Zurich (awp) - L'Office fédéral du logement (OFL) a entrouvert la porte à de futures hausses de loyers, en relevant jeudi le taux de référence hypothécaire. Si pour l'Association de défense des locataires (Asloca) il s'agit d'une "mauvaise nouvelle", les représentants des propriétaires rappellent que le relèvement des coûts du logement est loin d'être automatique et ne concerne qu'une partie des contrats.

Le taux d'intérêt de référence applicable aux contrats de bail en Suisse a été relevé de 0,25 point de pourcentage, pour la première fois depuis son introduction en 2008. Ce dernier passe à 1,5%, contre 1,25% précédemment, a annoncé l'OFL dans un communiqué.

Cet indicateur, obligatoire pour le calcul du loyer, est basé sur le taux d'intérêt moyen pondéré des hypothèques en Suisse. Il est applicable dès vendredi, mais en général, ce relèvement est appliqué dans un délai d'un à quatre mois selon les cantons, a précisé David Michaud, économiste immobilier à la Banque cantonale vaudoise (BCV).

A son introduction il y a 15 ans, ce taux se situait à 3,5%. Il n'a cessé depuis de reculer, s'établissant depuis mars 2020 à 1,25%.

"Les bailleurs ont en principe (...) le droit de procéder à une augmentation de loyer de l'ordre de 3%, à la condition toutefois que le loyer actuel soit fondé sur l'ancien taux de référence de 1,25%", a précisé l'OFL. Si le loyer est basé sur un taux plus ancien et supérieur au niveau actuel, il existe, au contraire, un droit à la baisse.

A titre d'exemple, un loyer mensuel de 2000 francs suisses peut donc être théoriquement augmenté de 60 francs suisses, ce qui représente un coût supplémentaire de 720 francs suisses sur un an.

D'autres facteurs peuvent également conduire à une adaptation du loyer: le renchérissement avec la variation de l'indice des prix à la consommation (IPC) et l'augmentation générale des coûts, 40% du renchérissement intervenu depuis la dernière adaptation du loyer pouvant être répercuté sur le loyer.

De nouvelles hausses à prévoir

La prochaine décision de l'OFL est agendée au 1er septembre. Mais son directeur Martin Tschirren a averti qu'une nouvelle hausse du taux de 0,25 point "est à attendre pour l'hiver prochain ou en 2024".

Cette hausse pourrait se poursuivre avec le renchérissement des hypothèques. "A un horizon de huit ans, en admettant que les nouvelles hypothèques se concluent durant cette période au niveau actuel, le taux de l'OFL pourrait converger vers 3%", a estimé M. Michaud. 

Face à cette évolution, l'Asloca a dénoncé que "les baisses de ces dernières années n'aient pas été répercutées sur les loyers". Elle estime que les bailleurs n'ont appliqué des baisses que dans 30% des cas. "Au lieu de diminuer, les loyers augmentent depuis des années", a réagi son président Carlo Sommaruga, cité dans un communiqué.

"Le système actuel a échoué. Nous avons besoin d'urgence d'un contrôle automatique et régulier des loyers en Suisse", a lancé M. Sommaruga.

Pour Olivier Feller, secrétaire-général de la Fédération romande immobilière (FRI), "le relèvement du taux de référence des loyers n'est ni une bonne, ni une mauvaise nouvelle, car il n'a un impact que sur certains contrats". Cette hausse ne concerne en effet que les contrats conclus entre mars 2020 et le 1er juin 2023 et qui reposent sur un taux de 1,25%, a-t-il indiqué à l'agence AWP.

"Les hausses de loyers ne sont pas automatiques et le bailleur doit respecter une procédure précise. Si le bailleur décide d'augmenter le loyer, il doit notifier cette hausse au locataire, en respectant l'échéance du contrat de bail et les délais prescrits. Le locataire peut quant à lui contester la hausse. Il n'y a donc pas de caractère automatique", a insisté M. Feller.

Pour le représentant de la FRI, il faut distinguer entre le locataire vivant dans le même logement depuis 10-15 ans et dont le loyer n'a pas augmenté s'il n'y a pas eu de travaux, et les logements nouvellement mis en location. Les loyers proposés ont en effet enregistré une forte hausse, l'offre étant trop faible face à la demande en milieu urbain. "Il faut donc construire plus et plus vite, mais on n'en prend pas le chemin car les procédures sont toujours plus longues".

A la hausse du taux hypothécaire s'ajoute aussi l'inflation, qui peut être partiellement répercutée sur les loyers, prévient M. Michaud. "Au titre de l'inflation en 2022, cela représente une hausse de 1,1% qui vient s'ajouter à celle de 3% au titre du taux hypothécaire de référence", a-t-il calculé. 

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