(Actualisé avec détails)

par Silvia Aloisi et Steve Scherer

ROME, 25 juin (Reuters) - Le gouvernement italien a entamé dimanche la procédure de liquidation de deux banques vénètes, Banca Popolare di Vicenza et de Veneto Banca, dans le cadre d'un montage qui prévoit le transfert des actifs sains des établissements à Intesa Sanpaolo et qui pourrait coûter jusqu'à 17 milliards d'euros à l'Etat.

Rome va verser 5,2 milliards d'euros à Intesa Sanpaolo, première banque de détail en Italie, pour que cette dernière reprenne les actifs sains de Banca Popolare di Vicenza et de Veneto Banca.

Le ministre de l'Economie Pier Carlo Padoan a précisé que le total des fonds "mobilisés" par l'Etat pourrait s'élever à jusqu'à 17 milliards d'euros, soit trois fois le montant qui avait été retenu dans le cadre d'un projet de recapitalisation des deux banques avec de l'argent public.

La Commission européenne avait donné vendredi son feu vert provisoire au plan italien de mise en liquidation des deux banques à l'aide de fonds publics, permettant ainsi à l'Italie de régler à sa manière cette crise, dernière en date d'un secteur bancaire italien ployant sous les créances douteuses.

Bruxelles souligne que le plan italien ne constitue pas une aide publique à Intesa Sanpaolo, ajoutant qu'il retirait un total de 18 milliards d'euros de créances douteuses du secteur bancaire italien.

Le coût pour les contribuables italiens promet cependant d'être très élevé.

"Que ceux qui nous critiquent nous disent quelle aurait été une meilleure alternative. Je n'en vois pas", a déclaré Pier Carlo Padoan lors d'une conférence de presse qui a suivi une réunion du gouvernement au cours de laquelle Rome a approuvé le décret permettant la liquidation de Banca Popolare di Vicenza et de Veneto Banca.

Le vote de ce décret signifie concrètement que les agences des deux banques ainsi que ses employés feront partie dès lundi du groupe Intesa Sanpaolo, un transfert d'activités qui devrait éviter que les clients ne se précipitent pour retirer leurs dépôts.

Le décret devra recevoir force de loi du Parlement d'ici 60 jours.

LES DÉTENTEURS DE DETTE "SENIOR" ET LES DÉPOSANTS ÉPARGNÉS

Selon les termes du plan de liquidation, les mauvaises créances des deux établissements ainsi que les risques juridiques liés à l'indemnisation de dizaines de milliers d'actionnaires individuels mécontents seront versées dans une structure de défaisance ("bad bank"), qui sera en partie financée par l'Etat.

Les détenteurs de titres de dette subordonnée ainsi que les actionnaires devraient perdre des plumes dans le cadre de ce plan. En revanche, les porteurs de dette principale et les déposant seront à l'abri de toute perte.

Pier Carlo Padoan a précisé qu'en plus des 5,2 milliards payés à Intesa, dont 1,2 milliard pour couvrir des suppressions de postes, l'Etat offrira des garanties additionnelles pouvant aller jusqu'à 12 milliards pour financer d'éventuelles pertes que pourrait induire un audit des créances douteuses et toxiques des deux banques.

Il y a quatre jours, Intesa Sanpaolo avait dit qu'elle n'acceptait de reprendre les actifs sains de Banca Popolare di Vicenza et Veneto Banca pour un prix symbolique qu'à la condition que l'opération n'ait aucune incidence sur ses ratios de solvabilité et sa politique de dividende, excluant ainsi l'hypothèse d'une augmentation de capital.

"Sans l'offre d'Intesa Sanpaolo - la seule sérieuse qui ait été soumise à la procédure d'enchères organisée par le gouvernement - la crise de deux banques aurait eu un impact sérieux sur tout le système bancaire italien", a déclaré Carlo Messina, administrateur délégué d'Intesa, cité dans un communiqué.

Vendredi, la Banque centrale européenne (BCE) avait jugé que Banca Popolare di Vicenza et Veneto Banca étaient en train ou probablement sur le point de faire faillite. Ce jugement a donné le coup d'envoi de la procédure de mise en liquidation.

Après des mois d'âpres négociations entre le gouvernement italien et la Commission européenne, Rome a finalement été autorisé à avoir recours à une procédure de liquidation nationale plutôt que de se voir imposer des règles européennes mises en place pour empêcher de sauver des banques avec de l'argent public.

Ces règles auraient pu imposer des pertes aux détenteurs de la dette principale et à des gros épargnants, une perspective qui était hautement sensible à l'approche des élections de 2018 étant donné que les ménages italiens détiennent une part importante des obligations émises par les banques.

La liquidation de Banca Popolare di Vicenza et Veneto Banca intervient six mois après le sauvetage de Banca Monte dei Paschi di Siena, la troisième banque du pays, pour une facture de 6,6 milliards d'euros. Quatre banques de taille plus modeste avaient été liquidées en 2015. (Avec la contribution de Stefano Bernabei à Rome et de Gianluca Semeraro à Milan, Benoit Van Overstraeten pour le service français)