Paris (awp/afp) - L'Élysée a proposé jeudi de nommer à la tête d'EDF Luc Rémont, actuel dirigeant de Schneider Electric, en remplacement de l'actuel PDG du géant de l'électricité Jean-Bernard Lévy, pour relever le défi majeur de la relance de la production nucléaire.

L'actuel responsable des opérations internationales de Schneider Electric va devenir le nouveau pilote du vaisseau national EDF, fragilisé par sa situation financière et sa production électrique en panne.

"Le Président de la République envisage, sur proposition de la Première ministre, de nommer Luc Rémont", âgé de 53 ans, "en qualité de président-directeur général d'Électricité de France", a indiqué jeudi la présidence, en précisant que le Parlement devra donner son aval à cette nomination.

Il remplacera celui qui dirigeait le groupe depuis 2014, Jean-Bernard Lévy, bientôt atteint par la limite d'âge mais dont le départ anticipé a été annoncé dès cet été en même temps que la renationalisation d'EDF à 100%.

Personnalité discrète peu connue du grand public, Luc Rémont est un habitué des sphères publiques, déjà passé par Bercy et les cabinets ministériels avant d'entrer il y a dix ans dans le monde de l'énergie chez Schneider Electric.

Pour l'instant, ce profil public-privé sera le seul capitaine à bord, les statuts actuels de la société prévoyant une gouvernance unique dans les mains d'un PDG. Mais l'idée d'une dissociation entre les fonctions de président et directeur-général avait été évoquée par l'Élysée, et Bercy y reste toujours favorable.

Défis colossaux

À la tête de l'électricien français, Luc Rémont va devoir relever un nombre de défis colossaux, tant pour EDF que pour la sécurité de l'approvisionnement électrique du pays qui fait face à sa pire crise énergétique depuis des décennies.

Dans sa feuille de route, un dossier est tout en haut de la pile : relancer une production électrique en panne, en raison de problèmes de corrosion sur certains réacteurs nucléaires, mais aussi de la sécheresse qui a fragilisé le potentiel des centrales hydroélectriques cet été.

Sur 56 réacteurs nucléaires, environ la moitié sont à l'arrêt en raison de ces problèmes de corrosion ou pour des maintenances programmées, ce qui devrait faire chuter pour 2022 la production à un plus bas historique de 280 TWh. Or tout l'enjeu sera de faire redémarrer suffisamment de réacteurs pour faire face aux pics de consommation, notamment en cas de scénario très froid.

D'autres chantiers plus structurels attendent le nouvel homme fort d'EDF. À moyen et long terme, le nouveau patron aura aussi à gérer le branchement de l'EPR Flamanville, qui accuse dix ans de retard, et de faramineux investissements à venir pour relancer le nucléaire, selon la feuille de route fixée par Emmanuel Macron dans son discours de Belfort en février 2022.

Six nouvelles centrales

L'exécutif veut doter la France de six nouveaux EPR de seconde génération, avec une option pour huit autres et prolonger la durée de vie d'un parc vieillissant au-delà de 50 ans, pour accroître l'approvisionnement électrique de la France et de l'Europe alors qu'il faudra de plus en plus se passer des énergies fossiles. Le gouvernement a dévoilé cette semaine un projet de loi visant à lancer au plus vite ces nouveaux réacteurs, avec une première pierre avant la fin du quinquennat d'Emmanuel Macron.

Luc Rémont aura aussi à gérer une renationalisation de l'entreprise reprise à 100% dans l'escarcelle de l'État et une dette colossale qui pourrait atteindre plus de 60 milliards d'euros fin 2022. Une situation due à la baisse de la production, aggravée par la décision du gouvernement de lui faire vendre davantage d'électricité bon marché à ses concurrents pour protéger la facture des ménages.

Cette décision a poussé EDF à réclamer à l'État, le 9 août dernier, une indemnité de 8,34 milliards d'euros, et à déposer dans cette optique un recours contentieux auprès du Conseil d'État.

afp/buc