OSLO (Reuters) - La Russie ne peut pas empêcher l'Ukraine de devenir un jour membre de l'Otan, a déclaré jeudi le secrétaire général de l'alliance militaire atlantique, même si des divergences entre pays membres de l'organisation sur le calendrier d'une telle adhésion apparaissent de plus en plus au grand jour à quelques semaines d'un sommet en Lituanie.

Le président ukrainien Volodimir Zelensky a pour sa part maintenu la pression sur l'Otan en réclamant une décision "claire" lors de ce sommet de Vilnius prévu mi-juillet.

Soucieux de dissiper tout signe de discorde au sein de l'alliance, son secrétaire général Jens Stoltenberg a assuré, à l'entame d'une réunion de deux jours des ministres des Affaires étrangères des pays membres à Oslo, que "tous les alliés conviennent que Moscou n'a pas de droit de veto contre l'élargissement de l'Otan".

"Nous avançons, tous les alliés conviennent que l'Ukraine deviendra membre (de l'Otan)", a-t-il ajouté devant les journalistes.

Les pays membres de l'Otan ont entériné en 2008 l'objectif d'une adhésion de l'Ukraine à l'organisation à condition de mettre en oeuvre un ensemble de réformes. Aucune échéance précise n'a toutefois été fixée et le processus n'a guère progressé jusqu'à l'invasion de l'Ukraine par la Russie en février 2022.

Cette invasion a amené Volodimir Zelensky à réclamer avec insistance une adhésion de son pays à l'Otan, dont la plupart des membres, au premier rang desquels les Etats-Unis, lui apportent un puissant soutien militaire face à Moscou.

Les dirigeants de l'Otan ont prévu de réaffirmer avec force leur soutien à l'Ukraine lors du sommet de Vilnius. Mais à six semaines de ce rendez-vous, les alliés peinent à s'entendre sur ce qu'ils peuvent précisément proposer à l'Ukraine.

TRACER UNE VOIE CLAIRE

Si les pays d'Europe de l'Est, en particulier, réclament des mesures concrètes pour rapprocher l'Ukraine d'une adhésion à l'Otan, d'autres comme les Etats-Unis ou l'Allemagne mettent en garde contre toute initiative susceptible d'être interprétée par la Russie comme une entrée en guerre de l'alliance.

Le ministre lituanien des Affaires étrangères, Gabrielius Landsbergis, a rappelé, en référence également à l'annexion russe de la Crimée et au conflit dans le Donbass depuis 2014, que l'Ukraine avait déjà subi deux invasions depuis 2008.

"Il est grand temps que nous nous retrouvions véritablement autour de la table et que nous trouvions une réponse très concrète sur la manière dont l'Ukraine va se rapprocher de l'Otan et quand elle deviendra un membre de l'alliance", a-t-il dit.

Son homologue estonien Margus Tsahkna a fait écho à ces propos en exhortant les alliés à tracer une voie claire en vue d'une adhésion de l'Ukraine à l'Otan et à fournir à ce pays de puissantes garanties de sécurité pour l'après-guerre, afin de ne pas offrir à la Russie la moindre "zone grise" à exploiter.

Le président français Emmanuel Macron a pour sa part invité mercredi, lors d'un déplacement en Slovaquie, à être "beaucoup plus ambitieux" pour "donner à l'Ukraine les moyens d'empêcher toute nouvelle agression" et l'inclure dans une "architecture de sécurité crédible".

D'autres pays comme l'Allemagne et le Luxembourg ont en revanche souligné les risques d'une adhésion précipitée de l'Ukraine à l'Otan.

"La politique de porte ouverte de l'Otan demeure mais dans le même temps, il est évident que nous ne pouvons pas débattre de l'acceptation de nouveaux membres (qui sont) en plein milieu d'une guerre", a dit la ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena Baerbock.

Le Luxembourgeois Jean Asselborn a pour sa part mis en garde sur le fait que la clause d'assistance mutuelle de l'Otan signifierait une entrée en guerre contre la Russie si l'alliance acceptait l'Ukraine en son sein avant la fin des combats.

(Reportage par Sabine Siebold, Gwladys Fouche et Terje Solsvik à Oslo, Benoit Van Overstraeten à Paris, Alezander Tanas à Chisinau et Olena Harmash à Kyiv; version française Zhifan Liu et Bertrand Boucey, édité par Tangi Salaün)

par Sabine Siebold et Gwladys Fouche