par Kevin Yao et Samuel Shen

PEKIN/SHANGHAI, 19 août (Reuters) - L'annonce ce week-end par la Chine d'une importante réforme de ses taux d'intérêt a renforcé les anticipations de baisse du coût du crédit aux entreprises, une perspective qui a soutenu les marchés boursiers du pays pour la première séance de la semaine.

La Banque populaire de Chine (BPC) a annoncé samedi la réforme de son mécanisme de taux préférentiel de prêt (TPP), attendue de longue date dans le contexte du ralentissement de la croissance de l'économie et des tensions commerciales avec les Etats-Unis.

Pour les analystes, le nouveau TPP, qui entrera en vigueur dès mardi, sera inférieur au niveau du taux actuel, soit 4,31%, mais les avis divergent sur l'ampleur et la rapidité de la baisse des coûts de financement des entreprises.

Pékin a injecté en masse des liquidités dans son système financier depuis un an pour soutenir la croissance tout en pilotant à la baisse les taux à court terme; pour autant, la demande de prêts et les nouveaux investissements sont restés relativement contenus, freinés par la baisse de confiance des chefs d'entreprise et les craintes de dégradation de la qualité du crédit dans le secteur bancaire.

Le nouveau mécanisme dévoilé samedi prévoit que les taux des crédits bancaires seront liés au TPP, lui-même lié au taux de la facilité de prêt à moyen terme de la BPC, ce qui devrait se traduire par une amélioration du mécanisme de transmission de la politique monétaire, explique Ma Jun, un conseiller de la banque centrale.

"A l'avenir, si le taux directeur baisse, le taux des prêts baissera aussi, ce qui aidera à réduire les coûts de financement des entreprises", a-t-il déclaré selon des propos publiés par le site internet de la radio d'Etat.

Les Bourses chinoises ont fini en nette hausse lundi après cette annonce: l'indice SSE Composite de Shanghai a gagné 2,1% et le CSI 300 des principales capitalisations de Chine continentale 2,17%, tout comme le Hang Seng à Hong Kong.

L'AMPLEUR DE LA BAISSE DE TAUX DIFFICILE À ÉVALUER

Certains analystes estiment toutefois que la réforme n'équivaut pas réellement à une baisse du TPP, les banques conservant la possibilité de fixer des taux plus élevés pour les prêts jugés plus risqués, notamment aux petites et moyennes entreprises.

"Le nouveau système en lui-même ne garantit pas que le taux de crédit effectif sera plus bas", juge ainsi Goldman Sachs dans une note. "Mais au vu de la situation actuelle de faiblesse de la croissance, de montée des risques de guerre commerciale et de volonté forte des principaux dirigeants de réduire les taux, nous prévoyons bien une baisse des taux effectifs de prêt."

Pour Australia and New Zealand Banking Group, la réforme équivaut à une baisse de 45 points de base des taux des prêts. De son côté, la Société générale estime que le nouveau mécanisme pourrait conduire à une réduction de 10 à 25 points de base du nouveau taux de référence.

A partir de mardi, les banques devront fixer les taux des crédits qu'elles accordent en utilisant le nouveau TPP comme référence pour les prêts à taux variable plutôt que le taux directeur de la BPC.

Le marché attend donc de voir à quel niveau sera fixé le TPP mardi. Les taux seront publiés à un rythme mensuel.

Ming Ming, directeur de la recherche taux fixes chez CITIC Securities à Pékin, dit s'attendre à ce que le nouveau taux soit fixé mardi de manière à réduire l'écart entre le TPP et le taux de la facilité de prêt à moyen terme de BPC, fixé actuellement à 3,3%. Cet écart est aujourd'hui de 101 points de base.

Certains observateurs estiment que la banque centrale pourrait réduire le taux à un an de sa facilité de prêt afin de favoriser la baisse des taux des crédits.

La BPC a créé le TPP en 2013 pour suivre les taux accordés par les banques à leurs meilleurs clients mais il a jusqu'à présent peu réagi à l'évolution de l'offre et de la demande, restant proche du taux de crédit de référence à un an, fixé à 4,35%.

(Marc Angrand pour le service français)