Les grèves et les travaux de maintenance non planifiés ont mis hors service plus de 60 % de la capacité de raffinage de la France, soit 740 000 barils par jour (bpj), obligeant le pays à importer davantage à un moment où les pénuries d'approvisionnement mondiales ont fait grimper le coût du diesel.

ExxonMobil a négocié un accord avec deux syndicats importants sur ses sites, bien qu'un troisième, le syndicat musclé CGT, ait rejeté l'accord. TotalEnergies reste dans l'impasse avec les syndicats.

POURQUOI LES TRAVAILLEURS DES RAFFINERIES ET DES DÉPÔTS DE CARBURANT SONT-ILS EN GRÈVE ?

Les syndicats exigent des augmentations de salaire pour aider les travailleurs à faire face à l'inflation galopante, alors que l'Europe est confrontée à l'une des pires crises du coût de la vie depuis des décennies.

Les pressions inflationnistes ont été exacerbées par les retombées de la guerre de la Russie en Ukraine, et le continent se prépare à une pénurie d'énergie cet hiver après que Moscou ait coupé les approvisionnements en gaz.

Esso France, l'entreprise française d'Exxon, a déclaré avoir conclu un accord avec deux syndicats pour une augmentation de salaire de 6,5 % en 2023 et une prime de 3 000 euros (2 908 $).

L'accord salarial d'Exxon est l'un des plus généreux à ce jour en Europe, et pourrait susciter l'inquiétude des entreprises et des responsables économiques, qui craignent qu'il ne crée un précédent pour les négociations dans d'autres secteurs.

Le syndicat CGT, de gauche dure, réclame une augmentation de salaire de 10 % pour les travailleurs de ses raffineries.

POURQUOI TANT DE CAPACITÉS SONT-ELLES HORS SERVICE ?

Les pannes ont eu lieu pendant la saison dite de maintenance en Europe, qui suit le pic de la saison de conduite estivale et précède la demande de chauffage en hiver.

On ne sait pas avec quelle rapidité les activités d'ExxonMobil pourront reprendre après la conclusion de son accord salarial.

On s'attend à ce qu'environ 1,5 million de bpj soient hors ligne à travers l'Europe en octobre, resserrant ainsi les approvisionnements déjà limités, en particulier de distillats moyens.

Les distillats moyens tels que le diesel et le gazole sont principalement utilisés dans le transport de marchandises, la fabrication, l'agriculture, l'exploitation minière et l'extraction de pétrole et de gaz.

QU'EN EST-IL DES RÉSERVES ?

La France dispose de suffisamment de réserves stratégiques de produits pétroliers pour couvrir la demande moyenne pendant environ trois mois, estime l'UFIP.

Le gouvernement a déjà puisé dans ces réserves pour assurer le fonctionnement d'industries comme les raffineries de sucre. Il est prêt à le faire à nouveau.

Près d'une station-service sur trois dans le pays est à court d'au moins un produit.

Les stocks de diesel de la France s'élevaient à 60 millions de barils en juin, soit près de 15 millions de moins que la moyenne sur cinq ans pour ce mois, selon Energy Aspects.

LA FRANCE AUGMENTE-T-ELLE SES IMPORTATIONS DE PRODUITS RAFFINÉS ?

Oui. La France importe habituellement environ 50 % de ses besoins en diesel chaque année. Les importations augmentent généralement à l'approche du quatrième trimestre en raison des calendriers de maintenance des raffineries.

Mais au cours de la semaine du 2 octobre, les importations de produits pétroliers ont bondi de 40 % en glissement hebdomadaire pour couvrir le déficit de production causé par la grève, selon les données de la société d'analyse énergétique Vortexa.

Les fournisseurs français ont acheté des cargaisons de diesel sur la base d'un transfert de navire à navire à partir d'un nombre record de VLCC (Very Large Crude Carriers) arrivant en Europe, a déclaré le groupe de conseil en énergie Wood Mackenzie au début du mois.

IMPACT SUR LES PRIX DES CARBURANTS ?

Les arrêts des raffineries françaises resserrent l'offre européenne et se répercutent sur les marchés mondiaux.

Les marges de raffinage du diesel en Europe et aux États-Unis ont atteint des sommets historiques. Pendant ce temps, les marges de profit des barges de diesel du nord-ouest de l'Europe sont restées proches des records atteints lundi [L1N31B20T].

L'incertitude quant à la durée des grèves françaises a fait augmenter les marges du diesel européen par rapport au brut, au moment même où les sanctions occidentales contre la Russie font encore grimper les prix.

L'Union européenne tente de se procurer environ 600 000 bpj de diesel pour remplacer le carburant russe avant une interdiction en février.