Les valeurs technologiques et de croissance à très forte capitalisation ont repris le leadership du marché américain ces dernières semaines. Pourtant, selon les investisseurs, plusieurs facteurs pourraient permettre à un groupe plus large d'actions de surperformer d'ici la fin de l'année.
Après que les actions technologiques, menées par un petit groupe surnommé les « Magnificent Seven », ont propulsé les indices boursiers à la hausse en 2023 et 2024, une grande partie de Wall Street s'attendait à ce qu'un éventail plus large de titres tire son épingle du jeu cette année.
Après un début d'année 2025 difficile, les « Magnificent Seven » ont effectué un retour en force, portés par un rebond général des actions, lui-même alimenté par l'apaisement des tensions commerciales. Ce groupe, qui inclut Microsoft, Meta Platforms et Apple, a représenté plus de 40 % du rendement total du S&P 500 depuis la clôture du 8 avril, date à laquelle les marchés ont commencé à se redresser après la déclaration-choc du président américain Donald Trump sur les tarifs douaniers lors du « Liberation Day » du 2 avril, selon Howard Silverblatt, analyste principal des indices chez S&P Dow Jones Indices.
Le secteur technologique a reçu un nouvel élan jeudi avec la progression de 3 % de Nvidia, autre membre du Mag 7, après que le fabricant de puces d'IA a publié des résultats trimestriels supérieurs aux attentes.
Mais les investisseurs estiment que des valorisations plus attractives et un contexte de bénéfices en amélioration devraient permettre à un groupe plus large d'actions de bien performer, tant que l'économie évite un ralentissement marqué dans les prochains mois.
« En début d'année, nous étions plutôt prêts à voir une participation plus large au marché », explique Michael Reynolds, vice-président de la stratégie d'investissement chez Glenmede.
« Nous pensons que cette dynamique reste relativement intacte : la croissance des bénéfices du reste du marché pourrait être compétitive par rapport à certaines de ces grandes valeurs technologiques et soutenir les rendements jusqu'à la fin de l'année. »
Le marché américain montre d'ailleurs des signes d'élargissement de ses gains. Les secteurs les plus performants du S&P 500 depuis le début de l'année sont l'industrie, les biens de consommation courante, les services aux collectivités et la finance.
Après avoir nettement sous-performé les deux années précédentes, la version équipondérée du S&P 500 - qui reflète la performance moyenne des valeurs de l'indice - s'aligne davantage en 2025 sur le S&P 500 classique, pondéré par la capitalisation et donc plus influencé par les grandes valeurs.
Cependant, ces dernières semaines, les Mag 7 ont de nouveau surperformé, comme en 2023 et 2024 où ils représentaient plus de la moitié du rendement sur deux ans de 58 % du S&P 500.
Alors que le S&P 500 a progressé de plus de 18 % depuis ses creux d'avril, un ETF couvrant les Magnificent Seven - qui inclut également Amazon, Alphabet et Tesla - a bondi de plus de 30 %.
Une solide saison de résultats au premier trimestre a soutenu ces titres, qui avaient été particulièrement chahutés en début d'année en raison des inquiétudes liées à l'intelligence artificielle et aux conséquences économiques des tarifs douaniers imposés par Trump.
En effet, même si Nvidia a publié un nouveau trimestre record, le fabricant de puces d'IA a également mis en garde contre de nouveaux risques liés au conflit technologique entre les États-Unis et la Chine.
Avec ce rebond, les valorisations des Magnificent Seven sont également devenues plus élevées. Le ratio médian cours/bénéfice du groupe atteignait mercredi environ 28 fois les bénéfices estimés sur les 12 prochains mois, après avoir chuté jusqu'à 22,2 en avril, selon LSEG Datastream. Le S&P 500, incluant les Magnificent Seven, affichait un ratio de 21,4.
Michael O'Rourke, stratégiste en chef chez JonesTrading, estime que ces grandes capitalisations ont récemment bénéficié de l'appétit des investisseurs pour une exposition rapide aux actions, stimulés par les annonces favorables sur les tarifs douaniers, en achetant des fonds répliquant des indices comme le S&P 500, où ces valeurs pèsent lourd, ou en achetant directement ces titres.
« Il est plus simple d'opter pour l'indice ou pour les grandes valeurs de l'indice, car elles sont liquides et l'exposition peut être rapidement augmentée », explique O'Rourke.
Toutefois, il souligne que de nombreuses autres grandes capitalisations se négocient à des niveaux bien plus attractifs.
« La dynamique de marché dictée par les gros titres doit s'estomper, » ajoute-t-il. « Quand le marché sera moins focalisé sur le commerce et la géopolitique, cela permettra à l'élargissement de reprendre. »
Pour combler leur retard, le reste du S&P 500 devra réduire l'écart de croissance des bénéfices avec les Mag 7.
En 2024, les bénéfices des Magnificent Seven ont progressé de 36,9 % contre une hausse de 7 % pour le reste du S&P 500, selon Tajinder Dhillon, analyste principal chez LSEG. Cette année, l'écart devrait se resserrer, avec une croissance attendue de 15,9 % pour les Mag 7 contre 6,5 % pour le reste de l'indice.
« Toute la croissance des bénéfices était concentrée dans ces grandes valeurs, mais on commence à voir un élargissement de la croissance des résultats », observe Chris Fasciano, stratégiste en chef chez Commonwealth Financial Network.
Commonwealth recommande d'ailleurs aux investisseurs de diversifier leur exposition aux actions, notamment vers les secteurs financiers et industriels, ainsi que vers les valeurs de taille moyenne, précise Fasciano.
Cependant, les actions du Mag 7 pourraient conserver leur popularité si Wall Street venait à craindre un ralentissement économique important, ces titres étant devenus ces dernières années une sorte de valeur refuge pour les investisseurs. Leurs activités sont jugées relativement résilientes face à l'environnement macroéconomique, et leur solidité financière continue d'attirer.
Une croissance économique stable sera donc cruciale pour les secteurs sensibles à la conjoncture comme l'industrie, les matériaux et la finance.
« Une meilleure croissance sera le déclencheur d'un élargissement plus durable et d'une participation accrue », conclut Garrett Melson, stratégiste de portefeuille chez Natixis Investment Managers.