procès à la Food and Drug Administration des États-Unis devant le tribunal fédéral d'Amarillo, au Texas. Elles ont affirmé que l'agence avait approuvé la mifépristone pour l'avortement en 2000 en utilisant une procédure illégale et qu'elle n'avait pas suffisamment pris en compte la sécurité du médicament, demandant au juge de district américain Matthew Kacsmaryk de révoquer l'approbation.

La FDA, ainsi que les principales associations médicales américaines, contestent fermement ces allégations. Danco est intervenu dans l'affaire pour défendre son médicament.

COMMENT L'AFFAIRE A-T-ELLE ÉTÉ PORTÉE DEVANT LE 5E CIRCUIT ?

Le 7 avril, M. Kacsmaryk a rendu une ordonnance temporaire, appelée "injonction préliminaire", qui suspend l'autorisation de la mifépristone pendant la durée de l'action en justice. L'injonction n'est pas une décision définitive, mais M. Kacsmaryk a estimé que les plaignants anti-avortement avaient des chances de gagner sur le fond.

L'administration Biden et Danco ont fait appel de l'injonction auprès du cinquième circuit. La Cour suprême des États-Unis a émis une ordonnance d'urgence mettant en suspens la décision de Kacsmaryk pendant la durée de l'appel, ce qui permet de maintenir la mifépristone sur le marché pour le moment, mais elle n'a pas abordé le fond de l'affaire.

QUE POURRAIT FAIRE LE 5E CIRCUIT ?

Maintenant qu'il a entendu les arguments, le groupe pourrait confirmer l'injonction de Kacsmaryk, ce qui suspendrait l'autorisation de la mifépristone pendant la durée de l'affaire, ou l'annuler, ce qui la maintiendrait sur le marché jusqu'à ce que Kacsmaryk rende une décision finale.

Le groupe pourrait également confirmer en partie l'ordonnance de Kacsmaryk, ce qui permettrait à la mifépristone de rester sur le marché, mais avec des restrictions importantes. C'est ce qu'avait fait une autre formation du cinquième circuit à un stade antérieur de l'affaire, bien qu'elle ait été rapidement annulée par l'ordonnance d'urgence de la Cour suprême.

Enfin, le tribunal pourrait estimer que les plaignants n'ont pas qualité pour agir, comme l'a soutenu le gouvernement, ce qui mettrait un terme à l'affaire, à moins qu'elle ne soit infirmée en appel.

Quelle que soit la décision du tribunal, la partie perdante aura la possibilité de faire appel devant l'ensemble du cinquième circuit, puis devant la Cour suprême des États-Unis. La mifépristone restera disponible sans aucune nouvelle restriction jusqu'à ce que tous ces appels soient terminés.

Les trois juges du panel de jeudi sont des conservateurs qui se sont toujours opposés au droit à l'avortement.

QU'EN EST-IL DE LA DÉCISION DE L'ÉTAT DE WASHINGTON ?

Quelques minutes après l'ordonnance de M. Kacsmaryk, le 7 avril, le juge Thomas Rice, du district de Spokane, dans l'État de Washington, a émis une injonction préliminaire interdisant à la FDA d'imposer de nouvelles restrictions à la mifépristone. Cette décision ne s'applique qu'à 17 États dirigés par des démocrates et au district de Columbia, qui avaient fait valoir que le gouvernement devrait assouplir les restrictions spéciales en matière de sécurité concernant la pilule.

L'injonction reste en vigueur. Elle serait en conflit direct avec toute décision future restreignant la mifépristone, qui devrait probablement faire l'objet d'une nouvelle procédure d'appel.

Y A-T-IL D'AUTRES ACTIONS EN JUSTICE CONCERNANT L'AUTORISATION DE LA MIFÉPRISTONE ?

Oui. La semaine dernière, des avorteurs de Virginie, du Kansas et du Montana ont intenté une action en justice contre la FDA, similaire à celle intentée par les États démocrates à Washington.

Le mois dernier, GenBioPro a poursuivi la FDA devant le tribunal fédéral de Baltimore, afin d'obtenir une ordonnance interdisant à l'agence de retirer le médicament du marché sans passer par une procédure formelle donnant à l'entreprise la possibilité d'être entendue.

GenBioPro affirme que la FDA ne peut pas simplement suspendre l'approbation sans une telle procédure, "quelles que soient les tentatives d'ingérence extérieures". Si elle aboutissait, cette action en justice créerait un autre conflit potentiel avec toute ordonnance future restreignant la mifépristone.

GenBioPro conteste également l'interdiction de l'avortement en Virginie occidentale dans une autre action en justice, tandis qu'un médecin de Caroline du Nord conteste les restrictions imposées à la mifépristone dans cet État. Les deux actions en justice affirment que les lois de l'État sont en contradiction avec l'approbation de la mifépristone par la FDA.

QUAND L'AFFAIRE DU TEXAS SERA-T-ELLE DÉFINITIVEMENT TRANCHÉE ?

Une fois que tous les appels concernant l'injonction préliminaire seront terminés, l'affaire pourra être jugée sur le fond par M. Kacsmaryk, ce qui donnera aux deux parties la possibilité de présenter des éléments de preuve. Les deux parties auront ainsi l'occasion de présenter des éléments de preuve, notamment sur la procédure suivie par la FDA pour approuver la mifépristone et sur les antécédents du médicament en matière de sécurité.

M. Kacsmaryk peut ensuite statuer sur l'affaire sans procès (jugement sommaire) ou tenir un procès avec témoignages.

Le jugement final de Kacsmaryk pourrait ne pas être rendu avant des mois, voire des années. Une fois qu'il aura été rendu, la partie perdante aura à nouveau la possibilité de faire appel auprès de la cinquième instance et, éventuellement, de la Cour suprême.