(Actualisé avec prise de Mazar-i-Sharif)

* Les villes de Pul-e-Alam et Mazar-i-Sharif sont tombées

* Les insurgés islamistes sont à 70 km de Kaboul

* 3.000 soldats américains attendus à Kaboul d'ici dimanche

KABOUL, 14 août (Reuters) - Le président afghan Ashraf Ghani a dit samedi mener des discussions d'urgence avec des responsables politiques locaux et des partenaires internationaux alors que les insurgés taliban se rapprochent de Kaboul après avoir pris le contrôle de la ville de Pul-e-Alam, à 70 kilomètres de la capital afghane.

"En tant que président, mon objectif est d'empêcher que l'instabilité, la violence et le déplacement de mon peuple se poursuivent", a déclaré Ashraf Ghani lors d'une brève allocution télévisée, alors que les États-Unis et d'autres pays ont envoyé en urgence des troupes pour participer à l'évacuation de leur ambassade.

Ashraf Ghani n'a en revanche pas répondu à la demande des taliban qui l'ont prié de démissionner avant d'engager des pourparlers en vue d'un cessez-le-feu et un règlement politique.

"La réintégration des forces de sécurité et de défense est notre priorité et des mesures sérieuses sont prises à cet égard", a déclaré le président afghan.

Il a pris la parole peu après la prise de contrôle par les taliban de la ville de Pul-e-Alam, à 70 km au sud de Kaboul, une étape-clé avant une possible offensive sur la capitale afghane.

La ville de Mazar-i-Sharif, dans le nord du pays, est également tombée aux mains des taliban et les forces de sécurité ont pris la fuite vers la frontière ouzbèke, a déclaré samedi un responsable provincial.

"Les talibans ont pris le contrôle de Mazar-i-Sharif", a dit Afzal Hadid, chef du conseil provincial de Balkh, ajoutant que la ville semblait être tombée sans combat.

Les soldats ont abandonné leur équipement et se sont dirigés vers le poste frontière, a-t-il déclaré.

Par l'intermédiaire de son ministère des Affaires étrangères, le Qatar a appelé les taliban au cessez-le-feu et à renoncer à leur offensive en Afghanistan.

Le Pentagone a fait savoir que deux bataillons de Marines et un bataillon d'infanterie de l'US Army seraient envoyés à Kaboul d'ici dimanche soir, soit environ 3.000 soldats.

"Ils arrivent, leur arrivée va se poursuivre jusqu'à demain", un responsable américain a dit à Reuters sous couvert d'anonymat.

Une unité de combat de l'infanterie va aussi quitter Fort Bragg, en Caroline du Nord, pour le Koweït, a aussi fait savoir le Pentagone, précisant que cette unité agirait comme une force de réaction rapide à Kaboul en cas de besoin.

DESTRUCTION DE MATÉRIEL SENSIBLE

Plusieurs pays occidentaux ont indiqué dépêcher des troupes pour procéder à l'évacuation du personnel diplomatique à Kaboul alors que la situation sécuritaire se détériore au fur et à mesure que progressent les taliban.

Les insurgés islamistes ont vu leur emprise croître à un rythme effréné ces derniers jours. Les pertes de Kandahar et Herat sont un sérieux revers pour le gouvernement afghan et font désormais craindre une offensive sur Kaboul dans les prochains jours.

Les Nations unies examinent la situation sécuritaire en Afghanistan "heure par heure" mais ne prévoient pas, pour l'heure, d'évacuer leurs personnel présent sur place, a déclaré vendredi Stéphane Dujarric, porte-parole de l'organisation.

Des diplomates ont indiqué que les ambassades avaient commencé à brûler du matériel sensible en amont des évacuations.

L'ambassade des États-Unis à Kaboul a informé son personnel que des poubelles et un incinérateur étaient disponibles pour détruire du matériel sensible, selon une note consultée par Reuters.

Les Nations Unies ont averti que "l'Afghanistan (était) en train d'échapper à tout contrôle" et ont exhorté toutes les parties à faire davantage pour protéger les civils.

"C'est le moment de mettre fin à l'offensive. C'est le moment d'entamer des négociations sérieuses. C'est le moment d'éviter une guerre civile prolongée ou l'isolement de l'Afghanistan", a déclaré António Guterres, le Secrétaire général de l'Onu, lors d'une conférence de presse à New York.

Selon les habitants de la capitale, de nombreuses personnes constituaient des réserves de riz et d'autres aliments, ainsi que de produits de première nécessité.

Les demandes de visa dans les ambassades se comptent de leur côté en dizaines de milliers, selon des responsables.

La reprise des combats fait craindre une crise humanitaire et un recul des acquis en matière de droits de l'homme.

Quelque 400.000 civils ont été contraints de fuir leur foyer cette année, dont 250.000 depuis le mois de mai, selon un responsable de l'Onu. (Bureau de Kaboul, version française Matthieu Protard et Elizabeth Pineau)