Boursica :
Nous vous avons interviewé en profondeur le 05 juin et le 09
octobre 2011. Nous sommes début mars 2012 et les enchères ont
démarré sur Artprice depuis près d'un mois et demi.
Quelles sont vos impressions ?
Thierry Ehrmann :
Pour comprendre certains points de cette interview, il est
nécessaire pour vos lecteurs de les renvoyer vers les
interviews du 5 Juin
2011et du 9 Octobre
2011qui sont les grilles de lecture de cette
troisième interview. Nous avons donc effectivement démarré le
18 janvier 2012 les enchères, après 16 ans de combat
législatif contre un des plus vieux monopoles au monde: les
ventes aux enchères d'art, qui datent de l'Edit de
1556. Nous sommes arrivés à faire valoir la libre concurrence
par la désormais célèbre loi du 20 juillet 2011.
Boursica :
Vous êtes donc devenu « Maison de ventes » ?
Thierry Ehrmann :
Non, plus précisément nous sommes devenus opérateur de
courtage aux enchères, réalisées à distance, par voie
électronique, comme défini par l'article 5 de la loi
2011-850 du 20 juillet 2011 par notre Place de Marché
Normalisée ® aux enchères.
Boursica :
Pouvez-vous préciser ?
Thierry Ehrmann :
Artprice possède un ensemble de process de normalisation du
marché de l'art unique au monde, à travers une multitude
de dépôts, au titre de la propriété intellectuelle (droit sui
generis, brevet logiciel, droit d'auteur, …), qui nous
permet, à travers la Place de Marché Normalisée, de
rapprocher l'offre et la demande en temps réel, à prix
fixe ou aux enchères. A ce titre, nous ne sommes pas
responsables de l'enchère car nous ne sommes pas attraits
aux parties (l'acheteur et le vendeur). C'est le
vendeur qui choisit in fine la meilleure enchère, selon ses
propres critères, et nous reverse entre 5 et 9% de commission
pour l'usufruit de notre Place de Marché Normalisée aux
enchères et de notre fichier clients, le plus important au
monde à ce jour, de 1,4 million de membres, dont nous
connaissons, pour chacun, de manière très précise, ce
qu'il recherche ou souhaite vendre.
Boursica :
Revenons à ce mois et demi écoulé. Qu'avez-vous constaté
en sept semaines ?
Thierry Ehrmann :
Nous avons d'abord relevé un défi extraordinaire, celui
de réunir en offre, plus de 5000 lots à l'ouverture des
enchères le 18 janvier 2012, représentant une valeur de plus
de 810 millions d'Euros avec toute une gamme de prix
allant de quelques centaines d'euros à plusieurs dizaines
de millions d'euros.
Pour comprendre ces 45 premiers jours d'enchères, il est
nécessaire d'expliquer auparavant la genèse des
transactions sur Artprice, par sa Place de Marché Normalisée
à prix fixe, dont je rappelle qu'elle est née le 18
janvier 2005 et qu'elle a progressé de manière
spectaculaire, avec une offre démarrée en 2005 à 1,2
milliards €, puis en 2006 plus de 2,7 milliards €, 3,6
milliards € en 2007, 4,5 milliards € en 2008, 5,4 milliards €
en 2009, pour se stabiliser en 2010/2011 à 6,3 milliards €
avec environ de l'ordre de 30% de ventes abouties, pour
lesquelles nous n'étions pas commissionnés (tous les
chiffres précis sont sur les documents de référence et
communication réglementée accessibles sur le site ActusNews
homologué par l'A.M.F.). Très vite, les Acteurs du Marché
de l'art en 2012 ont réagi de manière assez rapide avec
le passage aux enchères, avec un accueil remarquable et très
positif mais aussi en contrepartie un tout autre accueil
d'un petit noyau dur, principalement proche de Drouot,
d'une vieille garde usée qui a déployé des moyens de
nuisance, voire de menaces, impensables en Europe.
Boursica :
Parlons d'abord de cet "accueil remarquable et très
positif ", selon votre expression.
Thierry Ehrmann :
Nous avons eu très rapidement, une génération de Galeristes,
Maisons de ventes, Marchands d'art, Artistes,
Collectionneurs et Amateurs qui ont compris que plus rien ne
serait comme avant. Il est vrai que nos enchères étant
limitées dans le temps, les transactions et les échanges ont
véritablement explosé, par rapport à la Place de Marché
Normalisée à prix fixe d'Artprice, où la notion de temps
est plus étendue. Nous avons multiplié dans les jours qui ont
suivi pratiquement par cinq notre trafic en bande passante et
en nombre de logs. Nous avons eu des témoignages et des
contributions d'une richesse inégalée. Pour toute une
génération, que je situerais entre 25 et 50 ans, Artprice,
par son fichier clients, qui est le plus important au monde
(1,4 million de membres) et ses milliards de logs de
comportements stockés conformément aux directives européennes
et françaises, a donné à ces acteurs du marché de l'Art,
la possibilité de leurs bureaux ou de chez eux, en quelques
secondes, sur des artistes parfois peu connus, de toucher en
quelques heures les dizaines de milliers d'acheteurs
potentiels sur des artistes précis en provenance des cinq
continents. Des discussions hors normes se sont établies
entre ces acteurs et nous-mêmes qui ont la force de remettre
en cause tout leur processus de vente. Ce qui démontre un
vrai courage de leur part.
Boursica :
Quel était le sens de ces discussions et comment se
traduisent-elles ?
Thierry Ehrmann :
C'est pour ces Acteurs du marché de l'art une remise
en compte intégrale de leurs métiers. Ils découvrent
subitement qu'ils possèdent de facto une puissance de feu
supérieure aux fichiers clients des plus grandes maisons de
ventes ou célèbres galeries. Enfermées dans leurs propres
fichiers clients et obligées de faire des foires d'art
internationales à grands frais pour se déployer sur
d'autres continents, elles ont subitement, par Artprice
et sa Place de Marché Normalisée aux Enchères, découvert un
nouveau paradigme économique qui les fait migrer
définitivement dans l'Internet, qui est désormais la
terre de toutes les conquêtes des cinq continents.
Boursica :
Qu'entendez-vous par nouveau paradigme économique
?
Thierry Ehrmann :
Ils comprennent que leur modèle économique, à savoir la
pratique de marges élevées, avec un nombre restreint de
ventes, faute de ne pas avoir un fichier clients de grande
envergure, est en pleine mutation. Certains imaginent fermer
en partie leur galerie ou leur établissement secondaire,
d'autres leur salle des ventes physique. Ils découvrent,
d'un point de vue macro-économique, que le marché de
l'art, qui est passé de 500 000 collectionneurs
d'après guerre, à 450 millions de "consommateurs
d'art" aujourd'hui, leur est enfin accessible en
quelques minutes de leurs lieux professionnels ou privés. De
ce fait, ils peuvent effondrer leurs marges, jusqu'alors
rédhibitoires, et multiplier leur chiffre d'affaires dans
des proportions qu'ils n'imaginaient pas, faute de
lourds moyens financiers et de connaissance profonde de
l'Internet. En un mois et demi, nous avons levé beaucoup
de freins et d'inhibitions que nous corrigeons. Mais
attention, si nous prenons en compte les quatorze jours
d'enchères, le règlement livraison au tiers de confiance
(délai d'environ 15 jours compte-tenu des virements
internationaux) et la finalisation de la vente entre acheteur
et vendeur qui donne la main levée définitive, nous
commençons à peine à percevoir les commissions de fin janvier
2012 qui était notre date d'ouverture aux enchères. Donc
nous allons certainement avoir de bonnes surprises bientôt,
car la montée en charge des enchères sur la Place de Marché
Normalisée est constamment en progression et ce de manière
régulière depuis son ouverture le 18 janvier 2012.
Boursica :
Avez-vous confronté votre postulat avec les grandes maisons
de ventes anglo-saxonnes ?
Thierry Ehrmann :
Je vous invite à lire en urgence la pleine page des Echos du
3 mars 2012, signée de Martine Robert, où le Rapport annuel
d'Artprice sur le marché de l'Art est présenté avec
en écho, une interview du Président de Christie's qui se
termine par cette phrase "L'avenir du Middle Market
de 800 à 10 000 € est sur le net." Qui mieux que
Christie's peut nous le certifier ?
Je rajoute, en qualité de Président d'Artprice, que ce
segment représente à l'échelon mondial, 81 % des
transactions. J'amène donc bien la preuve par un tiers
qui a la qualité d'expert incontestable, que
l'ancienne économie du marché de l'Art considère noir
sur blanc que 81% passera bien par Internet et de facto, par
notre position de leader incontestée, sur notre Place de
Marché Normalisée.
Boursica :
Vous avez parlé de freins et d'inhibitions. Pourriez-vous
être plus précis ?
Thierry Ehrmann :
En effet, notamment avec le problème majeur concernant le
tiers de confiance, nous avons retenu le leader mondial du
séquestre "Escrow.com", au passage je rappelle que
le terme "escrow" signifie "séquestre" en
anglais.
Leur mode opératoire est absolument parfait mais Escrow a un
handicap en acceptant comme devise unique le dollar US, qui
était un frein terrible, principalement pour nos clients
européens. Nous avons donc choisi, en un temps record, un
deuxième tiers de confiance, après un appel d'offres, qui
est Transpact, en Angleterre, qui gère le dollar US,
l'Euro et la Livre Sterling avec un déploiement à la
mi-février. Mais nous avions toujours le problème de la
barrière linguistique.
En effet, autant nos clients sur Artprice ont accès à six
langues, autant sur les sites de nos deux tiers de confiance,
la langue unique qui est l'anglais se révèle être un
véritable obstacle car les sommes en jeu sont très
importantes et nos clients veulent d'un point de vue
juridique et pratique comprendre parfaitement toutes les
étapes et le mode opératoire de séquestre et de main levée
avec le tiers de confiance.
Boursica :
Mais pourquoi ne pas choisir un tiers de confiance par zone
linguistique ?
Thierry Ehrmann :
Je dois vous faire un aveu, notamment en France, aucune
banque, ni établissement assimilé, n'a été capable de
relever le défi du cahier des charges, alors que les sommes
en jeu séquestrées seront à terme colossales et que, de
surcroît, la notion de tiers de confiance, dans
l'économie numérique, est applicable à bien d'autres
groupes et activités économiques, différents d'Artprice
et du marché de l'art. Cela explique, entre autres, un
certain échec français en matière d'économie numérique et
mondialisée de facto…
Boursica :
Y a-t-il donc une solution ? Et pourquoi ne pas le faire
vous-même ?
Thierry Ehrmann :
Au regard de la loi du 20 juillet 2011 sur les enchères en
ligne, notamment l'article 5 retranscrit dans
l'article 321-3 du Code de Commerce (alinéas 2 et 3), il
est primordial que le tiers de confiance qui séquestre la
somme et qui effectue la main levée soit totalement
indépendant d'Artprice, tant sur le plan juridique que
sur le plan capitalistique. Mais je vous rassure, nous avons,
avec nos deux partenaires, montré le nombre très
impressionnant de clients qui, arrivés sur la page du site du
tiers de confiance, décrochent car ils considèrent que
transférer des sommes importantes sans une maîtrise totale du
texte dans leurs langues habituelles, est un risque non
négligeable. C'est en montrant ce pourcentage de
transactions désactivées en dernière minute sur les sites de
nos tiers de confiance, qu'ils ont été immédiatement
convaincus qu'ils devaient eux-mêmes modifier très vite
dans les langues d'Artprice (français, anglais, allemand,
italien, espagnol et chinois), leurs pages et leurs API
informatiques.
C'est donc une affaire réglée qui sera résolue dès le
deuxième trimestre avec très certainement en plus
l'arrivée d'un troisième partenaire asiatique comme
tiers de confiance sur la zone Asie/Pacifique.
Boursica :
Peut-on considérer que la Place de Marché Normalisée aux
Enchères est désormais figée ?
Thierry Ehrmann :
Oui, dans l'essentiel, tout est là. Mais nous avons une
très forte culture dans Artprice de faire des cahiers des
charges béton, synthétique et peu coûteux en ressources
humaines, qui volontairement, laisse une part importante à
des extensions diverses et variées, que nous remonte notre
Customer service qui est excellent pour analyser les demandes
des clients de tous pays. Le plus grand danger est de faire
un développement informatique faramineux, prisonnier d'un
cahier des charges monstrueux qu'on impose de force à la
clientèle internationale. La grosse erreur des Français est
d'essayer d'imposer un produit en fonction de ses
goûts. Artprice a une pratique inverse et nous considérons
que ce sont les clients et le marché qui sont nos meilleurs
prescripteurs et conseillers. Cette approche paraît simple et
pourtant, très peu de groupes en France la pratiquent.
Boursica :
Vous avez fait état, dans un communiqué, que l'offre en
cours correspondait pour le moment au prévisionnel de 2013.
Qu'en est-il ?
Thierry Ehrmann :
En effet, nous avions tablé sur 300 lots nouveaux présentés
par jour, soit une moyenne de 90 000 lots par an. Nous sommes
actuellement dans une moyenne qui avoisine les 500/700
nouveaux lots présentés par jour avec une gamme de prix très
variée. Il faut préciser que pour une grande Maison de vente,
une très belle vente cataloguée n'excède jamais 300 à 350
lots présentés et il faut en moyenne 2 à 3 mois de
préparation, a contrario d'Artprice où il faut 12 heures
en moyenne. Cela en fait réfléchir plus d'un.
Boursica :
Pourquoi ne pas transférer la Place de Marché Normalisée à
prix fixe, aux enchères directement ? Cela amènerait un
chiffre d'affaires que vous possédez déjà, et qui est
considérable et immédiat à Artprice.
Thierry Ehrmann :
En effet, la question s'est posée et nous avons eu un
véritable débat au cœur d'Artprice. J'ai tranché dans
le vif entant qu'auteur de la P.M.N. et j'ai
considéré que la Place de Marché Normalisée à prix fixe,
compte tenu des volumes énormes, est un véritable écosystème
depuis janvier 2005 et que nous devons opérer une transition
en douceur, sans jamais forcer nos fidèles clients.
Boursica :
Vous paraissez bien sûr de votre postulat. Pourriez-vous le
développer ?
Thierry Ehrmann :
C'est simple, je pars du principe qu'une très grande
majorité des vendeurs choisira naturellement les enchères
car, contrairement à un marché comme l'immobilier ou
l'automobile, où la variation entre le prix fixe et les
enchères est somme toute peu importante, dans le cadre
d'Artprice, le différentiel du prix fixe que l'on
présume d'une œuvre d'art et celui du prix résultant
d'une enchère peut, même si le vendeur est un
professionnel, passer du simple au double très naturellement.
C'est sur ce postulat que je considère que nous détenons,
de manière propriétaire, depuis 7 ans, un nombre de vendeurs
et d'acheteurs très important dans un mode bases de
données et software propriétaires et ce, dans le monde
entier, avec un volume de ventes annuelles qui est estimé de
l'ordre d'environ 1,8 milliards € sur les 6,3
milliards € de présentations d'œuvres. Ce serait, selon
moi, une pure bêtise de forcer à passer aux enchères ces
acteurs du marché de l'art qui sont dotés d'une forte
personnalité et qui sauront très bien, par eux-mêmes, se
faire une opinion. J'en ai la preuve tous les jours en
voyant les migrations naturelles.
Boursica :
Mais vos actionnaires veulent un résultat immédiat ?
Thierry Ehrmann :
Nous avons su attendre un certain temps pour que la France se
décide à appliquer en droit interne une directive Européenne.
Je me refuse de faire le jeu contre-productif d'un tout
petit nombre d'actionnaires qui voudraient une
communication réglementée quotidienne et qui assimileraient
notre cours de bourse à la Française des Jeux. Je n'ai
rien contre la Française des Jeux qui est d'ailleurs un
groupe de qualité mais les amateurs d'émotions fortes qui
désirent un rendement quotidien ne sont pas pressentis pour
être actionnaires d'Artprice.
Boursica :
Que pensent vos actionnaires historiques ?
Thierry Ehrmann :
Comme par hasard, l'ensemble de nos actionnaires
historiques et/ou importants sont presque plus patients que
nous le sommes. Nous sommes en train, selon les historiens et
les sociologues du marché de l'art, d'effectuer une
mutation aussi importante que le passage de la corbeille de
bourse aux ECN de type NASDAQ ou Instinet de Thomson Reuters.
A ce titre, il faut laisser un peu de temps au temps,
d'autant plus qu'avec nos dépôts en propriété
intellectuelle et industrielle, nous disposons d'un
monopole légal, en matière de normalisation du marché de
l'art ID artiste, ID oeuvre ID catalogue raisonné, ID
estimation/économétrie... (Voir les précédentes interviews de
Boursica), sans abus de position dominante et donc avec une
absence absolue de concurrents sérieux disposant de droits
similaires en terme de D.P.I. depuis 16 ans. Dans
l'hypothèse peu vraisemblable qu'il arrive un jour un
numéro 2, la règle terrible du Online que je pratique depuis
25 ans s'appliquerait "Second place is the First
loser".
Boursica :
Peut-on voir un rapport avec l'A.G.E. du 30 mars 2012 qui
n'était pas prévue au calendrier ?
Thierry Ehrmann :
Oui, effectivement. Cette A.G.E. grave définitivement dans le
marbre la réussite de notre mutation économique qui est
désormais pour nous de l'ordre de la certitude. Nous
sommes, dans un premier temps, avec 16 ans de travail,
devenus le leader mondial de l'information sur le marché
de l'art avec 1,4 million d'abonnés. En début 2012,
nous avons acquis avec assurance la conviction que notre cœur
de métier et notre rentabilité optimale se situent sur la
Place de Marché Normalisée à prix fixe et aux enchères.
C'est la raison pour laquelle nous modifions en
profondeur notre objet social pour être en adéquation avec
cette aventure extraordinaire qu'est Artprice.
Boursica :
Certains de nos lecteurs nous ont fait part d'une
augmentation de capital lors de cette AGE. Est-ce le cas ? Il
me semble que vous étiez contre.
Thierry Ehrmann :
Il ne s'agit nullement d'une augmentation de capital
mais uniquement d'un plan de stock-options dans le but
d'être attractif pour des profils atypiques et rares que
nous chassons pour la Place de Marché Normalisée aux
Enchères. Il est clair que nous cherchons les meilleurs
éléments où qu'ils soient dans le monde feutré du marché
de l'art et nous voulons nous en donner les moyens. De
même il est logique de récompenser les collaborateurs
d'Artprice qui se sont impliqués dans des proportions
au-delà des normes communes.
Concernant les augmentations de capital, je réitère mes
propos, à savoir que je suis totalement hostile aux
augmentations de capital qui non seulement diluent les
actionnaires mais surtout, et on l'oublie souvent,
interdisent à la société cotée de voir son cours grimper très
rapidement. Contrairement à la grande majorité de sociétés
cotées, nous n'avons pas un euro de dette. Pas de
découvert bancaire, pas d'emprunts court, moyen et long
terme, aucun convenant bancaire, ni d'instruments
financiers à rembourser comme les BSA et autres produits
dérivés, avec de plus, une bonne trésorerie et un BFR
négatif.
Boursica :
Il y a quelques jours, vous avez publié votre rapport du
marché de l'art. Comment se fait-il que tous les médias
français et internationaux ainsi que les institutions ne
citent qu'Artprice lorsqu'on parle de marché de
l'art ? C'est un lobbying ?
Thierry Ehrmann :
Non, je vous le certifie, une seule réponse à votre
interrogation: l'historique d'Artprice : nous sommes
aujourd'hui le seul groupe au monde à avoir normalisé le
marché de l'art avec plus d'un million d'heures
de travail d'historiens, de chercheurs et de journalistes
en marché de l'art qui ont documenté et écrit sur toutes
les œuvres issues de ces manuscrits et catalogues, notamment
du 17e siècle à nos jours. C'est pour cela que nous avons
la plus grande banque de données d'informations sur le
marché de l'art au monde qui permet de tracer les œuvres
d'art au fil des siècles avec 108 millions d'images
ou gravures d'œuvres d'Art de 1700 à nos jours
commentées par nos historiens d'art. Avec cette
normalisation et plus de 3600 maisons de ventes qui sont
connectées sur notre Intranet sécurisé, nous sommes la seule
agence de presse (Art Market Insight) à pouvoir fournir des
données macro-économiques, des cotes et indices selon la
méthode des ventes répétées et plus d'une centaine
d'indices de référence qui permettent à plus de 6300
médias chaque année d'aborder le marché de l'art à
travers des chiffres objectifs et exhaustifs.
Boursica :
Avez-vous un exemple concret ?
Thierry Ehrmann :
J'en veux pour preuve notamment la Chine, où nous sommes
de très loin les seuls à remonter une information aussi
difficile et délicate de par la barrière linguistique ainsi
que les us et coutumes.
Boursica :
Cette présence permanente dans les médias a-t-elle un coût
?
Thierry Ehrmann :
Non, bien au contraire, de manière systématique et
contractuelle, la presse écrite et audiovisuelle a
l'obligation de nous sourcer avec notre code Internet et
de commenter notre méthodologie. Nous estimons que chaque
année, nous économisons en valorisation entre 16 et 18
millions d'euros d'espaces publicitaires qui, de
toute façon, n'auraient pas la même pertinence car rien
ne remplace un contenu d'agence de presse dont le degré
de lecture est infiniment plus fort que de la publicité, si
talentueuse soit elle. Concernant les études de marché
spécifiques pour les médias, les assurances ou le private
banking, bien évidemment, nous facturons nos études comme il
se doit.
Boursica :
Mais vous aviez bien pourtant parlé d'une campagne
publicitaire internationale pour le lancement de la Place de
Marché Normalisée aux Enchères ?
Thierry Ehrmann :
Oui, dans le cadre du lancement des enchères, nous avons
certes bénéficié de très bonnes retombées médiatiques mais
nous avons complété, pour l'exercice 2012, par un plan de
campagne ciblé sur la presse artistique, où nous avons pris
pour chaque pays clé le leader et le co-leader ainsi que des
campagnes sur des networks T.V. très ciblés sur l'art et
le luxe. La campagne a démarré fin janvier 2012, pour se
caler sur le calendrier du marché de l'art, qui prend son
amplitude avec les ventes dites de printemps.
Boursica :
Revenons au rapport annuel du marché de l'art qui vient
de sortir. Celui-ci étant disponible sur votre site Internet,
pourriez-vous nous dire brièvement quel enseignement
essentiel doit-on en tirer ?
Thierry Ehrmann :
Le premier enseignement est son titre : "L'art ne
s'est jamais aussi bien vendu en 2011". Le produit
mondial des ventes aux enchères a dépassé son record absolu
avec 11,5 milliards $. Ce qui veut dire qu'avec le
premier marché, soit les galeries, marchands d'art et
courtiers, on est désormais sur une base d'environ 90
milliards $, selon les ratios entre le premier et le second
marché. Le taux d'invendus est au plus bas. La Chine
écrase les USA avec 41,4% de volume mondial et l'Asie
devient à elle seule un véritable marché avec près de 45% du
marché mondial. Les artistes chinois trustent toutes les
meilleures places tant dans notre Top 10 que dans notre Top
500. J'en veux pour exemple l'Icône occidentale Pablo
Picasso qui, pour la première fois, sort du podium pour
devenir numéro 4 mondial. Quant à la France, rien de nouveau,
la chute continue toujours et encore.
Le nombre d'enchères millionnaires ne cesse de croître
dans le monde, notamment en Asie.
Boursica :
Le marché de l'art serait donc comme l'or, une valeur
refuge ?
Thierry Ehrmann :
Oui, nous en avons la démonstration avec les deux épreuves
terribles où l'économie et la finance mondiale se sont
effondrées en 2008 et en 2011 alors que le marché de
l'art a fait preuve d'une grande maturité et de
performances exceptionnelles. Ce n'est pas pour rien que
le private banking et les gestionnaires de patrimoine
conseillent désormais, notamment grâce aux outils
économétriques d'Artprice, de se diversifier en période
de crise dans le marché de l'art. Je vous invite à
regarder nos progressions par gamme de prix et vous
comprendrez que l'Artprice Global Index se porte mieux
que le S&P 500 ou l'Eurostoxx 50.
Boursica :
Justement, en parlant d'enchères millionnaires, à quand
la première enchère millionnaire sur Artprice que tout le
monde attend ?
Thierry Ehrmann :
Les enchères millionnaires sur Artprice sont une absolue
certitude, au vu de nos discussions avec les grands acteurs
du marché de l'art. Ce n'est donc qu'une question
de date. Un seul pressentiment, cette enchère portera
vraisemblablement sur un artiste Chinois.
Boursica :
Pour revenir aux performances de la France, pourquoi une
telle chute d'année en année ?
Thierry Ehrmann :
J'ai souvent répondu à cette question. La France était
numéro 1 mondial dans les années 60 mais hélas, elle n'a
cessé de perdre du terrain. Quelques chiffres : l'art
contemporain sur une année pèse 13 millions $, ce qui
signifie à l'échelle du Monde le néant, New York et
Londres sur de belles ventes cataloguées réalisent chacune en
une journée ce que la France fait en un an. Il est évident
que le monopole de près de 500 ans des commissaires-priseurs
et la première réforme de 2000 qui a avorté dans des
conditions pathétiques, ont contribué à paralyser la maison
France. Nous en savons quelque chose à titre personnel, avec
nos 16 ans de combats législatifs et dizaine de procédures
desquelles nous sommes sortis vainqueur après des années de
calendrier judiciaire.
Boursica :
Mais la guerre est désormais terminée entre Artprice et
l'ancien monopole ?
Thierry Ehrmann :
Sur le plan économique, la messe est dite et nous avons une
autoroute californienne devant nous. Sur le plan du droit,
sans être rancunier, nous devons finaliser quelques dossiers
où le préjudice économique que nous avons subi doit aboutir à
un processus indemnitaire. De même, certaines attaques qui
n'ont pas abouti méritent réparations en demandes
reconventionnelles. Par ailleurs, nous maintenons avec
fermeté, nos poursuites pénales et notre plainte contre des
Maisons de ventes françaises pour entente illicite devant
l'Autorité de la concurrence avec de nouveaux éléments
depuis fin janvier 2012.
Boursica :
Vous visez qui ?
Thierry Ehrmann :
En réalité, un tout petit nombre d'anciens
commissaires-priseurs parisiens, essentiellement à Drouot,
avec ses scandales judiciaires et mises en examen à
répétitions. Concernant l'organisme de régulation, qui
est le Conseil des Ventes Volontaires, le communiqué de
presse du 6 Janvier 2012 à quelques heures de notre lancement
de la Place de Marché Normalisé aux enchères, sans le moindre
courrier, ni appel téléphonique préalable, ni la moindre mise
en demeure était totalement surréaliste alors qu'il nous
connaît très bien, tant par nos auditions, que nos
fournitures de données chaque année pour leur rapport annuel
sur le marché de l'art. Depuis quand un acte introductif
d'instance se matérialise par un communiqué de presse,
sans que nous soyons prévenus préalablement par voie
judiciaire ?
Pour moi la mission du Conseil des ventes est primordiale,
mais dans le strict respect du contradictoire. Les choses
étant ce qu'elles sont, une grille de lecture nous fait
penser que ce petit noyau dur de commissaires-priseurs proche
de Drouot, fous de rage des conséquences de la loi du 20
juillet 2011 et notamment de l'article 5, dont je viens
de vous parler, a induit de manière intentionnelle en erreur
le Conseil des Ventes Volontaires qui a su ces dernières
années avec peu de moyens, oser ouvrir avec courage de vrais
débats sur le déclin inexorable du marché français. Il faut
savoir que nous avons eu des menaces extrêmement violentes de
quelques rares acteurs qui ne supportent pas de voir leurs
marges et leur marché s'effondrer. Mon côté perspicace et
mes nombreuses heures de vol au compteur me font dire que de
telles manifestations de haine et de fureur prouvent que nous
avons frappé là où résidait le profit, à savoir entre autres
5% de commission nette sur les œuvres de plus de 15 000 € et
7% de 7 500 à 15 000 €.
Boursica :
Internet a donc dévoré le marché de l'art, entre autres,
avec vous ?
Thierry Ehrmann :
Il faut tout relativiser et ne jamais oublier que plus de
4500 sites Internet d'art ont disparu depuis 2000 et que
nous avons vécu la quasi-disparition boursière de site
d'art sur Internet désormais relégué en OTC sans aucun
volume. Pour nous, il est vrai que nous avons démarré
Artprice avec moins de 30 millions d'internautes et que
nous sommes aujourd'hui à plus de 2,7 milliards
d'internautes. Mais le meilleur est à venir. Mais mieux
que tout, la déclaration du Président de Christie's sur
les œuvres d'Art et Internet est pour nous une excellente
certification.
Boursica :
Il reste encore de la croissance sur Internet ?
Thierry Ehrmann :
Nous n'en sommes qu'à 30 % du cycle de croissance de
l'Internet à 15% du processus de dématérialisation de
l'ancienne économie. L'Internet mobile colle
parfaitement à Artprice, car notre clientèle est par nature
nomade et a besoin d'informations dans le feu de
l'action, comme les experts, les assureurs, les
galeristes, les auctioneers, les douanes et bien sûr les
collectionneurs et amateurs en situation d'achat ou de
vente en galerie ou en salle des ventes.
L'Internet mobile pour Artprice devrait représenter 80%
de nos consultations. Nous en sommes déjà à plus de 30% et
cette année, l'ensemble des grands bureaux d'études
émet une prévision en nombre de Smartphones vendus un chiffre
pour 2012 qui se situe entre 550 et 700 millions de nouveaux
internautes mobiles. En 2015, c'est plus de 3,5 milliards
d'internautes mobiles que nous pourrons connecter à
Artprice.
Boursica :
Qu'entendez-vous par 15% du processus de
dématérialisation de l'ancienne économie:
Thierry Ehrmann :
Nous ne sommes qu'au début de la dématérialisation de
l'ancienne économie.
Je reprendrais la citation de mon vieux maître Pythagore, le
premier des philosophes pour lequel tout est nombre, à
l'exception des essences que sont les émotions humaines
non quantifiables, indicibles et se jouant des nombres. A ce
titre au-delà du nombre d'internautes, pratiquement tous
les actes de commerce peuvent être dématérialisés, Artprice
avec le Marché de l'Art est un très bon exemple. Vous
verrez que l'enjeu majeur dans le monde sera ce binôme:
dématérialisation et développement durable. La seule vraie
réponse à la crise énergétique, c'est la
dématérialisation.
Boursica :
Devant de tels chiffres, comment faites-vous sur le plan
technique ?
Thierry Ehrmann :
Nous avons, à travers notre maison mère, le Groupe Serveur,
qui est un des tout premiers pionniers de l'Internet
depuis 1987 (selon Time Magazine), travaillé dans les années
90, dans le respect des directives Européennes et de la CNIL,
sur le concept de Data mining, mais nous sommes maintenant
passés au concept de "Big data" avec des unités de
stockages qui se mesureront à terme en péta-octet. Ces
données sont produites en temps réel, elles arrivent de tous
pays en flots continus, sont méta taguées mais de façon
hétérogène et proviennent de sources très diverses
déstructurées et non prédictives.
Boursica :
Quelle est la différence entre le Big data et le Data mining
? C'est de la même chose dont on parle ?
Thierry Ehrmann :
Non, je vais vous expliquer pourquoi. Le concept de Data
mining était de croiser des données à haute valeur ajoutée
des banques de données des groupes, pour amener de la data
très qualitative. Le concept de Big data, c'est bien
évidemment le Data mining en sous-ensemble, mais avec une
collecte, toujours dans le respect des règles de protection
des données personnelles, de milliards de données (logs)
considérées jusqu'alors comme non essentielles, alors
qu'en réalité, dès que nous avons pu constater
l'effondrement du coût du péta-octet (1000 téraoctets),
nous nous sommes aperçus que l'exploitation en Data
mining de ces données à priori moins qualitatives et
considérées comme négligeables, étaient en vérité d'une
richesse peu commune. Nous pouvons désormais comprendre des
phénomènes complexes et instantanés et aboutir très vite à
des produits et services qui collent littéralement à la
demande de nos dizaines de millions de visiteurs gratuits ou
payants.
Boursica :
Concrètement, quels types d'applications peuvent sortir
du "Big data" ?
Thierry Ehrmann :
Nous avons pu par exemple mesurer, depuis l'ouverture de
la Place de Marché Normalisée aux Enchères le 18 janvier
2012, non seulement, le nombre impressionnant de visiteurs
qui n'étaient jamais venus sur Artprice, mais nous avons
pu comprendre aussi, en examinant ces centaines de millions
de logs depuis le 18 janvier 2012, pourquoi ces nouveaux
clients ne venaient que maintenant, depuis le lancement des
enchères. De même, nous pouvons, comme je l'ai dit en
début d'interview, dans cet énorme trafic qui a été
multiplié pratiquement par cinq sur la P.M.N., décrypter ces
nouveaux clients et prospects qui semblent ne
s'intéresser qu'aux enchères mais qui en réalité
passent leur temps à zapper entre la Place de Marché
Normalisée aux enchères et nos données gratuites et très
limitées en valeur, dans nos bases de données payantes sur
les cotes, indices et biographies, sans faire un acte
d'achat supérieur à 50 €.
Grâce au Big data, nous pourrons produire des abonnements sur
mesure qui prennent en compte la présence à 70% de
l'Internet mobile chez ces nouveaux clients et prospects
et de leur degré d'informations payantes selon leurs
profils que nous situons de l'ordre de 36 € /an soit 3 €
par mois. Ce qui change tout dans cette analyse c'est que
notre cible ne se mesure plus en million d'abonnés, comme
c'est le cas actuellement, mais en dizaines de millions
de consommateurs d'art sur mobile de type iPhone ou en OS
Android de Google
Boursica :
Dans tout cela, où sont les artistes ?
Thierry Ehrmann :
Et bien justement, on s'aperçoit grâce au Big data,
malgré notre banque de données de biographies regroupant 1,8
million d'artistes, dont 450 000 cotés aux enchères
publiques, qu'il existe près d'un million
d'autres artistes, beaucoup moins connus, avec un
parcours plus discret, qui sont en réalité fascinés par la
possibilité de vendre leurs œuvres sur notre Place de Marché
Normalisée aux Enchères, avec leur biographie en ligne, sans
rentrer dans le processus économique de la galerie puis de la
maison de ventes qu'ils refusent par une philosophie
d'indépendance. Ce potentiel est loin d'être
négligeable et le prix de leurs œuvres qui est souvent
inférieur à 7500 €, nous permet d'appliquer notre
fourchette basse de 9% de commission et frais.
Boursica :
Concernant votre réseau social Artprice Insider, où en
êtes-vous ?
Thierry Ehrmann :
Ce réseau social construit avec des sociologues et
professionnels des réseaux sera le contraire de Facebook, à
savoir que les professionnels et membres d'Artprice
apparaîtront sous leur vrai nom et Artprice Insider sera
couplé à la Place de Marché Normalisée à prix fixe et aux
enchères. Les premiers tests donnent d'excellentes
remontées et les échanges sont tous qualitatifs a contrario
de certains réseaux sociaux où l'inutile est omniprésent.
Cela fait 18 mois qu'on le peaufine car c'est une
véritable bombe dans le monde feutré du marché de l'art
dans lequel notre droit à l'erreur doit être proche de
zéro.
Boursica :
Ce réseau serait donc réservé aux initiés du marché de
l'art ?
Thierry Ehrmann :
Non, pas tout à fait. Je dirais plus que ce réseau
s'apparenterait à un Think tank ou à une Brain box. La
puissance d'Artprice Insider doit être d'émettre des
idées originales, d'avoir un réservoir d'experts,
d'être un lieu d'expertise, d'éclairer le débat
autour du marché de l'art et faire émerger de nouveaux
concepts. Tout, absolument tout est à réinventer dans le
marché de l'art qui a été totalement endormi jusqu'à
l'arrivée d'Internet. Petit scoop, après leurs
accords positifs, nous pouvons annoncer qu'il y aura en
live des intervenants qui font partie du Top 100 des Market
Makers du marché de l'art.
Boursica :
Avec tout ce programme, comment trouvez-vous le temps de
préparer une rétrospective de vos 30 ans de sculpteur
plasticien pour juin 2012 à la Demeure du Chaos, qui est le
siège social d'Artprice mais aussi un musée d'art
contemporain ?
Thierry Ehrmann :
En effet, cela fait 18 mois que je prépare mes 30 ans de
sculpteur-plasticien que je fêterai en juin 2012. Pour cet
événement important, j'ai réalisé depuis 18 mois, 450
sculptures d'acier brut qui sont une invitation aux
visiteurs à réaliser le parcours plein air et découvrir les
3609 œuvres formant le Corpus de la Demeure du Chaos, appelé
aussi Abode of Chaos, dixit "The New York
Times".
Il aura fallu plus de 900 tonnes d'acier brut, des
maîtres forgerons et des lasers de haute précision, pour
arriver à créer ce qui sera, au niveau Européen, la plus
grande installation statuaire. Une fois de plus, cette
démarche plasticienne me permet de décrypter avec une grande
sensibilité les artistes et les acteurs du marché de
l'art. On ne peut pas réaliser Artprice sans être
totalement immergé dans le champ de l'art. Pour
l'anecdote, il y a un nombre important d'actionnaires
et/ou clients dans nos 120 000 visiteurs/an, je peux donc le
week-end bénéficier de discussions et d'échanges très
pertinents pour Artprice hors le contexte du travail. Avec
une pointe d'humour, je peux donc dire que je fais la
semaine de 63 heures. Ceci dit, ce choix que j'accepte
avec lucidité, peut expliquer bien des choses que certains ne
saisissent pas vraiment.
Boursica :
Que dire de votre cours de bourse de 2011 ? Et
qu'attendez-vous de 2012 ?
Thierry Ehrmann :
Il me semble que peu de dirigeants de sociétés cotées en
Europe ont pu pressentir l'évolution de leur cours comme
nous en 2011. Artprice a eu le meilleur parcours de tout le
marché réglementé, avec +472% de progression sur l'année
2011 et un volume traité de 873 millions € du 1er janvier
2011 au 31 décembre 2011, avec le passage mythique à 67€ que
j'avais prédit, suite au célèbre dicton boursier
"cours vu, cours revu". Sur 1 an en moyenne mobile,
nous sommes à +476% et 1,25 milliards € traités sur le titre.
Cette année, avec le compartiment B de Eurolist et notre
passage au SRD Long Only il y quelques jours, et bien sûr les
enchères, j'ai le pressentiment que l'on peut
espérer, avec toutes les précautions d'usage, notamment
par des événements exogènes à Artprice, un cours se
consolidant autour de 90€.
Boursica :
Vous avez parlé récemment de fonds qui s'intéressent à
Artprice, peut-on en savoir plus?
Thierry Ehrmann :
Sans rentrer dans le principe de confidentialité entre les
parties, notre passage au SRD Long Only fait que de nombreux
fonds qui statutairement n'ont le droit de prendre que
des positions sur les sociétés françaises au SRD peuvent donc
prendre désormais des lignes sur Artprice. Ils ont une
approche très différente des français et utilisent la méthode
des comparables avec entre autre Sotheby's qui est la
seule Maison de ventes cotée dans le monde, car ils arrivent
en 2012 avec une vision d'Artprice comme acteur principal
du marché de l'Art sur Internet par notre Place de Marché
Normalisée aux enchères ou à prix fixe, et de ce fait,
valorisent différemment Artprice car ils considèrent que
notre cours ne représente absolument pas la vraie valeur
d'Artprice.
Boursica :
Pouvez-vous être plus précis ?
Thierry Ehrmann :
Nous vous avons donné dans la première interview de juin 2011
les éléments de calcul avec des exemples précis des méthodes
de valorisations vielles de plus de 120 ans (N.B. la valeur
d'une Maison de Ventes dans le monde, c'est
principalement 80 % le fichier client, entre 800 et 4000
dollars par client et 20 % pour la marque de la Maison de
Ventes si cette dernière est notoirement connue. Pour bien
comprendre la différence entre un poste client estimé à 800
dollars et l'autre à 4000 dollars, c'est à partir des
strates d'informations détenues sur le client final que
l'on calcule le prix). Donc pour les équipes
d'Artprice, moi-même et nos actionnaires c'est la
quasi certitude d'être au début d'une nouvelle
histoire. Je dirais que nous sommes comme une société qui
s'apprêterait à réaliser une I.P.O. au Nasdaq avec en
prime, la maturité que nous avons déjà avec 11 ans de
parcours sans faute, au marché réglementé. C'est très
excitant et terriblement motivant.
Boursica :
Et vos accords sur l'Asie, où en sont-ils ?
Thierry Ehrmann :
Au mois de mars 2012, nous démarrons en Chine une longue
marche sur les principales maisons de ventes Chinoises avec
près de 40 rendez-vous, avec lesquelles nous partageons
beaucoup d'affinités, notamment sur la dématérialisation
du marché de l'art, et elles pensent comme nous, que la
notion de salles de ventes physiques est inappropriée en 2012
face à l'Internet et notamment notre Place de Marché
Normalisée aux Enchères qui aura sa propre assise à Hong
Kong, dans nos futurs bureaux.
L'Asie, que je connais bien depuis 20 ans, obéit à des
rythmes très différents de nous autres occidentaux. Il faut
un temps énorme pour acquérir la confiance de votre futur
partenaire. La parole donnée prime sur le droit des contrats.
En revanche, la mise en place d'un business se fait à une
vitesse fulgurante qui panique généralement les occidentaux.
Je pense qu'Artprice est très bien positionnée en Asie où
nous sommes considérés comme avant-gardistes, très loin
devant les vieilles maisons anglo-saxonnes considérées par
les Asiatiques comme parfois dépassées par les
événements.
Boursica :
Puisque vous parlez des vieilles maisons anglo-saxonnes,
quels sont vos rapports avec elles actuellement et surtout
depuis le 18 janvier 2012 ?
Thierry Ehrmann :
Le rapport de force qui s'était établi en 2005 avec la
Place de Marché Normalisé à prix fixe a considérablement
évolué. Il semble que les deux économies ont chacune
effectuée une réflexion en profondeur sur leur avenir. Il est
vrai que les confrontations entre l'ancienne économie et
l'économie du numérique sur d'autres secteurs que le
marché de l'art ont fait avancer le débat. Une fois de
plus la Messe est dite avec près de trois milliards
d'internautes face aux 50 millions de 1999, d'où ma
théorie du changement de paradigme économique.
Boursica :
Pouvez-vous développer plus précisément le contenu de ce
débat ?
Thierry Ehrmann :
L'ancienne économie a enfin compris qu'être depuis 25
ans sur Internet, comme Groupe Serveur, qui contrôle Artprice
et dont je suis le fondateur, est un espace temps, non
seulement incompressible mais très onéreux à acquérir,
notamment par la culture de l'Internet qui est très
sophistiquée. Sur le secteur du marché de l'art, une
anecdote est très révélatrice, avec des recommandations à
New-York, dues aux manifestations du « Occupy Wall Street ».
Il est recommandé aux gens aisés d'éviter un certain
nombre de lieux et notamment les salles des ventes. Ceci dit,
les grandes maisons sont en train de liquider peu à peu leurs
immobiliers ou résilier de manière anticipée leurs baux. Ils
découvrent que l'informatique en réseau sécurisé
Intranet, le Data mining, le marketing comportemental,
l'indexation, les bases de données normalisant le marché
de l'art, sont une industrie lourde, avec des barrières
d'entrées financières et technologiques très élevées et
parfois, comme cela est notre cas, des protections au titre
de la propriété intellectuelle qui leur interdisent tout
simplement d'utiliser hors contrat, la réalisation de
Places de Marché Normalisées ® sur le marché de l'art
dont Artprice possède les différents droits d'auteur tels
que entre autres le Droit sui generis.
Boursica :
Et alors, que doit-on conclure ?
Thierry Ehrmann :
La première conclusion est que la partie adverse a pris
conscience de la valeur des actifs corporels et incorporels
qui constituent une des grandes richesses d'Artprice. Le
point numéro deux, est que les grandes maisons ont toutes
investi sur Internet, avec généralement, deux à trois plans
d'investissements, des sommes se chiffrant
systématiquement en centaines de millions de dollars et dont
le résultat est insatisfaisant et parfois se révèle
catastrophique. Le point numéro trois passe par la
reconnaissance d'un acteur historique comme Artprice et
la capacité d'imaginer pour la première fois un véritable
partage du marché de l'Art.
Boursica :
Comment se partagerait ce marché de l'Art ?
Thierry Ehrmann :
De manière très simple, tout le segment des œuvres
inférieures à 15 000 € leur est étranger, et pourtant il pèse
un volume colossal sur le marché de l'art (81%). Entre 15
000 et 50 000 €, ils ne sont pas vraiment compétitifs en
termes de prix. Se pose alors la question des œuvres de plus
de 50 000 € et bien sûr celle des œuvres millionnaires sur
lesquelles se greffent alors un service et une prestation
parfois sur mesure pour l'acheteur comme pour le vendeur.
Très vite, ces vielles maisons font leurs calculs et voient
que leurs avantages marketing et leur ancienneté ne suffisent
pas à équilibrer leur économie en se projetant sur les cinq
prochaines années. Il leur reste alors une démarche
pragmatique en se rapprochant de nous.
Pour autant, nous respectons leur démarche mais nous ne
pouvons par faire autrement que de nous référer à nos
partenaires asiatiques qui ont depuis longtemps anticipé la
situation et n'ont donc plus de problème à résoudre. Il
est tout à fait possible que nous arrivions, néanmoins, à
trouver des terrains d'entente car une jeune génération
de cadres supérieurs à la tête de ces vieilles maisons ne
s'embarrassent pas des fantômes du passé et passent à
l'acte.
L'année 2012 sera certainement pour nos actionnaires
accompagnée d'heureuses nouvelles, parfois
surprenantes.
Boursica :
Peut-on en savoir plus ?
Thierry Ehrmann :
Sans trahir le secret des affaires, nous avons des acteurs
majeurs qui, avec beaucoup de maturité, ont décidé de nous
adopter progressivement en marque blanche ou en marque grise.
Il est évident que dans ces cadres, le transfert de chiffre
d'affaires de sociétés traditionnelles qui opèrent aux
enchères d'art depuis de nombreuses années, en utilisant
notre Place de Marché Normalisée aux Enchères pour leur
propre compte, est susceptible d'impacter le cours de
manière non négligeable.
Actuellement nous vivons de manière régulière, ce type de
scénario: le départ d'un directeur général à la retraite
d'une très grande Maison de ventes internationale et
l'arrivé d'un nouveau D.G. de 35 ans qui
immédiatement après avoir fait son audit, se rapproche de
nous avec un vrai désir de faire du big business, alors que
son prédécesseur par son âge proche de la retraite,
considérait Artprice dans le meilleur des cas comme un Ovni
dans le monde de l'Art sans aller plus loin. Une fois de
plus, la patience est une des conditions essentielles de la
réussite d'Artprice depuis sa création.
Boursica :
Dans ce cadre, quel est votre statut ?
Thierry Ehrmann :
Dans ces cas-là, nous opérons comme une SSII et un centre
Serveur où nous facturons des frais récurrents
d'hébergements et d'utilisation de nos logiciels et
bases de données propriétaires.
Boursica :
Un dernier mot enfin. Vous nous avez, dans notre première
interview, déclaré qu'Artprice était à 10% de son
histoire, puis, dans la deuxième interview, vous pensiez
plutôt n'être qu'à 5%. On est à combien
aujourd'hui ?
Thierry Ehrmann :
Nous sommes toujours à 5% du développement d'Artprice
mais la grande différence, c'est que ces 5% qui étaient
une intuition en 2011, sont désormais confortés par des faits
et des chiffres, ce qui change tout pour nos actionnaires et
nous-mêmes …
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Les précédentes interviews exclusives de Thierry
Ehrmann :
http://serveur.serveur.com/Press_Release/2011-interview-thierry-ehrmann.html
Artprice est le leader mondial des banques de
données sur la cotation et les indices de l'Art avec
plus de 27 millions d'indices et résultats de ventes
couvrant 450 000 Artistes. Artprice Images(R) permet un
accès illimité au plus grand fonds du Marché de l'Art
au monde, bibliothèque constituée de 108 millions
d'images ou gravures d'oeuvres d'Art de 1700
à nos jours commentées par ses historiens. Artprice
enrichit en permanence ses banques de données en
provenance de 4 500 Maisons de ventes et publie en
continu les tendances du Marché de l'Art pour les
principales agences et 6300 titres de presse dans le
monde. Artprice diffuse auprès de ses 1 400 000 membres
(member log in), ses annonces, qui constituent désormais
la première Place de Marché Normalisée(R) mondiale pour
acheter et vendre des oeuvres d'Art à prix fixes ou
aux enchères (réglementée par les alinéas 2 et 3 de
l'article L 321.3 du code du commerce). (source
Artprice). Artprice est cotée sur Eurolist by Euronext Paris au compartiment B, SRD long only : Euroclear : 7478 - Bloomberg : PRC - Reuters : ARTF Découvrir l'alchimie et l'univers
d'Artpricehttp://web.artprice.com/video/
dont le siège social est le célèbre Musée d'art
contemporain Abode of Chaos.
Sommaire des communiqués d'Artprice : http://serveur.serveur.com/press_release/pressreleasefr.htm
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