Les investisseurs américains ont balayé d'un revers de la main la position prudente de la Fed sur l'évolution des taux, en terminant la séance en vive hausse. Les trois grands indices, S&P500 (le plus large), Dow Jones (le plus vieux) et Nasdaq 100 (le plus remuant) ont progressé de plus de 1%. Le S&P500 vient d'enquiller six séances consécutives dans le vert, une première depuis le mois de novembre 2021. L'indice large américain n'a baissé que trois fois au cours des quinze dernières journées de bourse. Quant au Nasdaq 100, il gagne près de 39% depuis le début de l'année. C'est trop bien sûr, et cela déjoue une fois de plus les pronostics de début d'année d'une grande partie du marché. Mais cela montre que l'appétit des investisseurs pour le risque est remonté à vitesse grand V, à mesure qu'ils se persuadent que l'économie américaine tient le choc malgré l'environnement de taux élevés. Jusqu'à présent, hormis l'alerte sévère sur les banques régionales aux Etats-Unis, aucune des prophéties cataclysmiques ne se sont matérialisées, en particulier sur le marché de l'immobilier, celui de la dette privée ou plus généralement en matière de récession.

Ça sent la grosse vengeance du FOMO, la peur de manquer une opportunité juteuse. D'ailleurs, pour ceux qui se demandaient encore si l'investissement décérébré est de retour, la réponse est oui, comme l'illustre l'introduction en bourse de Cava hier aux Etats-Unis. En préparant cette chronique, je suis tombé dans la soirée sur la variation du titre à l'issue de sa première journée de cotation : +99% ! Le titre est monté du prix d'IPO de 22$ en préouverture à 43,78$ en clôture, soit une capitalisation qui est passée de 2,4 à 4,8 Mds$ en quelques heures. Alors de deux choses l'une. Soit les conseillers financiers qui ont valorisé l'entreprise sont complètement cons, soit les investisseurs sont complètement cons. Pour répondre à cette épineuse question, jetons un coup d'œil à l'activité de Cava. L'entreprise est une star de l'intelligence artificielle est une chaîne de restauration rapide. Elle propose, sous enseigne Cava, une cuisine de type méditerranéenne en s'inspirant notamment de recettes libanaises et grecques. L'offre a l'air assez alléchante, le marketing est léché et la réputation a l'air solide outre-Atlantique. Mais bon, ça reste de la restauration et la société, malgré sa belle histoire, n'a encore jamais gagné d'argent en douze ans d'existence. Un coup d'œil à son prospectus de base (mes soirées sont trépidantes parfois) montre que la perte nette s'est creusée de 37,4 en 2021 à 59 M$ en 2022. Il n'y a pas d'objectifs chiffrés précis ni d'horizon de rentabilité. Cava explique même qu'après avoir renforcé son réseau à plus de 250 restaurants, en particulier en changeant les enseignes de Zoës Kitchen rachetée en 2018, ses coûts d'expansion seront à l'avenir nettement plus élevés. Et le management de souligner "si nos revenus n'augmentent pas plus vite que nos dépenses d'exploitation, nous ne serons pas en mesure d'atteindre la rentabilité". Donc ce truc-là a fait vibrer les investisseurs comme si c'était le prochain Chipotle ou le futur McDonald's. Pourquoi pas, mais pour l'instant, c'est surtout une enseigne de restauration qui essaie de se faire une place dans un secteur embouteillé, avec des perspectives de rentabilité encore incertaines. Reste que les IPO ne courent pas les rues en ce moment et que les financiers ont à nouveau la bougeotte. Les débuts boursiers de Cava ont donc été aussi irrationnels qu'explosifs, mais ils nous montrent que les investisseurs ont retrouvé un niveau d'avidité élevé. Et un peu inquiétant.

Après cette longue digression Cavatesque, retour à des choses plus planplan avec la décision de la Banque du Japon de surtout ne rien faire. La BOJ a laissé ses taux au plancher, comme le prévoyaient les économistes. Avec une inflation qui s'est enfin réveillée dans l'Archipel après des années de marasme, un marché boursier local qui a le vent en poupe et une croissance qui s'affermit, la banque centrale n'a pas vraiment intérêt à abandonner sa politique ultra-accommodante. Hier, la BCE a relevé ses taux et quasiment promis de le faire encore, au lendemain de la décision de la Fed de mettre en pause son propre cycle de resserrement monétaire. Ce décalage de timing a propulsé l'euro à 1,0942 USD. La macroéconomie du jour sera dominée par la lecture définitive de l'inflation de mai en zone euro et par l'indice de confiance des consommateurs de l'Université du Michigan aux Etats-Unis. Le marché du travail et le moral du consommateur sont deux variables importantes pour la politique monétaire de la Fed, donc l'indicateur de l'après-midi sera scruté avec attention. Du côté de l'énergie, le pétrole s'est réveillé avec le gaz européen, dont les cours ont flambé sur fond de spéculation sur l'offre, après des dysfonctionnements dans l'approvisionnement norvégien et l'annonce de la confirmation de la fermeture du plus gros gisement d'Europe continentale, aux Pays-Bas, probablement à l'automne.

Clôture au beau fixe en Asie Pacifique ce matin. Tous les principaux marchés gagnent du terrain, hormis Taiwan. L'Australie s'adjuge plus de 1% grâce au compartiment énergétique et Hong Kong brille avec son secteur technologique. Comme nous sommes le troisième vendredi d'un mois de fin de trimestre, de nombreux contrats à terme arrivent à expiration et doivent être remis au goût du jour. Cette séance dite des quatre sorcières peut entraîner de la volatilité et des volumes accrus. En attendant, les indicateurs avancés européens sont en position d'attente avec un biais haussier, après une séance mitigée hier, qui avait vu le CAC40 français céder 0,5% mais le FTSE 100 britannique gagner 0,3%. Le CAC40 a démarré la séance en hausse de 0,3% à 7312 points.

Les temps forts économiques du jour

La seconde estimation de l'inflation dans la zone euro sera publiée à 11h00. Aux Etats-Unis, c'est l'indice du sentiment des consommateurs de l'université du Michigan qui focalisera l'attention, à 16h00. Tout l'agenda ici.

L'euro remonte à 1,0942 USD. L'once d'or s'échange 1955 USD. Le pétrole a rebondi, avec un Brent de Mer du Nord à 75,48 USD le baril et un brut léger américain WTI à 70,79 USD. Le rendement de la dette américaine sur 10 ans s'établit à 3,74%. Le bitcoin remonte à 25 500 USD.

Les principaux changements de recommandations

  • Aéroports de Paris : Mediobanca reprend le suivi à neutre en visant 143 EUR.
  • Airbus : Bernstein reprend le suivi à performance sectorielle en visant 140 EUR.
  • Alstom : Oddo BHF reste à surperformance avec un objectif de cours relevé de 32,10 à 34 EUR.
  • Anheuser-Busch Inbev : AlphaValue reste à l'achat avec un objectif de cours réduit de 78,20 à 74,30 EUR.
  • AP Moller Maersk : Handelsbanken démarre le suivi à la vente.
  • BAE Systems : Vertical Research reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 940 à 1000 GBp.
  • BE Semiconductor : Berenberg reste à conserver avec un objectif de cours relevé de 80 à 85 EUR.
  • Colruyt : Oddo BHF passe de sousperformance à neutre environ 31 EUR.
  • Dassault Systèmes : Bernstein reste à performance de marché avec un objectif de cours relevé de 38 à 39 EUR.
  • DSV : Handelsbanken démarre le suivi à conserver.
  • Endesa : Barclays passe de surpondérer à pondération en ligne en visant 21,50 EUR.
  • Halma : HSBC reste à l'achat avec un objectif de cours réduit de 2640 à 2600 GBp.
  • Hennes & Mauritz : Goldman Sachs reste neutre avec un objectif de cours relevé de 165 à 170 SEK.
  • Informa : HSBC reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 7300 à 8800 GBp.
  • Interroll : ZKB passe de surperformance à performance de marché.
  • LVMH : HSBC reste à l'achat avec un objectif pour réduit de 1030 à 1025 EUR.
  • Lundbeck : Handelsbanken passe de conserver à acheter.
  • MorphoSys : J.P. Morgan passe de souspondérer à surpondérer en visant 36 EUR.
  • Sonova : Bernstein reste à sousperformance avec un objectif de cours réduit de 220 à 210 CHF.
  • Stora Enso : DNB passe d'acheter à conserver en visant 13 EUR.
  • X-Fab : Berenberg reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 11 à 13 EUR.

En France

Annonces importantes (et moins importantes)

  • Crédit Agricole, ABN Amro plus une ou deux banques privées suisses seraient sur les rangs pour le rachat du groupe belge de gestion de fortune et de banque d'investissement Degroof Petercam en Belgique, selon Les Echos.
  • Fitch relève la note crédit d'Airbus de "BBB+" à "A-", perspective stable.
  • Hausse du trafic en mai dans les aéroports et sur les autoroutes opérés par Vinci.
  • Sodexo renomme sa division de cartes prépayées Pluxee en vue de sa scission.
  • Orpea a annoncé un accord pour une revalorisation des salaires, avec notamment une augmentation générale de 3 à 7% des salaires applicable dès le mois de juin à tous les salariés ayant au moins un an d'ancienneté.
  • Les actionnaires de Korian ont approuvé le changement de nom en Clariane et la transformation du groupe en société à mission.
  • Eutelsat vend ses activités de vente au détail de services haut débit en Europe.
  • Eurazeo finance l'acquisition de Inke par Keensight Capital via son activité de dette privée.
  • Claranova lance une augmentation de capital de 20 M€ à 1,75 EUR, avec délai de priorité pour les actionnaires existants.
  • Technicolor Creative Studios réorganise sa gouvernance.
  • TME Pharma obtient le feu vert de la FDA pour lancer un essai clinique de phase II avec NOX-A12 au sein d'une étude dans le cancer du pancréas, mais ne l'initiera que si la recherche de financements aboutit.
  • Le petit coin de la dilution : Europlasma émet deux tranches d'OCEANE-BSA pour 2 M€ au profit d'EPF (Alpha Blue Ocean) en marge de l'annonce d'un contrat pour les Forges de Tarbes.
  • Elles ont publié / Elles doivent publier : Groupe LDLC

Dans le monde

Résultats des entreprises (les commentaires sont donnés à chaud et ne préjugent pas de l'évolution des titres)

  • Adobe : le titre gagne 3,5% hors séance après la publication de bons trimestriels.
  • Tesco : maintient ses prévisions après que l'inflation a dopé ses ventes trimestrielles.
  • Travis Perkins : revoit à la baisse ses prévisions de bénéfices en raison des conditions de marché difficiles.

Annonces importantes (et moins importantes)

  • L'italien Generali rachète l'espagnol Liberty Seguros pour 2,3 Mds€.
  • Solvay dévoile les structures capitalistiques cibles de SpecialtyCo et EssentialCo.
  • First Quantum rejette la proposition informelle de rachat de Barrick Gold.
  • GSK annonce que la FDA prolonge la période d'examen de son médicament contre le cancer du sang.
  • Glencore vend la mine de cuivre de Cobar pour un montant de 1,1 Md$.
  • Nissan confirme le prochain départ de son numéro deux, Ashwani Gupta.
  • La directrice financière de Walt Disney va démissionner.
  • Currys évoque une vente potentielle de ses activités en Grèce.
  • DKSH signe un nouvel accord de distribution avec Bitop en Asie-Pacifique.
  • ITV étudie la possibilité de racheter All3Media et de le combiner avec ITV Studios.
  • Les principales publications du jour : néant… Tout l'agenda ici.

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