Telle une piqûre de rappel, la volatilité est revenue semer le trouble sur les marchés actions, appelant les opérateurs à la prudence et à des prises de bénéfices. A ce titre, sur la première semaine du mois de février, le VIX, indicateur de la peur, a littéralement explosé de 150%, découlant d’une vive baisse du S&P500 de l’ordre de 6,5%. Pour autant, l’or n’a pas tiré profit de ce regain d’aversion au risque. Au contraire, le métal doré a bel et bien lâché 2% sur la période, principalement pénalisé par une hausse de sa contrepartie en dollar. Soulignons néanmoins que ces violents mouvements de baisse appellent les opérateurs à récupérer du cash pour faire face à leurs appels de marge. La volatilité prend ainsi de court les opérateurs, qui doivent prendre des bénéfices ou bien couper des positions sur d’autres actifs pour faire face à leurs engagements. Cela ne rime donc pas forcément avec un réel besoin de sécurité, la nuance est importante puisqu’elle ne remet pas en cause le caractère refuge de l’or.

De même, le progressif retour de l’inflation, cristallisé autour d’une hausse des prix des matières premières (notamment du pétrole et des métaux de base) et d’une légère croissance des salaires dans les pays avancés, devrait profiter à l’once d’or, traditionnellement refuge contre l’érosion de la valeur des actifs financiers. Force est de constater qu’il n’en est rien. Il convient ainsi de s’intéresser aux taux réels en vigueur sur le marché obligataire, qui demeurent dans leur globalité largement positifs compte tenu du resserrement des politiques monétaires de la Réserve fédérale. Par conséquent, l’or, qui par définition ne délivre aucun rendement, ne demeure pas attractif. Plus concrètement, pour un degré de liquidité similaire, l’arbitrage entre un placement sur un bon du trésor américain qui apporte du rendement, et une once d’or qui n’en délivre pas tendra nécessairement vers le premier choix.

En conséquence, la demande d’or s’est affaissée en 2017 (4071 tonnes en 2017 versus 4400 en 2016), impactée par une baisse significative des détentions pour motifs d’investissement (voir graphique).

Demande d’or classée par contributions
 
*Banques Centrales et autres Institutions
*ETF et produits similaires
*Lingots et pièces d’or
*Secteur des technologies
*Bijouterie

Selon les données du World Gold Council, la baisse de la demande d’or résulte d’une forte chute des flux d’ETF adossés à la relique barbare. Chiffre à l’appui, les entrées annuelles sur ces ETF ont chuté de 63% en un an (202,8 tonnes en 2017 versus 545,8 en 2016), la tendance étant aux achats d’actifs risqués.

Toutes ces raisons font qu’il n’y a aucune raison pour que l’or ne prenne de la valeur. Son prix reste ainsi entièrement tributaire de sa contrepartie en devise.

Pour autant, tout n’est pas si noir pour les acheteurs d’or. En s’attardant sur les autres composantes de sa demande, on peut aisément relever une nette croissance de la demande de bijoux en or, en hausse de 4% en 2017 (à 2135 tonnes) grâce à une vigoureuse sollicitation de la part de l’Inde (+12%) et de la Chine (+3%). En outre, ces mêmes bassins de consommation tirent à la hausse la demande de lingots et de pièces d’or qui se stabilise à 1029 tonnes avec une croissance de respectivement 8% et 2% pour la Chine et l’Inde.

Enfin, détail de haute importance, l’offre plafonne (à 4398 tonnes en 2017). Celle-ci est composée de la production minière, à laquelle on doit y ajouter le recyclage. Si l’offre émanant du recyclage est relativement imprévisible, celle de la production minière l’est nettement moins. Elle dépend en effet principalement des investissements dans le secteur minier (en berne du fait de la fragilité financière des principaux acteurs), de la teneur moyenne des nouvelles exploitations aurifères (de plus en plus faible) et de la réglementation environnementale (de plus en plus stricte). L’ensemble de ces éléments prête à penser qu’une baisse de l’offre dans les prochaines années demeure envisageable (voir graphique).



Croissance de la production aurifière dans le monde

 
Il appert qu’un déséquilibre offre/demande peut facilement prendre forme en cas d’un retour massif des flux d’ETF adossés sur le métal doré. Il est bien évidemment encore trop tôt pour parler de pénurie, qui supposerait de grandes frictions sur les marchés actions, mais ce scénario ne doit pas être mis de côté. Autant de raisons pour ne pas délaisser cet actif, qui pourrait surprendre en 2018.

D’un point de vue graphique, l’or évolue au sein d’une large bande horizontale cadrée entre 1200 et 1370 USD. La tendance reste donc à la neutralité. On attendra une sortie de ce trading range pour agir dans un sens comme dans l’autre. Une sortie par le haut constituerait un véritable signal d’achat qui permettrait d’ouvrir des positions longues afin de viser la cible théorique des 1500 USD. Au contraire, un enfoncement des 1200 USD militerait pour une franche correction avec comme cible les plus bas de 2016.

 

Evolution des cours de l’or en données hebdomadaires