SHANGHAÏ/PARIS, 17 novembre (Reuters) - Les grandes marques de luxe internationales qui cherchent à se développer sur le deuxième marché le plus important du secteur, la Chine, courtisent toutes des personnalités comme la riche entrepreneure Diana Wang.

Basée à Shanghaï, Diana Wang est une investisseuse qui possède également une marque de mode. Collectionneuse de bijoux, elle fait régulièrement ses achats chez Cartier, Tiffany ou encore Chopard.

Dans le monde du luxe, la clientèle premium (very important client, ou VIC), est un segment de marché convoité des entreprises qui doit permettre de compenser la baisse du pouvoir d'achat de la classe moyenne chinoise.

Le mois dernier, Diana Wang a assisté à un dîner de gala organisé par Tiffany, filiale de LVMH, qui a également lancé une nouvelle collection de joaillerie et organise des ventes privées destinées à une clientèle triée sur le volet.

"Les marques de luxe vous offrent cette expérience événementielle, cette expérience personnelle, et vous vous sentez privilégiée", a déclaré Diana Wang à Reuters. "C'est en grande partie ce qui me donne envie d'acheter la marque".

Alors que la demande de produits de luxe en Chine a moins rebondi que prévu après la réouverture du pays après la pandémie, les grandes marques favorisent la vente d'un nombre réduit d'articles de plus grande valeur, en s'appuyant sur les 5% de consommateurs qui, selon les analystes de HSBC, représentent plus de 35% de leur chiffre d'affaires en Chine.

Cette stratégie n'avait pas encore été déployée à grande échelle en Chine, où les marques cherchaient plutôt à séduire de nouveaux consommateurs. Aujourd'hui, la crise immobilière et le taux de chômage record chez les jeunes ont contraint les détaillants à attirer des clients plus fortunés et moins nombreux.

INTIME ET EXCLUSIF

Faire en sorte que les VIC chinois se sentent privilégiés est au coeur de cette stratégie. Pour son gala à Shanghaï, Tiffany a veillé à ce qu'une célébrité soit assise à chaque table, a indiqué Diana Wang. Versace a ainsi organisé récemment un dîner intime pour une quarantaine de personnes avec la créatrice Donatella Versace.

Gucci, Chanel et Dior ont également réservé davantage d'espaces de vente à Shanghaï, exclusivement pour leurs clients les plus fortunés.

"Nous accordons beaucoup d'attention aux détails et à l'ancrage dans la culture locale", a déclaré Cyrille Vigneron, président-directeur général de Cartier. La marque organisera en mai à Shenzhen, en Chine, son prix annuel "Cartier Women's Initiative" destiné à promouvoir les femmes entrepreneures.

Les dirigeants de LVMH sont également très attachés à cette dimension locale. Louis Vuitton a récemment ouvert une librairie pop-up et un café à Shanghaï, avec un panneau d'affichage en dialecte local, et a lancé un podcast en mandarin.

NOURRIR L'HABITUDE DU LUXE

Même si elles réduisent leur champ d'action, les marques de luxe restent optimistes quant au potentiel de la Chine, qui devrait représenter près de 40% des ventes mondiales d'ici à 2030, selon le cabinet de conseil Bain.

"Nous considérons que le potentiel de développement à moyen terme et à long terme restent forts", a déclaré Éric du Halgouët, directeur financier chez Hermès.

Selon Mario Ortelli, consultant en matière de luxe, plusieurs sociétés du secteur assurent leurs arrières en étendant leur présence ailleurs dans le monde. Cette année, de nombreux événements et ouvertures ont eu lieu en Corée du Sud, au Japon et en Thaïlande, ainsi qu'en Chine.

"Mais vous devez toujours investir dans votre marché le plus important, celui qui est le moteur de la croissance", a déclaré Mario Ortelli. "La seule façon pour les entreprises de luxe de se protéger est de rendre leur marque aussi désirable que possible afin d'être la dernière que les clients qui réduisent leurs coûts cesseront d'acheter." (Reportage Mimosa Spencer et Casey Hall, version française Augustin Turpin, édité par Kate Entringer)