Londres (awp/afp) - Rolls-Royce, l'une des marques les plus emblématiques du monde automobile, compte sur son nouveau modèle Ghost, lancé mardi, pour l'aider à surmonter le marasme du Covid-19.

Mais son patron s'attend à une crise durable avec un retour à la normale "d'ici à trois ans".

Pour sa nouvelle berline équipée d'un moteur bi-turbo V12 de 6,75 litres et au design qui se veut minimaliste, le constructeur vise une clientèle d'affaires à travers le monde.

"Nous avons rajeuni massivement la marque ces dix dernières années et l'âge moyen de notre clientèle est de 43 ans" assure le directeur général de Rolls-Royce, Torsten Müller-Ötvös lors d'un entretien téléphonique avec l'AFP.

Ces multimillionnaires ou milliardaires devront débourser au minimum 250.000 euros hors taxes pour une Ghost dans sa version la plus épurée, mais l'addition peut atteindre plusieurs millions pour les options les plus extravagantes: des téléviseurs ou un système audio "exceptionnel", de la marqueterie ou des cuirs précieux ou encore un plafonnier lumineux reproduisant la voute céleste du moment de votre naissance.

Détail "british": chaque voiture est vendue avec un parapluie aux couleurs de la marque, rangé dans un étui intégré avec système de drainage pour ne pas mouiller l'intérieur.

Ventes en chute

Pour Rolls-Royce, l'une des plus prestigieuses marques de voiture au monde, le virus a toutefois provoqué une tempête dans un ciel déjà obscurci par le Brexit.

"Bien sûr nous avons été touchés. D'une part beaucoup de nos partenaires dans le monde, nos concessionnaires, ont été forcés de fermer" pendant de longues semaines ou mois de confinement, souligne M. Müller-Ötvös.

D'autre part, "nous avons vu un grand nombre de clients potentiels reconsidérer leur décision d'achat", particulièrement en avril et mai, poursuit-il. Résultat: les ventes du premier semestre étaient inférieures de "probablement 30% à celles de l'an dernier à la même époque", constate le dirigeant.

Il précise toutefois que cette baisse a été accentuée par un effet comparatif défavorable avec une année "record" l'an dernier, quand le constructeur avait écoulé "plus de 5.000 voitures".

La sortie de la Ghost devrait toutefois redonner un coup de fouet aux ventes, d'autant que "nous voyons l'activité reprendre" dans le monde, note M. Müller-Ötvös.

Inquiétude du Brexit

Le carnet de commandes regagne suffisamment de couleurs pour que la deuxième ligne de production de l'usine de Goodwood, au sud du Royaume-Uni, reprenne du service à compter de la semaine prochaine, fait-il valoir, relevant que le constructeur n'a licencié personne depuis le début de la crise sanitaire.

Le dirigeant se dit "prudemment optimiste pour l'an prochain" au vu des nombreuses incertitudes: "nous nous attendons à ce que le Covid-19 reste (une difficulté) pendant un certain temps, jusqu'à ce qu'un vaccin soit disponible".

L'agence de notation Moody's table sur une chute de 14% du marché automobile mondial cette année et estime qu'un rebond est "probable" en 2021 mais qu'il dépendra de la rapidité avec laquelle la pandémie atteindra son pic.

"A moyen terme, je dirais d'ici trois ans, nous devrions être de retour à la normale, et même mieux que la normale", non seulement pour Rolls-Royce mais aussi pour le marché des voitures de luxe, prédit pour sa part M. Müller-Ötvös.

Fondée au début du XXe siècle, la marque rachetée en 1998 par le géant sectoriel allemand BMW fait toutefois face à un autre défi: le Brexit, à l'heure où les discussions bilatérales UE-Royaume-Uni piétinent.

Le patron de Rolls-Royce a affirmé déjà maintes fois ses inquiétudes face à la perspective d'une sortie britannique de l'UE sans accord.

"Ma plus forte inquiétude est de voir une chaine d'approvisionnement perturbée", le fabricant de voitures de luxe revendiquant 600 fournisseurs dans le monde, souligne M. Müller-Ötvös.

Il affirme néanmoins que l'entreprise est "pleinement préparée", ayant travaillé en amont avec les fournisseurs pour anticiper d'éventuels durcissement de la législation des importations au Royaume-Uni, et a également augmenté ses stocks de pièces détachées, entre autre.

Le constructeur britannique faisait autrefois partie du même groupe que le conglomérat industriel du même nom, spécialiste des moteurs d'avions, mais les deux entités ont été séparées au début des années 1970 et constituent désormais des entreprises complètement indépendantes.

afp/rp