Souvenons-nous. En 2006, le besoin de financement auquel Libération doit faire face rend le climat houleux. Edouard de Rothschild, entré au capital en janvier 2005, pose ses conditions à une recapitalisation : il exige le départ de Serge July et de Louis Dreyfus. Les deux hommes se sacrifient pour la sauvegarde du journal et quittent le navire. La phrase de Jean-Paul Sartre dans sa pièce Nekrassov, « L'argent n'a pas d'idées », semble bien mal à propos. Finalement, l'argent semble avoir des idées et les actionnaires des opinions...

Malgré ces recapitalisations, le journal engagé à gauche ne perd rien de sa ferveur et continue de se distinguer par son ton et ses unes réjouissantes. Pourtant, cela ne suffit pas à renflouer les caisses. Nonobstant l'aide de l'Etat aux journaux à faibles ressources publicitaires dont bénéficie le titre, le quotidien demeure endetté à hauteur de 12 millions d'euros. En proie à des difficultés financières, le quotidien doit investir et lever des fonds afin de tout mettre en œuvre pour s'intégrer pleinement à l'ère numérique.

Objectif : se renforcer sur Internet
Pour ce faire, il convient de trouver de nouveaux actionnaires. Aujourd'hui, le capital est répartit de la façon suivante : Edouard de Rothschild est l'actionnaire de référence avec 38,87% du capital. Le tandem formé par les héritiers du patron de presse italien, Carracciolo, et par Carlo Perrone possède 35% du capital. Enfin, les salariés de Libération, à travers la SCPL (Société civile des personnels de Libération), veillent à la liberté et à l'indépendance du journal grâce à leur participation de 18,45%.

L'arrivée de nouveaux actionnaires bouleverserait cette répartition des parts, dans la mesure où la participation d'Edouard de Rothschild tomberait à 34%. Ce nouvel investissement, d'un montant se situant entre 3 et 5 millions d'euros, offrirait à Libération l'occasion de consolider sa présence sur Internet et de mener une politique efficace de recrutement de nouveaux abonnés.

Le web est un outil stratégique que tout média doit parfaitement maîtriser s'il veut s'imposer auprès du public. Les dirigeants de Libération l'ont bien compris et c'est dans cette optique qu'ils lanceraient un site culturel et un site "lifestyle". Le titre ambitionne également de renforcer sa présence auprès des abonnés et de ne plus se focaliser sur les ventes en kiosques qui dégringolent de mois en mois, même si la nouvelle formule lancée il y a un an a permis de freiner cette baisse. Le Monde.fr nous rappelle que la part des abonnements dans la diffusion de Libération ne représente que 18% contre 46% pour Le Monde.