par Emma Farge

GENEVE, 5 juin (Reuters) - Accueillis dans l'enthousiasme lors de leur arrivée en Afrique, les investisseurs chinois commencent à déchanter avec la multiplication des conflits qui les opposent aux Etats africains, qui ont trouvé une illustration avec le différend entre Addax, filiale de Sinopec, et les autorités gabonaises.

Au coeur de ce conflit, le gisement pétrolier d'Obangue que Libreville a transféré vers la compagnie publique Gabon Oil Co (GOC) alors qu'il était jusque là exploité par Addax.

Des hauts fonctionnaires gabonais du ministère du Pétrole ont déclaré en mai qu'Addax ne s'était pas acquitté de certains droits de douane et que le groupe s'était soustraits à certaines lois. Certaines sources avancent que la filiale de Sinopec pourrait perdre ses licences d'exploitations dans l'ancienne colonie française.

Addax, représente près d'un tiers de la production pétrolière de Sinopec à l'étranger et exploite cinq gisements d'hydrocarbures au Gabon, un pays qu'il ne veut pas quitter. Le chinois a décidé de contester la volonté de Libreville de ne pas renouveler sa concession.

Selon des sources proches de la procédure, Addax réclame 330 millions de dollars au Gabon qui, de son côté exige que le Chinois lui verse 780 millions de dollars. Les sources ont précisé que le conflit avait été confié à la Cour internationale d'arbitrage de Paris qui n'a pas souhaité faire de commentaire.

FIN DE LA LUNE DE MIEL ?

En plus du différend qui l'oppose à Addax, le Gabon a décidé de réétudier les termes d'un projet d'extraction de minerai de fer tandis que la Zambie a retiré en février trois projets de charbon accordés à des groupes chinois, accusés de ne pas respecter les normes de sécurité et de ne pas avoir payé les redevances promises.

"Ce qui est perceptible c'est que l'enthousiasme effréné avec lequel les investisseurs chinois étaient accueillis en Afrique il y a cinq ou dix ans a largement disparu", analyse Robert Tashima, directeur éditorial pour l'Afrique d'Oxford Business Group.

"Ils sont aujourd'hui confrontés à des contrôles plus approfondis et, alors qu'un grand nombre de projets financés par les Chinois sont encore en préparation, un certain nombre de contrats sur le continent ont été annulés ou suspendus", ajoute-t-il.

La querelle au sujet du gisement d'Obangue coïncide par ailleurs avec la réforme du secteur pétrolier au Gabon. Cette réforme vise à donner à la compagnie d'Etat GOC un contrôle plus étroit des ressources pétrolières du pays et à redresser la production nationale, qui a chuté d'environ 30% depuis son pic de production de 1997 à 370.000 barils par jour.

Le Gabon doit accorder ce mois-ci une série de licences d'exploration en eaux profondes pour tenter d'exploiter les quelque quatre milliards de barils de réserves estimées. (Avec Jean Rovys Dabany à Libreville et Bate Felix à Dakar; Hélène Duvigneau pour le service français, édité par Benoît Van Overstraeten)