Même si le groupe suisse possède certains des laboratoires de recherche et de développement les plus réputés de l'industrie pharmaceutique, il bataille actuellement pour augmenter ses ventes de médicaments à mesure que son portefeuille de traitements biotechnologiques vieillit et que la concurrence s'intensifie.

Severin Schwan, directeur général de Roche, a déclaré à Reuters être confiant dans la capacité du groupe à surmonter le creux de ses ventes mais il anticipe seulement une "croissance modérée" en 2019, avec de nouveaux médicaments comme l'Ocrevus contre la sclérose en plaques, avant une accélération vers 2021-2022.

"Si vous connaissez une évolution de portefeuille aussi marquée que la nôtre maintenant, vous devez bien sûr réaffecter les ressources de manière plus radicale", a-t-il dit. "C'est ce que nous faisons."

L'entreprise devra agir vite pour résister. Roche estime qu'il pourrait avoir à combler une perte de 10 milliards de dollars (8,56 milliards d'euros) de chiffre d'affaires d'ici 2022 en raison de la concurrence sur le segment des traitements contre le cancer, qu'il a longtemps dominé.

Ses trois traitements les plus vendus - tous destinés à soigner le cancer - ont représenté des ventes combinées de 21 milliards de dollars en 2017, soit 40% du chiffre d'affaires total du groupe.

Mais ces médicaments - Rituxan, Herceptin et Avastin - perdent désormais du terrain au profit de biosimilaires, des copies bon marché fabriquées par des concurrents tels que le suisse Novartis et le sud-coréen Celltrion.

De plus, un important brevet technologique arrivera à expiration l'année prochaine, un manque de 600 millions supplémentaires dans le flux de trésorerie.

En Europe, où les biosimilaires progressent déjà, la réduction des coûts est plus avancée, certaines opérations commerciales étant réduites.

Désormais, les Etats-Unis sont sur la sellette. Roche va supprimer 223 postes sur son site de Genentech, à San Francisco. La société rationalise également ses divisions à travers le monde, dans le cadre d'une initiative distincte susceptible d'affecter de nombreux emplois.

Les investisseurs devraient apprécier. "Il est possible d'améliorer l'efficacité de l'entreprise", déclare Alistair Campbell, analyste chez Berenberg.

STRATÉGIE D'ACQUISITIONS

Pourtant, Roche entend préserver sa recherche et développement (R&D) et reste fidèle sa stratégie consistant à renforcer son portefeuille de médicaments en privilégiant des acquisitions petites ou moyennes.

Un Roche relativement différent pourrait naître de ces changements, une fois débarrassé de l'ombre des biosimilaires. Les médicaments hors cancer pourraient y tenir un rôle de plus en plus important, une tendance déjà amorcée avec le traitement Ocrevus, contre la sclérose en plaques, et l'Hemlibra, contre l'hémophilie.

En particulier, alors que d'autres groupes, dont Pfizer , se sont éloignés des neurosciences, Roche espère reconstituer son portefeuille avec des médicaments contre l'autisme, la maladie d'Alzheimer et la maladie de Huntington.

Malgré la difficulté, Roche estime que sa compréhension des dernières découvertes scientifiques lui permettra d'être autant reconnu pour les traitements des troubles du cerveau et du système nerveux que pour le cancer.

"Il existe réellement une chance raisonnable de nous diversifier dans d'autres domaines de manière significative", a dit Severin Schwan.

La R&D sur le cancer se poursuit néanmoins.

Severin Schwan a reconnu que le Tecentriq, traitement par immunothérapie contre le cancer, avait perdu du terrain face au Keytruda de Merck & Co mais il continue à voir d'importantes nouvelles opportunités, notamment dans certaines formes de cancer du sein difficiles à traiter.

(Catherine Mallebay-Vacqueur pour le service français, édité par Bertrand Boucey)

par John Miller et Ben Hirschler

Valeurs citées dans l'article : Merck and Company, Novartis, Pfizer, Celltrion, Inc.