Nous ne reviendrons pas dans ces colonnes sur les tentatives (désespérées ?) du gouvernement Trump de faire machine arrière tant sur les droits de douane à l’égard de la Chine, jugés "non viables" par l’adulte dans la salle, Scott Bessent, que sur le maintien du président de la Réserve fédérale jusqu’au terme de son mandat en 2026. NON. Nous préférons nous concentrer sur l’accueil, assez froid il faut bien le dire, du marché obligataire à toutes ces gesticulations politico-médiatiques.
Depuis plusieurs jours, le rendement du 10 ans américain fait du surplace autour des 4.3% au lieu de se détendre alors même que les indices actions tentaient un rebond et que l’emballement sur l’or semblait avoir atteint un climax. Si le marché veut y croire, la classe d’actifs obligataire joue la prudence. Elle attend des éléments concrets de réassurance sur les droits de douane qui n’alimenteront ni l’inflation ni ne grèveront la croissance. A ce stade, il faudra donc encore être un peu patient.
Une autre manière d’appréhender la tension observée sur le marché obligataire tient en un seul mot : les swaps spreads. Kesako me direz-vous ? Sous ce nom barbare, se cache en réalité la différence entre le taux swap (taux fixe d’un swap de taux d’intérêt) et le rendement d'une obligation d'État de même maturité (souvent un Bund pour l’euro, un Treasury pour le dollar, etc.). Il mesure le risque de crédit, le swap n’étant pas garanti comme une obligation d’Etat, la liquidité, les swaps étant moins liquides que les obligations d’Etats, et la perception du risque systémique. Or actuellement, on observe un phénomène contre intuitif, non seulement en Europe mais surtout aux Etats-Unis : les swaps spreads sont négatifs (ou inversés).

En d’autres termes, les investisseurs considèrent le swap comme moins risqué qu’un emprunt d’Etat. Il existe quatre explications possibles d’une telle situation :
- Forte demande pour les obligations d’Etats
- Problèmes techniques sur le marché obligataire (déséquilibre entre l’offre et la demande)
- Evolution du risque perçu sur les banques vs Etats 👈
- Effets de la réglementation et des exigences en collatéral
Celle qui, dans l’environnement actuel, concentre toute notre attention est la troisième car il traduit l’augmentation du risque de défaut, notamment en raison des débats autour du plafond de la dette. Une poursuite de l’inversion est donc un phénomène anormal préoccupant que les gouvernements seraient bien avisés d’adresser.