Alors que l'Allemagne a fait mieux que prévu dans le même temps, la hausse du chômage, à des plus hauts depuis 13 ans et les mesures d'austérité en préparation pour boucler le projet de loi de finances pèsent sur la confiance des acteurs économiques français et partant, sur l'activité, estiment des économistes.

L'indice composite Markit/CDAF des directeurs d'achat, qui donne une première indication de l'activité dans l'industrie manufacturière et les services marchands, est ressorti à 44,1 en estimation "flash" pour septembre en France, son niveau le plus bas depuis 41 mois, contre 48,0 en août.

Il se situe sous la barre de 50, qui marque la différence entre croissance et contraction de l'activité, pour le septième mois consécutif.

Dans le même temps, ce même indice a progressé à 49,7 en Allemagne, un plus haut depuis mars, contre 47,0 en août.

"La France commence vraiment à être à la peine", a déclaré Chris Williamson, économiste de l'institut Markit. "Son économie souffre de la baisse de la demande dans les pays voisins (...) et il y a peu de signes d'une demande qui puisse stimuler la croissance en France même", a-t-il ajouté.

De fait, selon les directeurs d'achat interrogés, les nouvelles commandes à l'industrie ont plus reculé ce mois-ci que les commandes à l'exportation, ce qui témoigne d'un problème de demande intérieure.

L'ÉCART FRANCO-ALLEMAND SE CREUSE

Pour Markit, ces chiffres augurent d'une contraction de l'économie, déjà en croissance nulle depuis neuf mois, qui pourrait atteindre 0,5% à 0,6% au troisième trimestre.

"On attendait une légère amélioration de la confiance étant données les décisions de la Banque centrale européenne", soulignent les économistes d'Exane BNP Paribas en se référant au programme de rachat d'obligations souveraines annoncé par la BCE au début du mois pour apaiser les tensions dans la zone euro.

"Elles ont contribué positivement pour l'Allemagne mais cela n'a pas été le cas en France parce que la confiance peut difficilement s'améliorer au vu de toutes les mesures d'austérité du budget 2013", ajoutent-ils.

Les économistes de la Société générale parlent de leur côté de chiffres inquiétants qui laissent présager "un nouveau repli de l'activité à la fin du troisième trimestre là où nous attendions une stabilisation". "Cela démontre une nouvelle fois les divergences croissantes dans les performances de la France et de l'Allemagne", ajoutent-ils dans une note.

Exane BNP Paribas tablait déjà sur une contraction de 0,2% de l'économie française au troisième trimestre puis une stabilisation à un niveau très faible au quatrième.

S'il a revu en baisse ce mois-ci sa prévision de croissance pour 2013 à 0,8%, le gouvernement a maintenu celle de 0,3% attendue pour 2012, qui paraît désormais elle aussi optimiste.

ACCUMULATION DES PRÉLÈVEMENTS

Pour boucler un budget 2013 qui doit permettre de ramener les déficits publics à 3% du PIB, il a prévu vingt milliards d'euros d'impôts supplémentaires répartis à égalité entre les ménages et les entreprises, plus 10 milliards d'économies.

Mais avec un consensus des économistes pour la croissance 2013 qui se situait à 0,5% fin août, sans doute autour de 0,4%, voire moins, actuellement, beaucoup anticipent que des lois de finances rectificatives seront nécessaires dans le courant de l'année pour que la France y parvienne.

Un premier ajustement pourrait s'imposer avant décembre pour atteindre l'objectif de 4,5% de déficits pour 2012 si les tendances actuelles se confirment.

COE Rexecode, un institut de prévision proche du patronat, a annoncé jeudi prévoir une progression limitée à 0,2% du PIB de la France en 2013 après une croissance nulle en 2012, alors qu'il tablait au printemps sur +1,4% pour l'an prochain et +0,6% pour cette année.

Avec des investissements des entreprises en berne et un pouvoir d'achat des ménages qui baisserait pour la deuxième année consécutive, il voit un taux de chômage à 10,5% fin 2013.

Dans ce contexte, l'institut s'interroge sur les choix du gouvernement pour atteindre ses objectifs en matière de déficits.

Pour lui, la simple stabilisation des effectifs de la fonction publique prévue sur le quinquennat "interdit tout effort significatif d'économie (...) et conduit à une hausse des prélèvements obligatoires incompatibles avec une reprise prochaine de la croissance".

COE Rexecode juge aussi que l'accumulation des prélèvements sur le capital, tant sur son montant que sur son revenu, risque de brider l'investissement. Seules des mesures "fortes et rapides" de compétitivité pourraient compenser l'effet négatif de la réduction du déficit public, dit l'institut.

édité par Yves Clarisse

par Yann Le Guernigou et Jean-Baptiste Vey