par Josephine Mason et Veronica Brown

LONDRES, 13 janvier (Reuters) - La chute des cours du cuivre à leurs plus bas niveaux depuis cinq ans entraîne des pertes pour au moins un dixième des producteurs mondiaux de métal rouge sans être encore suffisante pour déclencher une forte réduction des capacités.

Les cours du cuivre sur le London Metal Exchange ont accentué leur chute mardi au lendemain de leur passage sous le seuil des 6.000 dollars la tonne pour la première fois depuis octobre 2009. Ils reculent en parrallèle avec ceux du pétrole en raison d'inquiétudes similaires sur un excédent d'offre.

Le recul de 16% des cours du cuivre depuis le mois de juillet est le plus marqué depuis 2013.

Sur le marché pétrolier, l'effondrement de 60% des cours du brut depuis l'été a poussé les compagnies à réduire leurs programmes de forage pour cette année. Pour les mineurs de cuivre, il faudrait une baisse de 1.000 dollars supplémentaires par tonne pour remettre sérieusement en cause les projets d'investissement.

Une chute des cours sur des niveaux de 5.000 dollars la tonne serait beaucoup plus difficile à supporter dans la durée, prévient Robert Edwards du cabinet de conseil CRU, spécialisé dans les industries extractives. A ces niveaux, un quart des producteurs de cuivre seraient dans le rouge, estime-t-il ajoutant que de réelles réductions de capactiés interviendraient alors.

Actuellement environ 10% seulement des mineurs de cuivre sont dans le rouge mais certains projets nouveaux ont déjà été affectés. Ainsi Antofagasta va fermer sa mine de Michilla au Chili qui n'est plus rentable.

Barrick Gold Corp a averti le mois dernier qu'il suspendrait les activités de sa mine de Lumwana en Zambie si les autorités du pays mettaient en oeuvre leur projet de porter de 6% à 20% les royalties perçues sur les mines en exploitation.

"Si, comme il est attendu, les prix du cuivre restent sous pression dans les prochains mois, d'autres producteurs, dont les coûts sont élevés, pourraient décider de suivre le mouvement", a déclaré Bruce Allway, de GFMS, un service d'information spécialisé sur le secteur des métaux, filiale de Thomson Reuters.

Il estime qu'à un cours de 5.660 dollars la tonne, les 10% des mineurs de cuivre dont les coûts, amortissement compris, sont les plus élevés sont juste à l'équilibre.

La pression baissière sur les cours devrait se maintenir au moins jusqu'au nouvel an lunaire chinois en février, période pendant laquelle la demande se contracte avec le ralentissement de l'activité industrielle en Chine.

LE SPECTRE DE LA CRISE FINANCIÈRE

Si la baisse des cours de cuivre a commencé en juillet dernier, elle s'est accélérée depuis le début de l'année, un mouvement qui a rappelé à certains intervenants le souvenir de la crise financière de 2008.

Les cours étaient alors brièvement tombés sous les 3.000 dollars la tonne avec l'effondrement de la demande pour les câbles et les tuyaux en cuivre utilisés dans la construction et l'automobile.

Il est trop tôt pour faire le parallèle avec 2008, estime toutefois Robert Edwards. A l'époque, les producteurs avaient renoncé à des projets et fermé certaines mines parmi les plus coûteuses à exploiter, rappelle-t-il, mais leur réponse avait été lente et d'ampleur limitée tant ils étaient réticents à réduire la production même s'ils perdaient de l'argent.

A la fin 2009, les cours avaient d'ailleurs plus que doublé, atteignant 7.500 dollars la tonne en décembre, la Chine raflant le cuivre disponible pour alimenter ses réserves stratégiques à des cours qu'elle considérait comme une bonne affaire.

Cette fois les prix ont reculé de manière plus lente mais plus régulière sous l'effet du ralentissement de l'économie chinoise.

Pour Vivienne LLoyd, analyste qui suit les métaux de base pour Macquarie, le marché est proche de son point bas et pourrait connaître un retournement, les excédents se réduisant avec la baisse de la production. Les producteurs ont déjà coupé dans les budgets de développement de nouveaux projets au cours des deux dernières années.

Il n'en reste pas moins que les producteurs en Zambie, au Chili et en Chine, dont les coûts sont parmi les plus élevés au monde, sont particulièrement vulnérables à un nouveau recul des cours, soulignent des analystes.

Au Chili, premier producteur mondial de métal rouge, les producteurs sont confrontés depuis des années à la baisse en teneur du minerai extrait de mines vieillissantes.

"Il ne fait pas de doute que certains des producteurs auc coûts les plus élevés sont fragilisés, ceux opérant en Zambie étant les plus sévèrement touchés", souligne Bruce Allway. (avec Harpreet Bhal à Londres, Marc Joanny pour le service français, édité par Véronique Tison)

Valeurs citées dans l'article : Barrick Gold Corp., Antofagasta plc